Rituel capitaliste autrefois associé aux échanges d'enveloppes et aux achats de fin d'année, la prime traverse de mauvais moments depuis quelque temps, alors que l'économie mondiale se trouve en pleine récession.

Jim Fisher, vice-recteur de l'école de gestion Rotman à l'Université de Toronto, croit qu'au moins une bonne chose va naître de la situation actuelle: les gens vont réexaminer la prime et sa raison d'être.

De nombreux observateurs - parmi lesquels des avocats des Etats-Unis et de Grande-Bretagne, des économistes, des défenseurs des droits des travailleurs ainsi que des théoriciens de la gestion - estiment que la prime ne joue plus le rôle qui était auparavant le sien.

L'octroi aux dirigeants du géant américain de l'assurance AIG, en difficulté, de 165 millions $ US en primes pour leurs réalisations lors de la désastreuse année 2008, alors même que l'entreprise profite des largesses du gouvernement américain sous la forme de milliards de dollars d'aide financière, ne constitue que la pointe de l'iceberg.

La même semaine que des responsables d'AIG étaient forcés de comparaître devant le Congrès des Etats-Unis, à Washington, ceux de la société canadienne Nortel, en faillite, se battaient en cour au sujet des primes de 7,3 millions $ versées à huit hauts dirigeants de la société.

Les dirigeants de la société d'Etat Radio-Canada, faisant face à la possibilité d'importantes mises à pied susceptibles de toucher jusqu'à 1200 employés, ont paru étonnés par la réaction défavorable provoquée par leur décision de ne s'accorder que la moitié des primes prévues pour 2009.

«Les primes, comme elles avaient à l'origine été conçues, devraient être liées à la performance», a affirmé Linda Duxbury, de l'école de commerce de l'Université Carleton, à Ottawa.

«Ces primes ne sont d'aucune façon liées à quelque dimension de la performance que ce soit. C'est en fait le contraire», a-t-elle cependant ajouté.

Encore relativement modéré en Amérique du Nord, le débat entourant la culture des primes fait pleinement rage en Grande-Bretagne.

«Les fonctionnaires s'attendent maintenant à de grosses primes s'ils atteignent leurs objectifs, et dans le cas contraire, ils s'attendent quand même à des primes pour les encourager à essayer plus fort», a récemment affirmé le député libéral démocrate britannique Vince Cable, ancien économiste en chef de la société pétrolière Shell.