Le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, persiste et signe: l'économie canadienne enregistrera une croissance de 3,8% en 2010 même si plusieurs économistes estiment ce scénario de croissance trop optimiste.

Comparaissant hier devant le puissant comité des finances de la Chambre des communes, M. Carney a ainsi maintenu les prévisions de croissance divulguées il y a deux semaines par la Banque du Canada même si les mauvaises nouvelles continuent de s'accumuler sur le front économique au pays.

 

Le gouverneur de la Banque du Canada a soutenu que l'économie canadienne traversera une période fort difficile en 2009 -une contraction du produit intérieur brut de 1,2%- avant de rebondir de manière spectaculaire l'an prochain. M. Carney a affirmé que la perte record de 129 000 emplois en janvier est conforme aux projections de la Banque du Canada.

«En raison de la baisse de régime à l'échelle internationale et du tassement de la demande de nos exportations, l'année 2009 sera très difficile pour l'économie canadienne. Nous sommes maintenant en récession. (...) Le premier trimestre sera particulièrement préoccupant puisqu'il sera marqué par un repli considérable de l'activité économique et une montée du chômage. Malheureusement, les données sur l'emploi publiées vendredi corroborent largement nos prévisions», a affirmé M. Carney.

Le taux de chômage a bondi de 6,6% en décembre à 7,2% en janvier à la suite de la perte de 129 000 emplois. Cette saignée au chapitre de l'emploi devrait se poursuivre au cours des prochains mois.

Mais M. Carney a affirmé que la politique de détente monétaire de la Banque du Canada entreprise depuis octobre dernier, combinée aux mesures budgétaires adoptées par le gouvernement fédéral, donnera du tonus à l'économie canadienne d'ici de 12 à 18 mois.

Il a affirmé que la reprise prévue par la Banque du Canada est en réalité «plus modeste que de coutume». Cette reprise, selon Mark Carney, devrait être soutenue par plusieurs facteurs, dont la rapidité et l'ampleur des mesures de politique monétaire, la dépréciation du dollar canadien, les mesures de relance du dernier budget, la remontée de la demande extérieure en 2010, la solidité du système bancaire canadien, entre autres choses.

Scénario «réaliste»

«Nous ne préparons pas de scénario pessimiste. Nous ne préparons pas de scénario optimiste. Nous préparons un scénario réaliste», a affirmé M. Carney aux députés qui se demandaient s'il ne portait pas des lunettes roses lorsqu'il prévoit une reprise de 3,8% l'an prochain.

«Votre scénario de croissance nous apparaît optimiste pour l'an prochain. Nous espérons que vous aurez raison», a affirmé le critique libéral en matière de finances, John McCallum, ancien économiste en chef de la Banque Royale.

Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a fait écho aux propos du député libéral en après-midi.

«Ça me semble optimiste par rapport à toutes les prévisions qui sont faites à travers le monde et les conséquences que cela a ici. On ne vit pas dans un monde isolé. La reprise américaine va être déterminante. (...) Espérons que ça soit le cas. Mais ça me semble optimiste», a dit M. Duceppe.

Dans son dernier budget déposé le 27 janvier, le ministre des Finances, Jim Flaherty, affirmait que la moyenne des prévisions du secteur privé concernant la croissance de l'économie canadienne pour 2010 s'établissait à 2,4%, soit bien en deçà des projections de la Banque du Canada.

M. Carney a tout de même convenu que les projections de la Banque du Canada «sont entachées d'un degré exceptionnellement élevé d'incertitude», notamment à cause de la situation économique difficile aux États-Unis.

Le gouverneur de la Banque du Canada a d'ailleurs rappelé que la récession a commencé aux États-Unis dans la foulée de la crise immobilière et que la reprise économique devra aussi commencer chez nos voisins du Sud pour relancer l'économie mondiale.

Il a affirmé que, depuis le mois d'octobre, la Banque du Canada a réduit son taux directeur de 250 points de base et qu'elle dispose toujours «d'une souplesse considérable» en matière de politique monétaire qui pourrait être utilisée si le besoin s'en fait sentir. À l'heure actuelle, le taux directeur s'élève à 1%, soit le taux le plus bas dans l'histoire de la Banque.