L'équipementier télécoms américain Motorola (MOT) a affiché mardi de nouvelles pertes en 2008 et prévenu qu'elles allaient s'aggraver en début d'année, semant le doute sur sa capacité à survivre dans une activité, les téléphones portables, où la concurrence est intense.

Les pertes annuelles de Motorola s'élèvent à 4,16 milliards de dollars US, dont 3,57 milliards pour le seul quatrième trimestre.

Si l'on exclut le coût de la lourde restructuration en cours (7000 suppressions de postes annoncées depuis octobre) et des dépréciations d'actifs, le résultat courant par action est sensiblement conforme aux attentes du marché, tant pour le trimestre que pour l'année.

Mais les prévisions pour le trimestre en cours et l'effondrement de l'activité des portables ont surpris.

Motorola table désormais sur une perte par action (hors coûts de restructuration et autres) de 10 à 12 cents pour la période janvier-mars, alors que les analystes n'en attendaient que 6.

Pour préserver ses liquidités, il a décidé de suspendre le versement du dividende.

Le titre Motorola a du coup été massacré à la Bourse du New York, perdant 10,57% à 4,06 dollars vers 19h30 GMT.

L'agence d'évaluation financière Moody's a baissé la note de l'équipementier d'un cran, à Baa3, pour sanctionner à la fois les mauvaises performances passées et la difficulté qu'il y aura à redresser l'activité des téléphones dans le climat de crise.

Les analystes ne cachent plus leurs doutes sur la viabilité de l'activité des téléphones portables, en panne de best-sellers depuis le lancement du RazR en 2005, et soumise à une sévère cure d'amaigrissement par le nouveau patron appelé il y a six mois pour la redresser, Sanjay Jha.

Les ventes de téléphones «Moto» se sont effondrées de 51% au dernier trimestre 2008 par rapport à l'année précédente, à 2,35 milliards de dollars.

Pour Douglas McIntyre, analyste sur le site spécialisé 247wallst.com, ces chiffres sont si faibles que Motorola a «passé le point de non-retour».

Carmi Levy, analyste de la société AR Communications, n'était gère plus optimiste, soulignant que dans l'état actuel du marché des téléphones portables, «seuls les plus forts survivent, et Motorola est le plus faible».

M. Jha s'est cependant dit «pleinement engagé» à rendre sa santé à cette activité, réaffirmant sa stratégie reposant sur le développement d'appareils en milieu et haut de gamme, centrés sur un nombre réduit de système d'exploitation, en particulier l'Android développé par Google. Il a promis de nouveaux produits prometteurs pour le quatrième trimestre.

Pour autant, il s'est de nouveau dit incapable de fixer une date pour la scission de l'activité téléphones portables, initialement prévue cette année mais reportée sine die à l'automne faute de performances.

A en croire M. Levy, en fait cette scission pourrait intervenir plus tôt qu'on ne le croit, dans la mesure où l'effondrement de l'activité portable pourrait conduire à l'isoler pour ne pas contaminer l'ensemble de la société. «Les justifications d'une cession ou d'une vente d'actifs ont progressé».

Mais cette idée fait débat. Un analyste de Standard and Poor's l'a jugée peu réaliste, vu l'état des marchés financiers. La scission «pourrait bien ne jamais arriver», estimait-on même chez Barclays.

Dans ce cas, les portables pourraient entraîner dans leur chute les autres activités du groupe --décodeurs de télévision, magnétoscopes numériques, talkie-walkie etc.--, qui, eux, se portent bien.

Le chiffre d'affaires des produits d'électronique pour la maison a progressé de 1% sur l'année, à 10 milliard de dollars, celui des produits professionnels de 5%, à 8 milliards.

Ces deux activités se sont en outre offert une hausse de leurs bénéfices annuels respectivement de 29% et 23,3%, à respectivement 918 millions et 1,5 milliard de dollars.

Ne faisant qu'ajouter aux incertitudes, Motorola a annoncé le départ immédiat de son directeur financier, très impliqué dans la préparation de la scission avortée de la société.