Le constructeur automobile américain Chrysler pourrait avoir joué sa carte maîtresse en s'adossant à son concurrent italien Fiat, deux mois avant la date butoir fixée pour donner les preuves de sa viabilité à Washington, qui lui a déjà prêté 4 G$ US.

Le constructeur automobile américain Chrysler pourrait avoir joué sa carte maîtresse en s'adossant à son concurrent italien Fiat, deux mois avant la date butoir fixée pour donner les preuves de sa viabilité à Washington, qui lui a déjà prêté 4 G$ US.

«Même si Fiat n'injecte pas de capitaux, le fait qu'il (lui) accorde une danse pourrait donner à Washington juste assez de justifications pour prêter des fonds supplémentaires» dans quelques mois et permettre au constructeur de poursuivre sa restructuration, a relevé Himanshu Patel de JPMorgan Chase.

Le fonds Cerberus, propriétaire de Chrysler depuis 2007, était désespérément à la recherche d'un partenaire étranger pour appuyer le constructeur d'Auburn Mills, le plus petit et le plus fragile des trois constructeurs américains.

L'été dernier, la direction de Chrysler avait indiqué qu'elle était en pourparlers non seulement avec Fiat, mais aussi avec des constructeurs en Russie, en Chine et en Inde, tandis que l'alliance franco-japonaise Renault-Nissan avait été fréquemment évoquée ces derniers mois.

Pour Chrysler, qui réalise 95% de son chiffre d'affaires en Amérique du nord, s'appuyer sur un partenaire étranger devient une stratégie rituelle, à défaut d'avoir été toujours payante. L'Allemand Daimler a cédé en 2007 la plupart de ses parts, gardant moins de 20% du capital.

Dans les années 1960, le groupe avait lancé une stratégie d'expansion en prenant des participations majoritaires au sein des constructeurs britannique Rootes, français Simca et espagnol Barreiros, avant de revendre ces activités au français Peugeot (PSA), quelques mois avant de, déjà, frôler la faillite.

Cette-fois, l'engagement de Fiat envers Chrysler, dont il va prendre 35% du capital sans débourser un sou, est pratiquement sans frais pour les deux constructeurs, comme l'a souligné M. Patel.

L'expert David Cole, président du Centre de recherche sur l'automobile à l'Université Ann Arbor, souligne que chez Chrysler «la technologie n'est pas ce qu'elle devrait». «Il lui fallait un partenariat à long terme pour sa survie».

A moyen terme, Chrysler pourrait apposer sa marque sur des châssis Fiat, et accéder au réseau brésilien et européen du constructeur de Turin.

Pour M. Cole, Fiat accède pour sa part à un réseau de distribution nord-américain, notamment pour sa marque Alfa-Romeo, et pourra faire tourner à plein ses usines européennes dans la perspective de commercialiser ses modèles dans le réseau de Chrysler.

Dans 10 semaines au plus tard, Chrysler devra apporter la preuve de sa viabilité, aux termes d'un accord conclu avec le Trésor le mois dernier - faute de quoi, théoriquement, il faudra rembourser les contribuables.

Pour M. Patel, l'accord avec Fiat écarte désormais vraisemblablement le spectre d'une faillite dès 2009.

En revanche, selon que le marché automobile se reprendra ou non en 2010, Fiat pourrait remettre en cause son engagement.

Au cas où le marasme se prolongerait, estime M. Patel, et où les autorités fédérales refuseraient à ce stade d'injecter de nouveaux fonds, «Fiat pourrait trouver plus avantageux de laisser Chrysler (déposer son bilan), et à ce moment-là acheter certains actifs - par exemple Jeep - sans hériter le lourd réseau de distribution».

À en croire M. Patel, une opération de délestage qui pourrait porter sur les deux tiers des actifs actuels de Chrysler - «tout sauf Jeep, les minivans et peut-être la ligne Ram» - est encore tout à fait envisageable.