Plutôt que de créer le Fonds des générations pour accumuler de l'argent dans le but de rembourser la dette, le gouvernement Charest aurait été mieux de rembourser la dette directement pendant qu'il disposait de surplus.

Plutôt que de créer le Fonds des générations pour accumuler de l'argent dans le but de rembourser la dette, le gouvernement Charest aurait été mieux de rembourser la dette directement pendant qu'il disposait de surplus.

L'idée d'épargner et de faire fructifier cette épargne avant de rembourser la dette suppose en effet que le rendement obtenu sur l'argent épargné est supérieur au coût des intérêts sur la dette.

Ce n'est pas le cas, du moins depuis la création du Fonds des générations. L'argent versé au Fonds est géré par la Caisse de dépôt et placement du Québec, dont le rendement attendu sera probablement du même ordre que la température dehors, soit autour de -18%.

Le rendement du Fonds devrait être de 6,8% par année, étant donné que le taux d'intérêt moyen sur la dette tourne autour de 5%, selon les estimations du ministère des Finances, pour qu'il soit plus efficace qu'un remboursement direct de la dette.

Des deux options qu'avait le gouvernement, soit rembourser directement ou mettre de l'argent de côté pour rembourser la dette, il est clair que la première aurait été plus efficace compte tenu de ce qui se passe, reconnaît Luc Godbout, professeur à l'Université de Sherbrooke et spécialiste des finances publiques.

Mais historiquement, le rendement de la Caisse de dépôt a toujours été supérieur au coût de la dette du gouvernement, souligne-t-il. «À court terme, ça apparaît comme un mauvais move, mais à long terme ça devrait rester avantageux», a-t-il dit.

Si ce n'était pas le cas, c'est-à-dire si le rendement de la Caisse devait rester inférieur au taux d'intérêt payé sur la dette, il faudrait réévaluer l'utilité du Fonds des générations, selon lui.

Comme tout investisseur avisé, le gouvernement devrait alors rembourser ses dettes avec l'argent dont il dispose plutôt que de continuer de s'endetter pour investir dans le but de devenir plus riche.

Hier, la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, a indiqué qu'elle songe à cesser de verser de l'argent au Fonds de générations afin d'équilibrer son budget ou de réduire son déficit cette année et l'an prochain.

Si elle décide d'aller dans cette direction, une des premières conséquences sera l'augmentation de la dette par rapport à la taille de l'économie, un ratio que la création du Fonds des générations voulait justement réduire. Sur le plan comptable, l'argent placé dans le Fonds est en effet considéré comme un actif qui réduit la dette totale du Québec par rapport au produit intérieur brut (PIB).

Le gouvernement misait d'ailleurs là-dessus pour obtenir une amélioration de sa cote de crédit. Au cours de la dernière campagne électorale, la ministre Monique Jérôme-Forget avait reproché à la chef péquiste Pauline Marois de mettre en danger la cote de crédit du Québec en proposant de puiser dans le Fonds des générations pour aider à traverser la récession.

Au début de l'exercice 2008-2009, le Fonds des générations était riche de 1,2 milliard, provenant essentiellement d'Hydro-Québec. Il devait recevoir 600 millions de plus cette année et 822 millions l'an prochain.

S'il veut arrêter de verser de l'argent dans le Fonds des générations, le gouvernement devra changer la loi qui l'a créé, a précisé Luc Godbout. La loi établit en effet des objectifs précis de réduction de la dette, soit de 43% du produit intérieur brut à 38% au plus tard le 31 mars 2013.

Ces objectifs ne pourront vraisemblablement pas être atteints si le gouvernement cesse ses versements, selon le professeur Godbout.

Si la récession devait se prolonger, le gouvernement pourrait être tenté de piger carrément dans les coffres du Fonds des générations, mais Luc Godbout croit que ce serait une mauvaise idée. «Je n'en vois pas l'avantage. C'est aussi bien d'emprunter, dit-il, parce que l'intention du gouvernement de rembourser la dette resterait intacte, ce qui ne serait plus le cas s'il se met à puiser dans le Fonds à la première occasion.»

Outre les importantes contributions d'Hydro-Québec, le Fonds des générations a reçu de l'argent des producteurs privés d'électricité, comme Rio Tinto Alcan, et de la vente d'éléments d'actif du gouvernement. Il devait aussi recevoir le produit de redevances sur l'eau que le gouvernement ne s'est pas encore décidé à imposer. À partir de 2010, il devait recevoir 400 millions de plus par année provenant des exportations accrues d'électricité.