Acculée au mur, Nortel Networks (T.NT) aurait encore des chances de survivre mais sous une forme très diminuée, suggèrent des analystes après sa mise sous protection judiciaire afin d'éviter la faillite.

Acculée au mur, Nortel Networks [[|ticker sym='T.NT'|]] aurait encore des chances de survivre mais sous une forme très diminuée, suggèrent des analystes après sa mise sous protection judiciaire afin d'éviter la faillite.

Cette atrophie forcée de l'équipementier canadien des télécommunications pourrait s'avérer aussi sévère, sinon pire, que celle subie au cours des huit dernières années depuis l'éclatement de la «bulle technologique».

Depuis son sommet d'affaires et boursier en 1999, Nortel a été amputée des deux tiers de son effectif et de son chiffre d'affaires, tout en accumulant des pertes colossales en frais de restructuration.

Quant à sa valeur boursière, elle a été anéantie d'un sommet de plus de 300 milliards de dollars à quelques dizaines de millions seulement.

Mais avec cette autre phase de restructuration, sous protection judiciaire cette fois, Nortel aboutirait à une entreprise avec seulement quelques milliers d'employés et un chiffre d'affaires inférieur de plusieurs milliards à son niveau récent d'environ 11 milliards US.

«Nortel n'a pas été contrainte à l'insolvabilité en raison d'un problème particulier de gestion ou de technologies, quoique des faiblesses à cet égard ont pu nuire. En fait, Nortel est comme un bateau qui tentait de colmater des fuites et qui se retrouve soudain en plein ouragan, avec la récession et la crise financière», indique Duncan Stewart, analyste en technologies chez DSAM Consulting, à Toronto.

«Dans ce contexte, je m'attends à ce que Nortel vende ses divisions l'une après l'autre afin d'assainir son bilan et se recentrer comme une entreprise de services en télécoms, avec un chiffre d'affaires d'à peine un à deux milliards par an.»

Scénario extrême?

Pas vraiment de l'avis d'autres analystes comme Richard Windsor, spécialiste des télécoms chez la firme Nomura Securities.

Nortel a très peu de chances d'émerger «en une seule pièce» de sa procédure de protection de faillite, a-t-il indiqué à un journaliste sur le site internet du Economist.

Richard Windsor s'attend même à ce que l'un des principaux repreneurs d'actifs soldés par Nortel s'avère nulle autre que la société chinoise Huawei Technologies.

Cet équipementier des télécoms grandit rapidement sur le marché mondial à l'exception de l'Amérique du Nord, où il est freiné par les soupçons de Washington envers ses liens avec le gouvernement chinois.

Par ailleurs, Nortel est bien connue dans le secteur des télécommunications en Asie et en Chine plus particulièrement, où elle est présente depuis les premières années de l'essor économique. Nortel a aussi un important centre de recherche et développement (R&D) en Chine depuis trois ans.

Pour sa part, l'analyste Mark Sue, spécialiste des télécoms chez Marchés des capitaux RBC, estime que les principaux concurrents de Nortel sont déjà prêts à s'emparer de ses actifs et de ses parts de marché.

«Les entreprises comme Alcatel-Lucent, Cisco, Ericsson et Nokia ont toutes des programmes d'échange et de reprise d'équipements de Nortel pour leurs clients», indique-t-il dans une note à ses clients-investisseurs.

En contrepartie, à l'avantage de Nortel, des clients importants ont manifesté hier leur intention de l'appuyer durant cette autre phase cruciale de restructuration pour éviter la faillite.

Aux États-Unis, deux géants de la téléphonie sans fil, Verizon et Sprint, ont indiqué qu'ils ne «changent rien de leurs relations avec Nortel».

À elle seule, Verizon comptait pour 11% du chiffre d'affaires de 10,7 milliards US de Nortel en 2007, selon ses plus récents résultats annuels disponibles.

Au Canada, le groupe BCE, qui comprend Bell Canada et Bell Mobilité, a indiqué à l'agence Bloomberg qu'il entendait maintenir ses liens d'affaires avec Nortel. Du moins, à court terme.

Car pour la suite, le maintien de ces bons sentiments de clients pourrait s'avérer l'un de ses principaux défis de survie de Nortel.

De plus, si les doutes devaient s'amplifier envers la capacité de Nortel à soutenir et à financer ses efforts de R&D pour demeurer compétitive.

«Nortel est dans un marché qui se nourrit d'innovations technologiques. Mais en raison de ses problèmes financiers, Nortel a déjà réduit ses budgets en R&D et risque d'avoir à les réduire davantage à moyen terme», prévoit Andy Woyzbun, analyste principal chez la firme-conseil Info-Tech Research, de London en Ontario.

Avec CP et Bloomberg