Ils avaient planifié leur retraite. Ils préparent maintenant leur retour au travail. Et pas à n'importe quelles conditions. Et, surtout, pas à un salaire de 8 $ l'heure!

Ils avaient planifié leur retraite. Ils préparent maintenant leur retour au travail. Et pas à n'importe quelles conditions. Et, surtout, pas à un salaire de 8 $ l'heure!

«Tant qu'à travailler au salaire minimum, je préfère aller jouer au golf!» lance Gilles Boulerice, 66 ans, un retraité de la Société immobilière du Québec.

«Ça serait insultant surtout quand tu as été habitué à gagner 1200 $ ou 1500 $ par semaine avec le véhicule fourni et un régime d'avantages sociaux bien garni», renchérit Georges Dumais, 69 ans, qui a fait carrière dans le commerce de l'automobile avant de prendre sa retraite, il y a quatre ans.

Si les employeurs estiment devoir faire du judo pour combler les besoins de leur entreprise et satisfaire les préoccupations de conciliation vie personnelle et travail de leurs jeunes travailleurs, ils ne sont pas au bout de leurs peines avec les retraités qui reviennent sur le marché du travail. La conciliation retraite et travail, c'est important aussi...

Les deux employeurs - oui, deux - de Rachel Nadeau, 60 ans la "supplient" de travailler plus d'heures. Pas question. Elle a une retraite à vivre. Des voyages à faire.

Que pousse un retraité à reprendre la routine du travail?

«Il peut arriver qu'une personne se retrouve dans une situation difficile et qu'elle n'arrive pas à payer son épicerie à la fin de la semaine», explique Karine Roussy, directrice générale du Groupe intervention travail, un organisme qui offre un atelier préparant les retraités à un retour sur le marché de travail.

C'est l'ennui et le sentiment que leurs connaissances et leurs expertises acquises peuvent encore être mis à contribution qui finissent par convaincre les retraités qu'ils peuvent encore servir.

«Après avoir roulé sur les routes du Canada et des États-Unis en Westfalia; avoir fait le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle; avoir suivi des cours à l'université et avoir fait de l'horticulture, du bricolage et du bénévolat, il me manquait quelque chose», raconte Gilles Boulerice qui aujourd'hui, entre deux rondes de golf, fait du counseling dans des organisations auprès de jeunes ingénieurs.

«Je me vois faire ça pendant cinq ans encore.»

«Moi, je m'endors», intervient Georges Dumais qui, au moment de sa prise de retraite, estimait «fermer les livres une fois pour toutes». Il parle aujourd'hui d'une «erreur monumentale».

«Arrêter de travailler, c'est d'enlever des années à sa vie», signale M. Dumais en disant «avoir encore le goût, le matin, de peigner les trois petits cheveux qui me restent sur la tête et de porter l'un ou l'autre des 17 habits et 14 vestons qui encombrent mon garde-robe.»

Retourner au boulot pour faire quoi ?

Pas question, pour Rachel Nadeau de retourner dans le secteur de l'assurance et des services financiers. Elle veut enseigner la philosophie aux enfants. En attendant, elle est hôtesse dans un grand restaurant de Québec. "En travaillant 15 heures par semaine, ça paie mon billet d'avion", avoue cette passionnée des voyages qui sert aussi des repas, deux fois par semaine, dans une résidence pour aînés.

Travailleuse sociale dans un CLSC avant de prendre sa retraite à 57 ans, Françoise Simard (nom fictif) ne se voyait pas exercer une autre profession.

"Comme j'aime beaucoup le travail manuel et la décoration, je me suis promenée dans les boutiques pour voir si le travail dans la vente me plairait. Ce n'était pas que je recherchais. J'avais la piqûre du travail social. Je voulais encore aider les gens."

Elle va donc travailler dans un hôpital. D'abord trois jours par semaine. Puis cinq. Et dire qu'avant de prendre sa retraite, elle avait choisi de diminuer la cadence en ne travaillant que quatre jours semaine!

Depuis la fin du mois d'août, Françoise Simard est de retour à sa vie de retraitée. Pour de bon, jure-t-elle. "Je ne m'ennuie pas. J'ai tellement de choses à faire."

Si l'envie de retourner sur le marché ne lui manque pas, Georges Dumais hésite.

"Je trouve que je n'ai pas les qualifications requises pour entreprendre un travail qui m'aurait plu dans la comptabilité et l'administration des entreprises. Je ne connais absolument rien dans l'informatique et je n'ai pas le courage de retourner à l'école."

Quelques heures après la rencontre avec Le Soleil, il s'en allait passer une entrevue dans un dépanneur Couche-Tard pour un poste de gérant adjoint le samedi et le dimanche.

Bonne chance, M. Dumais...