Le développement du nouveau corridor de commerce Ontario-Québec, annoncé en grande pompe la semaine dernière par les gouvernements, ne doit pas se faire aux dépens du corridor Québec-New York, de loin le plus important pour les exportateurs québécois.

Le développement du nouveau corridor de commerce Ontario-Québec, annoncé en grande pompe la semaine dernière par les gouvernements, ne doit pas se faire aux dépens du corridor Québec-New York, de loin le plus important pour les exportateurs québécois.

C'est ce qu'a déclaré à La Presse Affaires la présidente de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ), Françoise Bertrand. La FCCQ appuie ce nouveau corridor, mais il «faut rester extrêmement vigilant sur celui de Québec-New York», a-t-elle ajouté.

La Chambre de commerce du Montréal métropolitain «ne lâchera pas le poste frontalier de Lacolle» au coeur du corridor Québec-New York, a renchéri la présidente, Isabelle Hudon.

Ces corridors ont pour mission d'accélérer les échanges commerciaux sur leur territoire et surtout d'augmenter la fluidité des systèmes de transport (aérien, maritime, routier et ferroviaire) pour les exportations et les importations.

Surprise et abasourdie

Françoise Bertrand s'est dit surprise et assez abasourdie par plusieurs aspects de la création du corridor Ontario-Québec, annoncée lundi dernier par le ministre fédéral des Transports, Lawrence Cannon.

Avec ses homologues de l'Ontario et du Québec, qui ont complètement ignoré le corridor Québec-New York dans leur présentation.

Isabelle Hudon a indiqué qu'elle va reprendre ses démarches auprès d'Ottawa et de Québec.

Après des investissements d'un milliard, lancés l'an dernier par le premier ministre canadien Stephen Harper, dans le corridor Colombie-Britannique-Asie, Lawrence Cannon compte puiser dans un budget de 2,1 milliards pour développer les corridors Ontario-Québec et de l'Atlantique.

Toutefois, a rappelé Françoise Bertrand, Ottawa n'a même pas encore complété des investissements «pourtant pas mirobolants d'environ 50 millions au poste de Lacolle» pour le corridor Québec-New York, créé en 2000.

Elle a demandé à Ottawa de finir les travaux pour 2008. Elle n'a pas obtenu d'engagement de sa part. «Ottawa est en train de compléter les plans de Lacolle», a assuré Claude Robert, président de Robert Transport et membre du comité consultatif du corridor Ontario-Québec.

À l'instigation de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, la FCCQ a cofondé le corridor Québec-New York avec la Chambre de commerce de Plattsburgh, l'ex-gouverneur de New York, George Pataki, et l'ex-premier ministre du Québec, Bernard Landry.

Le premier ministre Jean Charest a pris la suite, notamment au sommet d'octobre 2005 tenu à Albany, capitale de l'État de New York, auquel a participé George Pataki et de nombreux exportateurs et entrepreneurs des deux pays.

«Il faut toujours analyser à fond les dommages collatéraux de tels projets, a par ailleurs précisé Bernard Landry. La canalisation du Saint-Laurent devait être faite, mais elle a longtemps pénalisé le port de Montréal», a-t-il rappelé.

«Près de 70% des exportations du Québec vers les États-Unis passent par le corridor Québec-New York, a souligne Françoise Bertrand. Le corridor Ontario-Québec profitera donc beaucoup plus aux exportateurs de l'Ontario qu'à ceux du Québec», a-t-elle dit.

Françoise Bertrand croit que, par rapport au gouvernement précédent, celui de Stephen Harper montre «une oreille moins attentive aux travaux de Lacolle» et ça l'inquiète.

Elle ajoute que le marché du corridor Québec-New York vient de s'étendre jusqu'au Vermont et la FCCQ est en train d'attacher un autre accord avec le reste de la Nouvelle-Angleterre.

«Il faut dire que les échanges commerciaux du Québec avec les États-Unis ne sont pas en terrible croissance. Il faut trouver d'autres débouchés», a-t-elle dit.

Selon Claude Robert, la moitié des poids lourds de son entreprise passent par Lacolle pour se rendre aux États-Unis. Il a noté cependant que les exportations du Québec baissent beaucoup plus que celles de l'Ontario.

Après les accords de libre-échange du Canada avec l'étranger, Isabelle Hudon apprécie l'arrivée du corridor entre l'Ontario et le Québec qui facilitera les premiers pas des PME exportatrices.

«Et si les travaux ne sont pas terminés à Lacolle, ce n'est pas une raison pour ne pas faire le corridor Ontario-Québec. Le triangle d'échanges Montréal-Toronto-New York est super et les deux corridors ont autant d'importance.»