Inondés de pétrodollars, mais toujours à l'étroit dans leurs petits appartements hérités de l'ère communiste, les Russes désirent importer la «maison canadienne» dans leur pays. En très grande quantité.

Inondés de pétrodollars, mais toujours à l'étroit dans leurs petits appartements hérités de l'ère communiste, les Russes désirent importer la «maison canadienne» dans leur pays. En très grande quantité.

C'est ce qu'ont fait valoir hier des hommes d'affaires et banquiers russes pendant un colloque organisé à Montréal. La maison «à ossature en bois» les intéresse au plus haut point et ils attendent à bras ouverts les propositions des entrepreneurs d'ici.

«Nous allons rencontrer des compagnies à Toronto, et si vous connaissez des compagnies québécoises intéressées à collaborer avec des banques russes ou avec des promoteurs russes, nous serions ravis de les rencontrer!» a lancé pendant une entrevue Yuri Voskresenskiy, vice-président de la European Trust Bank (ETB), qui finance notamment des projets d'habitation.

Les besoins sont immenses. La Russie connaît un boom immobilier sans précédent et veut construire chaque année 80 millions de mètres carrés d'habitations «abordables et confortables», dans le cadre d'un ambitieux programme fédéral.

Le pays connaît toutefois une grave pénurie de briques et de ciment, ses matériaux de construction traditionnels, ce qui l'oblige à considérer d'autres options.

«C'est pourquoi on s'intéresse aux maisons à ossature en bois utilisées au Canada», a souligné Andrei Krysin, président de l'ETB.

Intérêt et méfiance

La Russie suscite un intérêt certain chez les constructeurs québécois, conscients de la croissance de ce marché. La crainte de la corruption demeure cependant bien présente et tempère l'enthousiasme.

Le fabricant Arontec, par exemple, a déjà vendu des maisons préfabriquées en Russie il y a une dizaine d'années. Les résidences se sont finalement rendues à destination et ont été assemblées avec succès, mais la route a été semée d'embûches, se rappelle le directeur général Denis Piché.

«Au niveau des transports, c'est un peu embêtant. Ca prend les bons contacts, c'est toujours un peu plus complexe qu'ailleurs», a-t-il souligné.

La société de Sainte-Agathe-des-Monts ne ferme pas la porte à exporter de nouveau en Russie. Mais elle préfère pour l'instant se concentrer sur ses marchés «prioritaires», comme la France, l'Allemagne et les États-Unis.

Le Groupe Laprise n'a quant à lui jamais exporté en Russie. Les choses pourraient bientôt changer: l'entreprise de Montmagny a été approchée par une société russe, intéressée à conclure un partenariat à long terme pour l'achat de maisons.

Laprise a effectué une vérification en règle du groupe russe et attend maintenant des nouvelles. «Il y a un très gros engouement et il y a un travail sérieux qui a été fait de leur part. On leur a demandé un plan d'affaires et ils l'ont déposé. Ça semblerait vouloir décoller», a souligné Henri Morneau, directeur à l'exportation.

La prudence doit toujours être de mise, reconnaît Sanjar Sam Farzaneh, chef d'équipe à SCHL International. La Société canadienne d'habitation et de logement mène un travail intensif pour promouvoir l'exportation du savoir-faire et des produits canadiens en Russie.

«La Russie a énormément changé au cours des dernières années, mais ça demeure un marché en développement, a expliqué M. Farzaneh. Les compagnies doivent faire leur vérification diligente, pour savoir avec qui elles s'engagent. Il y a de très bons gens d'affaires en Russie, véritablement intéressés à faire des affaires.»

Si la Russie est intéressée à acheter des maisons à ossature en bois, elle cherche aussi à importer la technologie canadienne qui lui permettrait de fabriquer elle-même de telles résidences. Le pays veut aussi importer plus d'équipement industriel canadien, a-t-on expliqué mardi.

Le secteur des services n'est pas en reste. Les firmes canadiennes d'architecture, d'ingénierie et d'urbanisme ont de grandes possibilités de croissance en Russie, a fait valoir Mietka Zieba, conseillère en développement du commerce à SCHL International.

Le secteur du prêt hypothécaire est lui aussi sous-développé en Russie. Les banquiers russes espèrent créer des partenariats et tirer profit de l'expérience des banques canadiennes dans ce domaine, ont expliqué plusieurs intervenants mardi pendant le colloque organisé par la Canada Eurasia Russia Business Association.