Après une ouverture difficile qui se soldait par des pertes de 1% à 2% pour les principaux indices boursiers, les marchés nord-américains ont clôturé en légère baisse.

Après une ouverture difficile qui se soldait par des pertes de 1% à 2% pour les principaux indices boursiers, les marchés nord-américains ont clôturé en légère baisse.

L'indice Dow Jones a perdu 31 points pour finir la séance à 13 239, et celui du Nasdaq a reculé de 11 points à 2544. Le S&P 500 a même gagné un demi-point à 1453.

La Bourse de Toronto accusait des pertes plus lourdes à mi-séance, perdant 116 points, mais le S&P/TSX n'a finalement clôturé qu'en recul de 11 points à 13 466.

La chute des indices a été abrupte en début de séance mais mieux contrôlée suite à l'injection importante de liquidités de la part des banques centrales.

Vendredi matin, la Réserve fédérale américaine a mis 19 G$ US à la disposition des marchés. Après l'ouverture, elle a rajouté 16 G$ US pour porter le total de vendredi à 35 milliards. Jeudi, elle avait misé 24 milliards.

Ne lésinant pas sur les moyens, la Fed a lancé une troisième intervention en après-midi, débloquant trois autres milliards.

En temps normal, ces opérations concernent des montants tournant plus autour de 5 à 10 G$ US par jour, selon le site Internet de la Fed de New York.

De son côté, la Banque centrale européenne a ouvert les vannes avec 61,05 milliards d'euros vendredi, ayant déjà injecté 94,8 milliards jeudi.

La Banque du Canada s'est aussi mise de la partie, rendant disponibles 1,5 G$. Jeudi, elle avait injecté 1,64 G$.

Les pertes essuyées par les Bourses depuis jeudi se produisent malgré le discours rassurant de la Fed. Ses gouverneurs ont laissé le taux directeur intact à 5,25% mardi, rappelant qu'ils s'inquiétaient davantage des l'inflation que de la crise du crédit.

Cette situation est engendrée par les pertes encourues suite à une multiplication des défauts de paiement sur des hypothèques à haut risque, surnommées subprime en anglais.

Déjà, cette crise a fait des victimes, entraînant la mise en faillite d'American Home Mortgage Investment [[|ticker sym='AMC'|]] et l'écroulement de deux fonds de couverture (pour environ 1,6 G$ US) de la banque d'investissement Bear Stearns [[|ticker sym='BSC'|]].

D'ailleurs, Warren Spector, président et co-chef de l'exploitation, a démissionné en début de semaine suite à ces événements.

Pas de panique

Pierre Lapointe, économiste et stratège à la Financière Banque, ne croit pas qu'il soit encore temps de tirer la sonnette d'alarme. «Je ne pense pas qu'il y ait de panique en ce moment. Si c'était le cas, les pertes seraient plus importantes; ce serait similaire au krach de 1987. D'après moi, ce qui se passe sur le marché, c'est un retour de l'aversion au risque.»

À son avis, les investisseurs qui prenaient beaucoup de risques depuis quelques années n'achètent plus des actions à n'importe quel prix.

«Avec tous les déboires du secteur immobilier américain, précise M. Lapointe, ils se rendent compte que les pertes peuvent être majeures. Pour acheter un titre, ils demandent un rendement plus élevé que l'an dernier. Un titre peut sembler trop cher maintenant. On voit ça aussi dans les obligations, avec des investisseurs qui exigent un taux plus élevé.»

Avec des baisses anticipées, même pour des compagnies dont la situation est prospère, les occasions d'achat se multiplieront-elles ?

«Certains secteurs reculent moins mais dans la vague, des titres deviendront des occasions d'achat, c'est certain, dit l'économiste. Tout devient une question de timing pour trouver ceux qui frappent un creux, mais c'est difficile à déterminer.»

M. Lapointe rappelle qu'en 1998, la Réserve fédérale américaine a abaissé son taux directeur trois fois pour réagir aux turbulences. «C'est cela que les investisseurs attendent maintenant. Les pertes ne sont toutefois pas les mêmes.»

Notre interlocuteur se rallie en partie au discours de la Fed, qui semble attendre des pressions économiques plus grandes avant de bouger, gardant le cap sur la lutte contre l'inflation.

Les marchés peuvent-ils encaisser le choc ?

«Pour l'instant, je crois que oui, répond Pierre Lapointe. Les problèmes pourraient durer encore quelques semaines. Nous recommandons la prudence, de sous-pondérer les actions dans les portefeuilles et de choisir des secteurs plus défensifs comme la consommation.»

Une crise amplifiée par les médias ?

Sherry Cooper, économiste en chef de BMO Marchés des capitaux, est plus tranchante. «Les médias financiers gonflent la situation et la rendent pire. Nous continuons à maintenir notre point de vue selon lequel l'économie américaine est fondamentalement forte et que la croissance de l'année prochaine sera d'environ 2,75%.»

Selon elle, «la Fed, comme toujours, demeure le prêteur de dernier recours et sa principale préoccupation est de maintenir la stabilité des marchés. C'est plus important que l'inflation ou la croissance.»

Mme Copper s'attend à ce q'une foule de facteurs comme la croissance mondiale, la confiance des consommateurs, la disponibilité des emplois et les bilans forts des compagnies contribuent à éviter une récession américaine. Surtout qu'habituellement, ce sont les hausses importantes des taux d'intérêt qui expliquent les récessions.