Nous publions la deuxième partie d'une analyse de Michel Girard sur l'industrie du film et de la télévision. Demain: de la télévision payante

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Depuis le début de l'an 2000, sur les 60 films québécois qui ont rapporté plus de 430 000 $ au box-office, c'est Alliance Vivafilm, la filiale québécoise d'Alliance Atlantis Communications, de Toronto, qui a touché le gros lot.

Sur des recettes québécoises totales de quelque 130 millions, les 29 films québécois distribués par Alliance Vivafilm ont récolté 80 millions, soit 62 % des recettes des plus populaires films québécois. Dans le carnet de Vivafilm, on retrouve les trois meneurs du Top 100 des films québécois, dont Séraphin, La grande séduction et Les invasions barbares. Vient de s'ajouter le film de l'heure, soit Bon Cop, Bad Cop.

Le deuxième gros acteur dans la distribution de films québécois est la société montréalaise Christal Film: ses 18 films québécois ont accumulé des recettes d'environ 30 millions de dollars au box-office. On lui doit les succès remportés par Les Boys, Elvis Gratton, Nez rouge.

Suivent ensuite TVA Films (de Quebecor Média) avec des recettes approchant les 11 millions pour quatre films québécois dont C.R.A.Z.Y et Dans une galaxie près de chez vous; Équinoxe également avec quatre films (5,4 millions) dont Mambo Italiano et Un dimanche à Kigali. Films Séville a deux films pour des entrées de 2,8 millions, et trois autres boîtes ferment la marche avec un film chacune.

Mais, qui a profité financièrement de la popularité des films québécois?

Ce sont les propriétaires de salles de cinéma qui ont mis la main sur la plus importante tranche, avec 43,4 % des recettes brutes de 130 millions.

Au deuxième rang, on retrouve les distributeurs avec 35,9 % des sommes collectés au box-office. Leurs recettes de 51,4 millions comprennent une commission de distribution, le remboursement des dépenses de lancement des films et la récupération de la somme minimum qu'ils investissent initialement dans le budget de production des films pour y acquérir les droits de distribution.

Notons que les gouvernements de Québec et d'Ottawa ont récolté pour leur part 17 millions grâce aux taxes de vente perçues aux guichets des cinémas.

Les bailleurs de fonds publics (Téléfilm, SODEC) et les producteurs des 60 films les plus populaires du Québec n'ont vraiment pas encaissé de gros revenus, avec à peine 4 % des recettes totales.

Avant que ces derniers puissent récolter un cent, explique Patrick Roy, vice-président principal d'Alliance Vivafilm, le distributeur récupère les revenus de base auxquels il a droit, voire sa commission de distributeur, le remboursement de toutes ses dépenses et la récupération de son investissement initial dans le film.

C'est d'ailleurs ce qui explique pourquoi un film aussi populaire que Bon cop, Bad cop n'a pas encore atteint, malgré ses 10,5 millions au box-office canadien, le seuil de recettes qui permettra à son producteur Kevin Tierney de commencer à encaisser des revenus supplémentaires. Même chose pour les organismes gouvernementaux qui ont fourni du financement. La production du film mettant en vedette Patrick Huard et Colm Feore a coûté 8,2 millions, financé par Téléfilm à hauteur de 4 millions, et par la SODEC pour 700 000 $. Le film a bénéficié d'une vaste campagne de promotion évaluée à 2,5 millions de dollars.

Au rythme où Bon cop, Bad cop attire les spectateurs, Patrick Roy de Vivafilm croit que le film québécois a de fortes chances de battre le record canadien de tous les temps détenu par Porky. Et bien sûr le record québécois de Séraphin ne tient plus qu'à un fil.

Fait à noter: à l'instar des films vedettes tels Séraphin, La grande séduction, Les invasions barbares, Les boys, C.R.A.Z.Y.... le film d'Érik Canuel va, durant ses multiples vies, rapporter en retombées fiscales pour Québec et d'Ottawa beaucoup plus d'argent que les sommes investies par Téléfilm et la SODEC.

Non seulement encaisseront-ils des taxes de vente sur les recettes du film au box-office, sur les ventes de DVD, sur la location du film dans les vidéoclubs, sur la vente du film aux télédiffuseurs, aux chaînes spécialisées et payantes, mais en plus ils récolteront des impôts directs et indirects sur les dépenses de production du film, sur les recettes générées en salles et dans les autres canaux de distribution.

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