La forte inflation de l'électricité aux États-Unis, qui provient de centrales au gaz naturel plus coûteux, pourrait valoir d'importants revenus d'exportation pour le Québec, selon la Banque CIBC.

La forte inflation de l'électricité aux États-Unis, qui provient de centrales au gaz naturel plus coûteux, pourrait valoir d'importants revenus d'exportation pour le Québec, selon la Banque CIBC.

Au moins 300 millions de dollars additionnels seraient à portée de main d'Hydro-Québec au cours des deux seules prochaines années, anticipent les économistes de la CIBC dans une analyse du marché de l'énergie publiée hier.

Un tel apport, s'il s'avère, gonflerait bien au-delà du milliard de dollars les revenus annuels d'exportation d'électricité du Québec vers les États américains voisins.

«Le prix moyen de l'électricité aux États-Unis a grimpé de 20% depuis trois ans en raison de la forte hausse du prix du gaz naturel, d'où provient maintenant le cinquième de cette électricité. Et tout indique que cette inflation du gaz naturel va continuer de plus belle, entraînant encore avec elle le prix de l'électricité», a expliqué Krishen Rangasamy, économiste à la CIBC, en entrevue avec La Presse Affaires.

Dans l'analyse dont il est coauteur, on lit que «la montée des prix de l'électricité au sud de la frontière est clairement très avantageuse pour les provinces canadiennes qui fournissent de l'électricité aux États-Unis. Et de ces provinces, la plus grande gagnante, de loin, est le Québec qui exporte déjà pour un milliard de dollars par an d'électricité».

Selon le relevé de la CIBC, trois autres provinces sont des exportatrices d'électricité au sud de la frontière, mais loin derrière le Québec.

Et parmi ces trois autres provinces, seulement le Manitoba et la Colombie-Britannique ont, comme le Québec, une production d'électricité provenant très largement de centrales hydrauliques.

L'autre province exportatrice, l'Ontario, obtient son électricité de centrales nucléaires coûteuses, de centrales au charbon et, de plus en plus, de centrales au gaz naturel.

Donc, des sources à carburants plus coûteux et beaucoup moins concurrentielles sur le marché d'exportation aux États-Unis.

«En comparaison, les centrales hydroélectriques, très importantes au Québec, n'ont pas de frais de carburant dans leur coût de production», a souligné M. Rangasamy.

«De plus, elles produisent une électricité propre pour laquelle des clients américains seront de plus intéressés, pour leur objectif d'énergie de sources renouvelables et moins polluantes. L'hydro-électricité est aussi beaucoup moins chère et plus fiable que celle d'origine éolienne ou solaire.»

Du côté d'Hydro-Québec, on a accueilli l'analyse de la CIBC avec une certaine réserve.

«Il y a tellement de volatilité dans le marché du gaz naturel que toute prévision de prix et de revenus est très spéculative», selon Marc-Brian Chamberland, porte-parole d'Hydro.

N'empêche, a-t-il souligné, «c'est la volonté ferme de l'entreprise d'accroître ses exportations, au meilleur prix possible selon la situation du marché et de notre capacité technique d'acheminer de l'électricité.»

Chose certaine, les exportations d'électricité durant la saison estivale de plus forte demande aux États-Unis et en Ontario sont déjà très rentables pour Hydro.

Le revenu moyen par kilowattheure sur le marché à demande (spot) peut être de trois à quatre fois plus élevé que celui obtenu par Hydro-Québec auprès de sa clientèle québécoise, avant les frais de transport et de distribution.

Par ailleurs, selon les économistes de la CIBC, le Québec a un atout géographique pour profiter davantage du marché d'exportation d'électricité aux États-Unis

«Les États voisins du Québec en Nouvelle-Angleterre sont devenus les plus dépendants du gaz naturel pour produire leur électricité», a souligné Krishen Rangasamy.

«Avec les nombreux ajouts ces dernières années, les centrales au gaz fournissent maintenant 20% de toute l'électricité américaine, mais ce pourcentage est un peu plus élevé en Nouvelle-Angleterre, d'où sa plus grande vulnérabilité à l'inflation du gaz naturel.»

Mais la hausse des prix du gaz ira jusqu'où?

Les économistes de la CIBC envisagent un prix moyen d'environ 15$US par million/BTU dans un an. S'il s'avère, pareil prix serait supérieur de 60% à son niveau récent de 9$US par million/BTU, et plus du double de celui de l'an dernier.

«À court terme, la stagnation des approvisionnements de gaz malgré la croissance de la demande maintient la pression sur les prix. À moyen terme, les impacts du réchauffement climatique sont aussi très favorables à ce marché», lit-on dans le rapport de la CIBC.

«La hausse des températures augmentent la demande d'électricité (climatisation) qui provient de plus en plus de centrales au gaz. Aussi, les usines de production d'éthanol-carburant, en pleine expansion, consomment beaucoup de gaz naturel.»