Rarement a-t-on vu un plan d'affaires aussi ambitieux.

Rarement a-t-on vu un plan d'affaires aussi ambitieux.

Au cours des deux prochaines années, Prestige Télécom [[|ticker sym='V.PR'|]] veut multiplier ses revenus par cinq, à 200 millions de dollars.

Et elle espère lever jusqu'à 100 millions pour financer ses acquisitions.

«On est extrêmement agressif, soutient son chef de la direction Pierre-Yves Méthot. C'est maintenant que ça se passe et on veut en profiter.»

En effet, l'entreprise spécialisée dans les services d'ingénierie et d'installation de réseaux de télécommunications sans fil ou câblés arrive à un important carrefour.

Plusieurs occasions s'offrent à elle.

Tout d'abord, les enchères de licences pour la téléphonie sans fil sont sur le point d'ouvrir la porte à de nouveaux acteurs. Les résultats seront connus à la fin mai.

«Ça va prendre quelqu'un pour concevoir et bâtir leurs réseaux, dit M. Méthot. Et pour installer leurs équipements.»

Selon lui, cela se traduira par des milliards de dollars en investissements dans les années à venir.

L'achat de Bell par Teachers' offre aussi des possibilités.

«Ce serait surprenant que la caisse de retraite n'ait pas un souci de rationalisation et d'optimisation, dit le dirigeant. Cette transaction amènera certainement de la sous-traitance.»

Autre point en faveur de la sous-traitance, ajoute-t-il: l'âge moyen est de 25 ans de service dans les grandes sociétés de télécom.

«En raison de la forte concurrence, elles doivent se concentrer sur leurs activités principales, constate M. Méthot. Elles ont fait moins d'embauches dans les services connexes (installation, etc.).»

Cela dit, Prestige Télécom mise aussi sur la hausse des dépenses en immobilisation dans l'industrie des communications.

On prévoit qu'elles s'élèveront à 8,5 milliards cette année au Canada. «Cet argent sera investi pour maintenir et développer les réseaux actuels», précise celui qui est aussi président du conseil.

Acquisitions et croissance interne

Pour «profiter de la manne», Prestige Télécom souhaite devenir la plus grande entreprise de son secteur au pays.

Elle est déjà la seule société, parmi ses pairs, à être cotée en Bourse. Elle est aussi la seule à être active partout au pays.

«Il n'y a pas d'acteur dominant dans notre industrie, dit Pierre-Yves Méthot. On a décidé de devenir le numéro 1.»

Pour ce faire, la société montréalaise s'est inscrite à la Bourse de croissance TSX, en juillet dernier. Depuis, son titre évolue autour de son prix d'émission, à 50 cents l'action. Mais ce véhicule boursier lui a permis de faire un placement privé de 5,7 millions en mars dernier.

Depuis son arrivée sur le parquet, la société a acheté deux entreprises: Keen Communications, de Colombie-Britannique, et Plantec, de l'Ontario.

Ces sociétés spécialisées dans l'ingénierie des réseaux extérieurs affichent des revenus d'environ 8 millions.

Mais Prestige a l'intention de grandir davantage. «Ce n'est pas avec 400 employés qu'on pourra répondre à la demande qui s'en vient», souligne le dirigeant.

Pour accélérer la cadence, il est conscient qu'il devra aller chercher du financement. «Pour réaliser des acquisitions et réussir notre positionnement on peut avoir besoin de jusqu'à 100 millions», calcule-t-il.

La société est déjà en discussions «intensives» avec quatre entreprises canadiennes. Puisque le marché est morcelé, les occasions d'achat sont grandes.

«Il y a beaucoup de gens qui veulent participer à notre démarche d'être l'acteur dominant au Canada», dit M. Méthot.

À retenir

«Ça fait 28 ans qu'on fait ça. La croissance a connu des hauts et des bas. À la fin des années 1990 il y a eu la bulle. Après il y a eu une décroissance. Là, il y a une nouvelle réalité. Le marché est nettoyé. Les gens doivent revenir en paix avec les télécoms.»

«Parmi nos investisseurs on a le Fier de Montréal. On y trouve des associés comme Bob Brown de CAE, Robert Milton d'Air Canada et Charam Boulouri, ancien président des opérations mondiales de Nortel. Ce sont eux qui m'ont présenté Brian MacFaden, le président de Prestige. En plus, ils nous aidé à entrer en Bourse. Ils voyaient le potentiel de croissance.»

«Au Canada, on a le plus bas taux de pénétration du cellulaire et le plus haut tarif à la minute des pays industrialisés. Il y a 19 millions d'abonnés et on devrait passer à 29 millions d'ici à 2012, quand les prix vont baisser. C'est pour ça que le fédéral a donné une partie des licences à de nouveaux acteurs pour qu'il y ait plus de concurrence.»

«Les intégrations d'entreprises sont toujours un défi. On n'essaie pas de les minimiser. On travaille avec des groupes importants, comme Secor, pour éviter les erreurs. On devrait faire une couple de 100 millions quand on aura atteint notre maturité.»

«Les analystes ne prévoient pas de profits pour 2008. Quand tu fais des intégrations, il y a un coût pour se positionner. Mais on pense quand même être profitable. On pourrait faire 60 millions de revenus provenant de la croissance interne et 100 millions en acquisitions.»

«L'argent pour payer les acquisitions viendra d'un mélange de débentures, d'actions et d'émissions publiques. Ce type de montage financier est le plus sain pour l'entreprise. Avec certaines acquisitions clés, on aura la masse critique pour aller sur la grande Bourse de Toronto, probablement en 2009.»

«Une fois qu'on aura atteint une couple de 100 millions de revenus, il va arriver deux choses. On va servir aux Américains tous les clients canadiens sur un plateau d'argent. Donc, il y a des chances qu'une compagnie milliardaire américaine cogne à notre porte pour nous acheter. Ou bien on dira: on n'arrête pas là et on traverse l'autre côté de la frontière pour développer nos activités américaines.»

L'ENTREPRISE

Fondée il y a 28 ans, Prestige Télécom offre des services d'ingénierie et d'installations de réseaux de télécommunications sans fil ou câblés. Ses clients sont des compagnies de téléphone (BCE, Telus, etc.) et des équipementiers (Nortel, Lucent, etc.)

La société montréalaise emploie 400 personnes et réalise des revenus de 40 millions (taux annualisé). Ses bureaux sont situés à Montréal, Toronto, Calgary, Edmonton, Vancouver et Dallas. Elle est inscrite à la Bourse de croissance TSX depuis 10 mois sous le symbole PR.

DÉFIS

Agir rapidement pour profiter des occasions découlant de l'octroi des nouvelles licences, de la transaction de BCE, des contrats de sous-traitance et de la hausse des dépenses en capital.

STRATÉGIES

Augmenter les ventes internes, faire des acquisitions, lever du capital et consolider le marché des sous-traitants en télécom.