Le président de la Réserve fédérale des États-Unis, Ben Bernanke, a pour la première fois évoqué en filigrane le risque d'une récession aux États-Unis et justifié le sauvetage de la banque Bear Stearns par les dégâts «graves» qu'une faillite aurait infligés à l'ensemble de l'économie.

Le président de la Réserve fédérale des États-Unis, Ben Bernanke, a pour la première fois évoqué en filigrane le risque d'une récession aux États-Unis et justifié le sauvetage de la banque Bear Stearns par les dégâts «graves» qu'une faillite aurait infligés à l'ensemble de l'économie.

«Le produit intérieur brut (PIB) ne va pas croître beaucoup, s'il croît au cours du premier semestre de 2008, et il pourrait même se contracter légèrement», a affirmé M. Bernanke mercredi lors d'un discours au Congrès.

L'une des définitions de la récession est d'enregistrer deux trimestres consécutifs de baisse du PIB.

M. Bernanke a souligné que les prévisions à court terme s'étaient affaiblies par rapport à ce qu'elles étaient à la fin de janvier. La Fed tablait alors sur une croissance de 1,3% à 2% cette année.

Il a prédit une nouvelle contraction de la construction résidentielle et une «certaine hausse» du chômage dans les mois à venir.

«Il est clair que l'économie américaine traverse une période très difficile», a-t-il ajouté.

M. Bernanke s'est toutefois dit plus optimiste pour l'avenir.

«L'activité économique devrait se renforcer au second semestre, notamment du fait des politiques monétaires et budgétaire», a-t-il affirmé, en allusion au vaste plan de relance de 168 G$ US du gouvernement et aux baisses de taux de la banque centrale, qui a ramené son taux directeur à 2,25% (contre 5,25% à l'été).

En 2009, «la croissance devrait s'établir autour de son rythme de croisière, ou un peu au dessus», soutenue par la stabilisation de l'immobilier «quoique à un niveau faible» et l'amélioration graduelle des conditions financières, selon lui.

M. Bernanke a toutefois souligné qu'en raison des turbulences récentes sur les marchés financiers, ces prévisions étaient entourées d'incertitudes «élevées» et qu'elles risquaient de s'avérer trop optimistes.

L'inflation de son côté devrait «se modérer» dans les mois à venir, a-t-il estimé, tout en soulignant la nécessité pour la banque centrale de rester vigilante sur ce front.

M. Bernanke est par ailleurs longuement revenu sur l'intervention controversée de la Fed en faveur de la banque d'affaires privée Bear Stearns, qu'elle avait sauvée de la faillite en organisant son rachat par sa consoeur JPMorgan à la mi-mars.

Cette affaire «soulevait des questions délicates en matière de politique publique», a-t-il reconnu.

En effet «normalement, le marché décide quelles entreprises survivent et quelles autres échouent», mais «les problèmes posés dans ce cas allaient bien au-delà du sort d'une entreprise», a-t-il ajouté.

Certains ont vu dans l'intervention de la Fed un renforcement de l'«aléa moral», qui fait croire aux investisseurs qu'il y aura toujours quelqu'un pour les sauver de leurs mauvaises décisions.

Mais dans un contexte de conditions financières fragiles, une faillite soudaine de Bear Stearns aurait sans doute mené à un repli «chaotique» des positions sur ces marchés et un ébranlement «grave» de la confiance, a dit M. Bernanke.

Les dégâts «auraient pu être graves et extrêmement difficiles à contenir», et une faillite n'aurait pas pesé seulement sur le système financier «mais aurait été ressentie largement dans l'économie», selon lui.

«Pour empêcher une faillite désordonnée de Bear Stearns et les conséquences imprévisibles mais sans doute sévères d'une telle faillite pour le fonctionnement des marchés et l'ensemble de l'économie, la Fed, en consultation étroite avec le Trésor, a décidé de prêter de l'argent à Bear Stearns par le biais de JPMorgan Chase», a-t-il expliqué.