C'est finalement lundi que Vincent Lacroix saura si le juge Claude Leblond accepte ou non sa requête afin de rouvrir son procès.

C'est finalement lundi que Vincent Lacroix saura si le juge Claude Leblond accepte ou non sa requête afin de rouvrir son procès.

Si le juge de la Cour du Québec accepte cette requête, cela permettra à l'ex-PDG de Norbourg d'argumenter pour la détermination de la preuve.

Il s'agirait d'une victoire pour Vincent Lacroix qui a ni plus ni moins lancé une offensive contre la loi québécoise qui couvre le secteur des valeurs mobilières, jeudi matin, au palais de justice de Montréal.

Tentant de présenter une requête devant le juge Claude Leblond, le PDG déchu de Norbourg questionne la constitutionnalité de la loi québécoise, affirmant qu'elle empiète sur le droit criminel.

Le problème qu'il a tenté de démontrer dans des échanges sinueux avec le juge est celui de la consécutivité d'une peine en droit pénal.

La loi, réformée en 2002, permet d'imposer des peines de 5 ans moins un jour pour des infractions en matière de valeurs mobilières. Un article du texte légal prévoit que dans le cas où les chefs d'accusation se multiplient, les peines peuvent être consécutives.

Or, c'est le noeud de l'affaire. Vincent Lacroix a été déclaré coupable en décembre de 51 chefs d'accusation pour avoir manipulé la valeur de l'épargne des investisseurs et pour avoir produit de faux documents.

De son côté, l'Autorité des marchés financiers a demandé une peine de prison qui équivaut à 15 ans derrière les barreaux.

Vincent Lacroix allègue que c'est un empiètement du droit pénal sur le droit criminel, sans procès devant juge et jury et sans les règles qui s'y appliquent.

Il estime que le gouvernement du Québec a outrepassé ses pouvoirs constitutionnels avec la réforme de la loi et que «par la voie d'une procédure réglementaire, on cherche un résultat de nature criminelle».

Le juge Leblond a enchaîné les questions pour comprendre le point de vue de M. Lacroix, qui avait de la difficulté à s'exprimer clairement. En début de séance, cet ancien avocat de la défense avait l'impression que les arguments de l'ancien PDG portaient nécessairement sur la réouverture du procès ou des procédures d'appel.

Tristan Desjardins, qui oeuvre pour le cabinet d'avocats Hébert Downs et représente l'AMF, a argumenté que la requête de Vincent Lacroix était «dilatoire», visant à étirer les procédures afin de ne pas recevoir une sentence lundi prochain.

Le juge Leblond est toutefois revenu à la charge, demandant au procureur de lui exposer pourquoi il devrait conclure qu'une peine dépassant largement la durée de cinq ans n'empièterait pas sur le droit criminel.

«Le jugement de culpabilité ne serait pas questionné [...] par une requête malhabile en l'absence d'un avocat, M. Lacroix dit que le législateur permet l'imposition de peines de nature criminelle» au pénal, a lancé Claude Leblond.

Me Desjardins a livré une réponse documentée en après-midi, se référant directement au droit constitutionnel. Les articles de loi cités précisent qu'il n'y a pas de limite à une peine imposée à partir d'une loi provinciale, tant que celle-ci respect les champs de compétence.

Le juriste a ajouté que les nombreux chefs d'accusation pour lesquels M. Lacroix a été déclaré coupable et une interprétation de la loi menant à une peine sévère n'ont rien d'inconstitutionnels et qu'ils ne changent rien au but recherché par la loi.

C'est sur cet argument que l'audience s'est terminée au milieu de l'après-midi, le juge s'engageant à faire part de sa décision lundi.

Un départ difficile

Avant de trouver son sens, le débat s'est amorcé difficilement vers 9h30.

Vincent Lacroix a dit avoir compris l'enjeu de l'affaire de façon tardive. En premier lieu, les représentations sur sentence de l'AMF portaient sur une peine allant jusqu'à 15 ans, ce qui lui aurait mis la puce à l'oreille. Et en janvier, il a consulté un avocat qui lui a suggéré de remettre en question la constitutionnalité des procédures.

Le juge Leblond lui a pourtant rétorqué que sans avocat, il avait l'obligation de faire preuve de diligence et de soulever la question avant même le début du procès. «Vous avez accepté qu'un procès de 50 jours ait lieu. C'était votre choix.»

Et que si des consultations ne l'ont pas mené à déposer une requête plus tôt, «vous n'avez pas consulté le bon avocat».

Même les interventions de Me Desjardins n'ont pas toujours été les mieux accueillies par le juge. Il plaidait qu'une fois un jugement rendu, la cour perdait la compétence pour reconsidérer l'affaire. Le juge Leblond a lâché «vous allez à l'encontre de toute la jurisprudence canadienne».