La fièvre du gaz naturel gagne le Québec.

La fièvre du gaz naturel gagne le Québec.

Des résultats préliminaires annoncés comme des découvertes « significatives » dans la plaine du Saint-Laurent ont provoqué hier un feu d'artifice en Bourse qui s'est fait sentir jusqu'à Oslo.

Les actions de deux petites juniors québécoises, Gastem et Junex, sont parties en flèche à la Bourse de Toronto.

La première a bondi de 123 % pour se hisser à 2,50 $, tandis que Junex gagnait 58 % pour clôturer à 1,36 $, un gain qui s'ajoute au 32 % gagné la veille.

La folie a été un peu plus contenue à New York, où l'américaine Forest Oil Corporation, active au Québec, a gagné 2,08 $ US, ou 3,96 %.

L'albertaine Questerre Energy a aussi annoncé ses intérêts dans l'exploration de gaz au Québec et a été portée par la vague.

Son titre a gagné 37,8 % à Toronto pour atteindre 1,13 $, et a bondi de 96 % à Oslo où il s'échange aussi.

L'étincelle est venue de Denver, au Colorado, siège social de Forest Oil Corporation.

L'entreprise croit être assise sur des réserves potentielles de 4,1 trillions de pieds cubes de gaz naturel près de Bécancour et dans les régions de Yamaska et Contrecoeur.

Des chiffres qui en ont incité plusieurs à sortir leur calculatrice.

Avec le gaz naturel qui se vend actuellement autour de 10 $ pour 1000 pieds cubes, ces réserves pourraient valoir plus de 40 milliards US.

Les résultats dévoilés hier demeurent toutefois préliminaires.

Il faudra plusieurs forages additionnels et une étude de faisabilité pour voir si du gaz naturel sera un jour exploité dans les plaines du Saint-Laurent.

« On est encore au stade d'exploration », avertit d'ailleurs Vincent Paquet, analyste chez ING Investment Management, qui croit toutefois que c'est du sérieux.

« La façon dont c'est parti, il va y avoir de l'exploitation. Ça peut devenir assez gros, assez longtemps », croit-il.

Jean Beaulieu, professeur au département de génie géologique à l'École polytechnique de Montréal, est quant à lui formel : il y a bel et bien du gaz naturel sous le sol entre Montréal et Québec.

« Juste à casser la roche avec un marteau, ça sent le pétrole. On sait que c'est riche », dit-il.

Le problème est de l'extraire.

La formation qui suscite l'intérêt s'appelle le « shale de l'Utica ».

Un shale est un genre d'éponge gorgée de gaz, mais dont l'exploitation est complexe.

La situation rappelle les sables bitumineux, dont le pétrole est plus difficile à extraire que dans les puits conventionnels.

Sauf que la technologie se développe.

En injectant de l'eau mêlée à du sable dans la roche, on parvient aujourd'hui à extraire le gaz naturel des shales.

Celui de Barnett, au Texas, se place par exemple au deuxième rang des plus gros producteurs de gaz naturel des États-Unis.

La société qui mène le bal au Québec, Forest Oil Corporation, est d'ailleurs active à Barnett.

Elle a signé des ententes avec Junex et Gastem, des sociétés de prospection québécoises qui avaient acquis plusieurs centaines de milliers d'acres dans les régions intéressantes.

« Ce qu'on a voulu faire, c'est d'acquérir énormément de terrain, puis s'associer avec une société majeure qui a beaucoup de capital », explique Dave Pépin, responsable des affaires corporatives.

Forest Oil Corporation entend creuser trois nouveaux puits à partir du mois de juin.

Dans l'éventualité de résultats positifs, l'exploitation pourrait démarrer dès l'an prochain, pour prendre toute son ampleur en 2010.

D'ici là, les juniors québécoises profitent de leur soudaine popularité.

« On a beaucoup d'amis aujourd'hui », admet Marc André Lavoie, de Gastem.

Selon des analystes d'UBS Investment Research cités par le Daily Oil Bulletin, l'engouement pourrait aussi gagner l'albertaine Talisman Energy.

L'entreprise possède 800 000 acres dans le shale de l'Utica, mais s'est toujours montrée réfractaire à exploiter du gaz naturel « non conventionnel ».

Les analystes font le pari que les récents chiffres lui feront changer d'avis.