Les six dernières années de croissance mondiale effrénée ont porté un dur coup à la saine gestion des ressources naturelles.

Les six dernières années de croissance mondiale effrénée ont porté un dur coup à la saine gestion des ressources naturelles.

«Il y a un problème de rareté, de pressions sur les ressources, constate dans un excellent français Angel Gurría, secrétaire général de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Il nous faut une politique délibérée de gestion des ressources qui s'épuisent et qui sont mal distribuées.»

Joint au siège social de l'OCDE à Paris, M. Gurría fera part des grands axes de la réflexion qu'il poursuit depuis plusieurs années sur le sujet, au cours d'une allocution prononcée dans le cadre du 14e Forum économique international des Amériques qui se déroule la semaine prochaine à Montréal.

Cet économiste de formation, qui a occupé des hautes fonctions politiques dans son pays d'origine, le Mexique, ne fait pas partie pour autant des disciples de Malthus. (Cet économiste britannique préconisait un contrôle strict de la démographie et du développement, par crainte que la Terre ne puisse nourrir toute sa population.)

Il se réclame plutôt du développement durable et du libre-échange. Il se dit résolument en faveur du maintien de l'Accord de libre-échange nord-américain qui unit Canada, Mexique et États-Unis dans un vaste bassin d'échanges commerciaux. Il souhaite aussi un dénouement positif de la ronde de Doha de l'Organisation mondiale du commerce qui bat de l'aile depuis deux ans.

Même si ses hautes fonctions l'ont conduit à vivre outre-Atlantique, M. Gurría suit de près la vie politique nord-américaine. Il est bien au courant des propos sur l'ALENA tenus durant le marathon de l'investiture démocrate. Il ne paraît pas inquiété pour autant.

«Il se dit beaucoup de choses dans une campagne pour tenir compte des inquiétudes locales en matière de délocalisation ou d'outsourcing (impartition). Ce n'est pas nécessairement le miroir de la réalité.»

Il va plus loin: «Les structures de l'ALENA favorisent tous ses pays participants. Même les États-Unis y trouvent des avantages commerciaux et systémiques puisque l'Accord est un gage de la stabilité économique de ses voisins.»

Présentement, la croissance de l'économie américaine repose sur son commerce extérieur que stimule l'ALENA. «Il faut rester sobre sur cette question et faire la promotion du libre-échange et non de ses obstacles.»

Libre-échange ou pas, l'économie mondiale a ralenti devant la conjugaison de la flambée des produits de base, de l'essoufflement du consommateur américain et de la cherté accrue du crédit.

Plus tôt cette semaine, l'OCDE a donc revu à la baisse, comme bien d'autres, son scénario économique.

Le principal élément de révision porte sur la durée du ralentissement américain. Il s'étendra jusqu'en 2009, prévoit désormais l'organisme. Voilà pourquoi sa prévision sur le Canada a aussi été diminuée. L'expansion sera limitée à 1,2% cette année et à 2,0% l'an prochain, soit bien en deçà du potentiel de l'économie.

C'est ce qui a incité l'OCDE à suggérer que la Banque du Canada poursuive la détente monétaire amorcée en décembre. On verra mardi dans quelle mesure l'organisme aura été entendu.

«En 2010, la croissance des États-Unis devrait être revenue à son potentiel (aux environs de 3,0%), croit M. Gurría. L'économie aura alors digéré la crise du logement qui découle des prêts hypothécaires subprimes (à risque).»

Il ne sera pas le seul à disserter sur les grands déséquilibres mondiaux la semaine prochaine. Beaucoup d'autres grosses pointures prendront la parole au Forum, connu aussi comme la Conférence de Montréal.

L'aréopage inclut Michelle Bachelet, présidente du Chili, Dominique Strauss-Kahn, directeur général du Fonds monétaire international, Jose Miguel Insulza, secrétaire général de l'Organisation des États américains, Taïb Chérif, secrétaire de l'Organisation de l'aviation civile internationale et Gérard Mestrallet, PDG de Suez.

Le thème de cette année Comment maîtriser le changement? permettra d'aborder les crises financière et alimentaire, le développement durable, les biocarburants et la récession américaine.

«On va parler des grands défis de l'agenda mondial. Les changements climatiques, le prix des denrées et de l'eau, poursuit M. Gurría. Ma grande ambition, ce serait de pouvoir m'asseoir et d'écouter tous ces gens.»