Quelque 230 milliards de dollars!

Quelque 230 milliards de dollars!

C'est la valeur des entreprises ayant leur siège social au Québec qui participent au marché boursier canadien (inscrites à la Bourse de Toronto ou la Bourse TSX Croissance.)

Montant impressionnant à première vue.

En comparaison, ça équivaut à plus des deux tiers du PIB de l'économie du Québec, rendu à 300 milliards en valeur nominale.

Ou encore, c'est l'équivalent de l'actif total des déposants à la Caisse de dépôt et placement, le bas de laine collectif des Québécois.

N'empêche, cette valeur boursière du tout «Québec inc.» a pris un peu de plomb dans l'aile depuis quelques mois. Et ce n'est pas vraiment en raison d'une mauvaise performance sur le marché.

En fait, des fonds d'actions québécoises se démarquent plutôt bien parmi leurs comparables, obtenant même des étoiles «Morningstar» et des prix «Lipper», très prisés par les fonds d'investissement.

Plutôt, l'atrophie de la valeur boursière de Québec inc. est surtout la conséquence de la récente vague de fusions et acquisitions d'entreprises.

À elle seule, l'acquisition d'Alcan par le géant minier et métallurgique Rio Tinto, dirigé de Londres, a retranché 36 milliards en valeur boursière, l'automne dernier.

Et le prochain géant montréalais en liste, BCE/Bell Canada, abaissera cette valeur de 30 milliards supplémentaires au moment de son acquisition par la caisse de retraite Teachers, de Toronto.

Pour les investisseurs en actions d'entreprises d'origine québécoise, ces transactions se sont avérées des médailles pour le rendement à court terme. Mais avec un revers moins reluisant à moyen terme.

«Les offres d'achat pour Alcan et BCE ont contribué beaucoup à rehausser le rendement de notre fonds québécois en 2007. En contrepartie, le retrait de deux titres aussi importants nous pousse davantage vers des actions de capitalisation moyenne, avec ce que ça implique comme suivi additionnel», commente Jean-Philippe Choquette, gestionnaire du fonds «Desjardins Équilibré Québec» chez la firme Fiera Capital, à Montréal.

Cela dit, il s'attend à une plus grande diversification de ce fonds rendu à 237 millions en actif, mais à moyen terme.

«C'est pas mauvais comme tel. Même qu'au contraire, ça pourrait nous distinguer davantage des fonds d'actions canadiennes, qui demeurent très influencés par la poussée des prix des ressources et du pétrole», souligne M. Choquette.

À court terme cependant, avec les tumultes qui perdurent en Bourse, Jean-Philippe Choquette préfère attendre avant de rehausser la pondération en actions de son fonds. «Nous sommes au minimum de 52%, au lieu de 60% et plus auparavant.»

Entre-temps, l'influence moindre des ressources et du pétrole sur la valeur boursière de Québec inc. nuit aussi à son image par rapport à l'ensemble de la Bourse canadienne.

Depuis le début de 2008, les indices et les fonds de titres québécois ont perdu en moyenne 7% de leur valeur, ce qui se compare à plusieurs indices boursiers du monde industrialisé, ramenés en dollars canadiens.

Mais à la Bourse de Toronto, l'indice S&P/TSX fait encore bande à part avec un gain de 2%, dopé par les actions de entreprises du secteur des ressources et du secteur pétrolier.

«Avec l'achat d'Alcan et son retrait de la Bourse, nous avons perdu le titre québécois qui était de loin le plus représentatif du secteur des ressources, en particulier les métaux», constate Christine Décarie, gestionnaire du fonds «Québec Entreprises» d'environ 240 millions chez Investors, une filiale de la Financière Power.

«Pourtant, l'exploitation des ressources, le secteur minier en particulier, demeure très important dans l'économie du Québec. Mais toutes les grandes entreprises de ce secteur sont désormais étrangères, hors de la Bourse canadienne.»

Selon Mme Décarie, cette lacune boursière pour Québec inc. aurait largement contribué à «un premier trimestre difficile» pour les fonds d'actions québécoises cette année.

En contrepartie, dit-elle, des secteurs mieux représentés dans le bassin boursier du Québec, comme l'aéronautique et le commerce de détail, demeurent attrayants pour les investisseurs.

Dans l'industrie aéronautique, des entreprises telles que le fabricant de simulateurs de vol CAE et le fournisseur de pièces d'avion Héroux ont "des carnets de commandes bien remplis".

Néanmoins, elle a des réserves envers Bombardier, dont la récente embellie boursière ne tiendrait pas compte du «risque financier considérable» qui se pointe avec le lancement des plus gros biréacteurs de la série C.

Par ailleurs, Christine Décarie dit être de plus en plus tentée par des investissements additionnels en actions de grands détaillants d'origine québécoise, tels que Rona, Alimentation Couche-Tard et Metro.

«Leur valeur boursière a beaucoup souffert de la défaveur des investisseurs envers les titre de consommation, provoquée par le ralenti de l'économie américaine et son impact appréhendé au Canada. Mais la perte de valeur de ces détaillants d'origine québécoise est exagérée par rapport à leur réalité d'affaires.»

«Ils pourraient être les premiers à rebondir en Bourse dès les premiers signes de stabilisation économique aux États-Unis», dit-elle.

Mais pour identifier ce revirement favorable, et préparer ses placements en conséquence, il faut aussi s'astreindre à un bon suivi des entreprises et de leurs dirigeants.

Et à ce propos, des gestionnaires de fonds d'actions québécoises estiment offrir un avantage particulier aux investisseurs, pour contrer leur méfiance courante envers un tel créneau de marché.

En particulier celui des petites et moyennes capitalisations, en recul de 10% au Canada depuis le début de 2008, selon l'indice de la Bourse TSX Croissance.

«Notre proximité avec les dirigeants d'entreprises québécoises constitue une valeur ajoutée importante pour les investisseurs qui cherchent des alternatives pour leurs placements en actions», selon Marc Lecavalier, co-gestionnaire du fonds «Croissance Québec-PME» chez Placements Banque Nationale.

Ce fonds spécialisé en actions d'entreprises québécoises de capitalisation intermédiaire est encore modeste, avec 17 millions sous gestion.

Mais sa récente tenue a de quoi influencer certains investisseurs: gain de 32% en 2007 et de 19% en 2006, loin devant l'indice de la Bourse TSX Croissance.

Ça lui a valu une cote de «quatre étoiles» sur un maximum de cinq de la part de la firme Morningstar, parmi les fonds d'actions spécialisés au Canada.

FONDS ET INDICES DU QUÉBEC EN BOURSE

Variation 2008 Variation (au 17 avril) 2007

Fonds CroissanceQuébec-PME (B. Nationale) -11,9% +32%

Fonds équil.Québec (Desjardins) -4,7% +11,5%

Fonds entreprisesQuébec-A (Investors) -7,5% +9,4%

IndiceQuébec-30 (Casiq, U. de Sherb.) -7,8% +3,9%

IndiceQuébec-120 (Casiq, U.de Sherb.) -8,1% +3,1%

IndiceQuébec-90 (Scotia Capitaux) -7,7% +7,8%

IndiceQuébec-60 petites cap. (Scotia Capitaux) -9,9% -4,3%

Indice BMONesbitt BurnsQuébec -13% -4,8%

Indice S&P/TSX +2% +7,1%

Indice TSX-Croissance -9,6% -5,6%

Indice S&P 500 (en$CA) -6% -11,3%

GRANDES SOCIÉTÉS QUÉBÉCOISES, BOURSE DE TORONTO

Société (symbole, activité) Valeur boursière ($) Cote récente Variation un an

BCE (BCE, télécoms) 29,8 milliards 37,11 $ +2,3%

FINANCIÈRE POWER (PWF, finances) 25,3 milliards 35,92$ -8,7%

CANADIEN NATIONAL (CNR, transport) 24,5 milliards 50,91 $ -8,4%

POWERCORP (POW, finances) 15,6 milliards 34,28$ -9,1%

BOMBARDIER (BBD, transport) 11,4 milliards 6,52$ +44,2%

BANQUE NATIONALE (NA, finances) 7,8 milliards 49,90$ -21,8%

SNC-LAVALIN (SNC, ingénierie) 6,9 milliards 46,29$ +41,4%

SAPUTO (SAP, aliments) 5,9 milliards 28,87$ +25,5%

PAGES JAUNES (YLO, édition) 5,7 milliards 11,03$ -20,1%

GILDAN (GIL, vêtements) 4,2 milliards 34,88$ -3,3%

CGI (GIB, informatique) 3,7 milliards 11,54$ -10,2%

DOMTAR (UFS, produits forestiers) 3,5 milliards 6,77$ -40%

AEROPLAN (AER, marketing) 3,3 milliards 16,60$ -17,6%

CAE (CAE, aéronautique) 3 milliards 11,95$ -11,2%

INDUST.-ALLIANCE (INS, finances) 3 milliards 37,76$ +5,7%

ALIM. COUCHE-TARD (ATD, détaillant) 2,9 milliards 14,43$ -40%

METRO (MRU, détaillant) 2,7 milliards 24,56$ -35,2%

JEAN COUTU (PJC, détaillant) 2,4 milliards 9,77$ -36,9%

COGECO (CCA, télécoms) 1,9 milliard 40,40$ -9,4%

MOLSON COORS (TPX, boissons) 1,9 milliard 54,50$ +0,3%

ASTRAL MEDIA (ACM, télévision et radio) 1,9 milliard 33,66$ -21,4%

QUEBECOR (QBR, médias, télécoms) 1,8 milliard 28,30$ -28,6%

GAZ METRO (GSM, énergie) 1,7 milliard 14,52$ -13,4%

RONA (RON, détaillant) 1,5 milliard 13,33$ -46,5%

TRANSCONTINENTAL (TCL, imprimerie) 1,5 milliard 18,49$ -13,3%

Sources: Bourse de Toronto, Bloomberg

PME QUÉBÉCOISES HORS RESSOURCES, BOURSE TSX-CROISSANCE

Société (symbole, activité) Valeur boursière ($) Cote récente Variation un an

NOVEKO INTER. (EKO, équipement médical) 311,7 millions 5,63$ +296%

MTY FOOD (MTY, restauration rapide) 185,4 millions 9,70$ +13%

NEPTUNE TECH (NTB, bio-pharmacologie) 125,3 millions 3,35$ -59%

AAER (AAE, équipement moteur) 107,3 millions 1,28$ +232%

DEQ SYSTÈMES (DEQ, logiciels) 70,7 millions 1,02$ +43%

SPORTSCÈNE (SPS, restauration) 67,9 millions 16,30$ +1,8%

RAYMOR (RAR, métallurgie technologique) 57,8 millions 0,58$ -52%

BTB IMMOBILIER (BTB) 55,7 millions 1,70$ -34%

NSTEIN TECH (EIN, logiciels d'édition) 48,9 millions 0,96$ +20%

IMMUNOTEC (IMM, suppl. alimentaires) 45,5 millions 0,65$ -16%

Sources: Bourse TSX-croissance, Bloomberg

PME QUÉBÉCOISES DE RESSOURCES, BOURSE TSX-CROISSANCE

Société (symbole, activité) Valeur boursière ($) Cote récente Variation 1 an

NEWMILLENNIUM (NML, expl. minière) 217,5 millions 2,17$ +334%

JUNEX (JNX, expl.gazifère) 131 millions 2,51 $ +139%

GASTEM (GMR, expl.gazifère) 123,6 millions 2,48$ +281%

BLUE NOTE (BN, expl.minière) 97,9 millions 0,27$ -40%

NORTHERN STAR (NSM, expl.minière) 94,9 millions 1$ -19%

METANOR (MTO, expl.minière) 74,9 millions 1,04$ +4%

DIA BRAS (DIB, expl.minière) 72,4 millions 0,65$ -51%

FREEWEST (FWR, expl.minière) 59,9 millions 0,34$ 85%

AZIMUT EXPL. (AZM, expl.minière) 46,4 millions 2,76$ -56%

DIANOR (DOR, expl. minière) 44,7 millions 0,32$ -65%

Sources : Bourse TSX-croissance, Bloomberg