Des deux côtés de la frontière, la débâcle boursière des dernières semaines mine la confiance des consommateurs, pourtant aux prises avec des réalités différentes.

Des deux côtés de la frontière, la débâcle boursière des dernières semaines mine la confiance des consommateurs, pourtant aux prises avec des réalités différentes.

Chez nous, l'Indice de confiance du Conference Board a plongé à son niveau de l'été 1982, quand l'économie canadienne se remettait péniblement de sa pire récession depuis la Grande Dépression. Selon le Board, le consommateur paraissait beaucoup plus inquiet de sa situation financière, en octobre qu'en septembre. Cela s'explique évidemment par le piqué de la Bourse canadienne à compter de la mi-septembre. En 1982, les marchés boursiers avaient été peu touchés par la forte décroissance qui avait propulsé le taux de chômage au-delà des 10 %. Il se situait à 6,1 % seulement le mois dernier.

Aux États-Unis, l'indicateur de confiance de l'Université du Michigan a plongé de 18 % de septembre à octobre. Il retrouve son niveau de la récession de 1990-1991. Le consommateur fait en outre preuve de beaucoup de pessimisme quant à l'amélioration possible de l'économie. On peut le comprendre. À part l'inflation qui ralentit et le prix de l'essence qui redevient décent, son horizon demeure sombre tandis que ses économies concentrées dans sa maison ou dans son portefeuille d'actions fondent à vue d'oeil.

Ne voulant pas donner l'impression d'intervenir dans la campagne présidentielle, le National Bureau of Economic Research (NBER) s'abstient de déclarer que les États-Unis sont entrés en récession depuis le début de l'année.

Le NBER définit cette léthargie non pas comme la simple contraction du produit intérieur brut durant deux trimestres d'affilée, mais par l'affaiblissement de quatre signes vitaux de l'économie. Le marché du travail doit ralentir, tout comme la production industrielle, alors que le revenu personnel disponible tout comme les ventes de gros, de détail et des fabricants doivent diminuer.

Ces quatre critères sont remplis depuis quelques mois déjà.

Canada

«Mais au Canada, sommes-nous déjà en récession? s'interroge Stéfane Marion, économiste en chef adjoint à la Financière Banque Nationale. D'après les critères du NBER, la réponse est non, n-o-n non. Mise à part la production industrielle, l'économie canadienne ne présente pas encore les symptômes d'une récession.»

Pourtant, la croissance réelle au deuxième trimestre n'a pas suffi à rattraper le recul du premier. Bref, une récession technique ne correspond pas forcément à une décroissance de la consommation dont les dégâts sont plus considérables.

Voilà pourquoi d'aucuns croient que le Canada ne pourra éviter une légère récession cet hiver car la consommation américaine représente maintenant 72 % de la taille de la première économie du monde. Dans aucun autre pays n'a-t-elle autant de poids.

«Il y a peu à débattre des implications directes sur le Canada d'un grave ralentissement des dépenses de consommation américaines», affirme Douglas Porter, économiste en chef adjoint chez BMO Marchés des capitaux.

À la différence des États-Unis, la consommation, les dépenses des gouvernements et les investissements des entreprises devraient dans l'ensemble progresser quelque peu au cours des prochains mois.

«Le Canada fait face à un avenir incertain, compte tenu de la rapide détérioration des économies américaine et mondiale, du stress continu des marchés financiers et de l'érosion de la confiance du consommateur, écrivait hier l'équipe des études économiques de Scotia Capitaux dans la présentation de ses perspectives révisées. La modeste expansion de 0,5 % de l'économie cette année, devrait être suivie par une contraction de 0,2 % l'an prochain.»

Scotia voit le Québec échapper à la récession en 2008, mais pas l'an prochain. L'économie américaine qui a connu un robuste deuxième trimestre, grâce à son commerce extérieur et des rabais fiscaux extraordinaires, elle devrait reculer de 0,6 % en 2009, selon l'institution torontoise.