Quand vient le temps de scruter à la loupe les titres pétroliers à la Bourse de Toronto, il y a trois types d'analystes.

Quand vient le temps de scruter à la loupe les titres pétroliers à la Bourse de Toronto, il y a trois types d'analystes.

Les pessimistes. Les optimistes. Et finalement, les rubinistes -les disciples de Jeff Rubin qui croient, comme l'économiste en chef de la Banque CIBC, que le prix du pétrole suit toujours la même tendance. À la hausse.

Alors que les prix à la pompe atteignent des records au Canada, l'économiste en chef de la CIBC a révisé hier à la hausse son cours cible pour le TSX en 2008. Selon lui, l'indice de la Bourse de Toronto, qui a clôturé la séance d'hier en hausse (+1,99%) à 14 982 points, terminera l'année 2008 à 15 200 points.

Reconnu pour son penchant pour les titres pétroliers, Jeff Rubin a invoqué une fois de plus les perspectives favorables de son secteur préféré, qui constitue 31% de l'indice TSX, afin de justifier sa décision d'augmenter son cours cible.

«Dans quelques années, j'estime que le secteur de l'énergie constituera 40% du TSX, dit-il en entrevue à La Presse Affaires. Le TSX deviendra l'indice d'un seul secteur: l'énergie.»

Demande en hausse

Si certains attribuent la hausse des titres énergétiques à la faiblesse du dollar américain ou carrément à la spéculation, l'économiste en chef de la CIBC a une autre explication, très simple sur le plan économique: la théorie de l'offre et la demande.

«La demande va continuer à augmenter dans les pays émergents, dit-il. C'est normal: les gens là-bas ne paient pas le vrai prix de l'essence. À 50 cents le gallon comme dans certains pays, probablement que les Canadiens augmenteraient aussi leur consommation d'essence.»

Les rubinistes ont le sourire facile ces temps-ci sur les parquets boursiers. En hausse de 24,2% depuis le début de l'année, le secteur de l'énergie est le plus performant de l'indice TSX, devant les ressources naturelles (17,7%) et les technologies de l'information (15,2%). Jeff Rubin recommande ainsi de surpondérer le secteur énergétique de 7%. Comme l'énergie constitue 31% de l'indice TSX, un investisseur devrait en détenir 38% dans son portefeuille.

«C'est vraiment tout le secteur de l'énergie qui va bien, dit-il. Oui, il y a le pétrole, mais il ne faut pas oublier le gaz naturel.»

Malgré son enthousiasme, Jeff Rubin et les économistes de la CIBC doivent partager le titre de l'institution financière la plus optimiste à l'égard de l'indice TSX. En fait, ils sont ex aequo avec les économistes de la Banque de Montréal, qui estiment eux aussi que le TSX terminera l'année à 15 200 points, soit un rendement de 1,4% d'ici le reste de l'année.

«Nous sommes relativement confiants, même si nous suivons de près les problèmes de l'économie américaine, dit Doug Porter, économiste en chef adjoint à BMO Groupe Financier. Les titres énergétiques sont élevés, mais pas autant qu'ils pourraient l'être si on se fie à la montée du prix du baril de pétrole.»

Toutes les institutions financières ne sont pas aussi optimistes que la CIBC et BMO Groupe Financier. Au nombre des sceptiques, la Banque Scotia, qui estime néanmoins que le TSX parviendra à maintenir le cap (+0,1%) d'ici la fin de l'année.

«Personne ne s'obstine sur le fait que le prix du pétrole est élevé, dit le stratège financier Vincent Delisle. C'est seulement un peu surprenant que le prix du pétrole soit aussi élevé alors que l'économie américaine est au bord d'une récession.»

Si Vincent Delisle n'est pas plus optimiste, c'est qu'il doute que le secteur de l'énergie puisse maintenir un tel rythme encore longtemps.

«Ceux qui paient le vrai prix de l'essence, comme les Européens et les Nord-Américains, diminuent leur consommation, fait-il remarquer. Aux États-Unis, la consommation a diminué de 800 000 barils par jour au premier trimestre cette année par rapport à 2007. Dans les pays émergents, le pétrole est souvent subventionné par les gouvernements. Présentement, il y a des protestations dans ces pays parce que les gouvernements ne peuvent plus subventionner autant le prix de l'essence.»

Parmi les six institutions financières interrogées par La Presse Affaires, seuls le Mouvement Desjardins et la Banque Nationale entrevoient une fin d'année difficile sur les marchés boursiers canadiens. Les deux institutions prévoient un cours cible de 14 000 points au TSX, soit un recul de 6,6% par rapport à son cours actuel.

«Il devrait y avoir un repli des marchés boursiers, principalement en raison des craintes dans le secteur financier et de la possibilité que les États-Unis tombent en récession», dit Luc Girard, directeur du groupe-conseil en portefeuilles chez Valeurs mobilières Desjardins.

«Au Canada, les marchés boursiers n'ont pas encore bien évalué la menace d'une récession aux États-Unis», ajoute Pierre Lapointe, stratège adjoint à la Banque Nationale Financière.

À lire demain, une grande entrevue avec Jeff Rubin.