Vincent Lacroix saura dès mardi à 11h s'il est autorisé à contester en Cour supérieure du Québec le verdict de culpabilité prononcé contre lui le 28 janvier.

Vincent Lacroix saura dès mardi à 11h s'il est autorisé à contester en Cour supérieure du Québec le verdict de culpabilité prononcé contre lui le 28 janvier.

Le juge Réjean Paul a indiqué en fin de matinée lundi qu'il allait trancher sur les huit motifs présentés par M. Lacroix et contrés par une requête de rejet d'appel de l'Autorité des marchés financiers.

Le PDG déchu de Norbourg saura donc s'il a le droit d'interjeter appel sur sa culpabilité quant à 51 chefs d'accusation.

Si les preneurs aux livres se penchaient sur le dossier, ils n'accorderaient certainement pas de grandes chances de succès aux motifs invoqués par M. Lacroix.

Déclaré coupable en décembre d'avoir violé la Loi sur les valeurs mobilières et condamné à 12 ans moins un jour de prison le 28 janvier, le fondateur de Norbourg a vu cinq de ses huit motifs disparaître virtuellement lors des audiences tenues en février.

Le juge Paul lui avait dit à plusieurs reprises de ne pas perdre son temps à plaider sur des motifs tels que les méthodes de l'AMF pour obtenir sa preuve et le fait qu'une enquête administrative en 2004 s'est transformée en enquête pénale.

Lundi matin, les trois motifs restants ont été examinés.

Ce sont les suivants: la demande rejetée d'un procès devant juge et jury, le refus d'une série de témoins lors du procès pénal et les questions posées par le juge Claude Leblond pendant l'étape de la plaidoirie sur la preuve.

Un procès devant jury

La première question examinée par la cour a été celle d'un procès avec un tribunal composé d'un juge et d'un jury. Vincent Lacroix allègue depuis le début de son procès pénal que s'il était passible de plus de cinq ans de prison, il devait être jugé par un jury.

Le procureur de l'AMF, Eric Downs, a rappelé que le gouvernement n'a pas fait un choix innocent quand il a utilisé le singulier en disant qu'un procès pouvait se dérouler devant un jury seulement quand «une infraction» rendait une personne passible de plus que cinq ans de prison.

C'est, selon le juriste, parce que 51 chefs pouvant chacun mener à cinq ans moins un jour de prison que M. Lacroix a reçu une sentence plus longue que cinq ans.

Le juge Paul a aussi indiqué à Vincent Lacroix que la Cour suprême du Canada a réglé la question en 1989 et que «c'est la loi, je dois appliquer la loi».

Les témoins refusés

Le deuxième motif sur lequel le tribunal s'est penché portait sur la question des témoins que Vincent Lacroix n'a pu interroger lors du procès. Le prisonnier allègue qu'on l'avait privé d'une défense pleine et entière.

Eric Downs a toutefois longuement rappelé que ces témoins n'ont pas satisfait les exigences du juge Leblond quant à leur pertinence en rapport aux 51 chefs d'accusation. De plus, selon l'avocat, le magistrat a été «extrêmement patient» avec M. Lacroix quand il a cherché à établir leur pertinence.

Me Downs a aussi affirmé que les témoins n'auraient servi à rien d'autre qu'à faire un procès parallèle contre l'AMF sur un conflit d'intérêts dans l'affaire Norbourg. Le juge Leblond avait déjà refusé de faire un tel exercice pendant les requêtes préliminaires ayant précédé le procès.

Le juge Réjean Paul a acquiescé, estimant que l'avis d'appel de M. Lacroix porte très précisément sur un conflit d'intérêts.

Vincent Lacroix a toutefois insisté pour dire que ce motif sur les témoins pouvait porter sur un autre aspect que le conflit d'intérêts allégué. Le juge Paul l'a invité à réécrire son motif afin de le présenter en cour mardi.

Le droit au silence

Enfin, le PDG de Norbourg estimait avec le troisième motif restant que l'étape de la plaidoirie sur la preuve pendant son procès l'avait privé du droit au silence et que le juge Leblond avait fait preuve de partialité.

Rappelons que M. Lacroix disait qu'il n'avait rien à plaider. Surpris, Claude Leblond lui avait posé une série de questions afin d'obtenir son analyse de la preuve. Il voulait savoir s'il pouvait tirer une conclusion autre que la culpabilité de l'accusé.

Eric Downs, lui, a avancé que le juge Leblond a pris le temps d'indiquer à Vincent Lacroix qu'il n'avait pas l'obligation de répondre à ses questions. «Un juge n'est pas un Sphinx qui doit attendre [...] il peut guider les parties» pendant un procès, a résumé l'avocat.

Me Downs a insisté que le jugement de culpabilité découlait d'une «preuve en béton armé» et non des réponses fournies par M. Lacroix.

Le juge Paul a pour sa part expliqué au prisonnier qu'au moment de répondre aux questions du juge Leblond, la preuve était déjà close et que cet exercice de plaidoirie ne pouvait pas le mener à s'incriminer lui-même.

Il reste donc à voir si le juge rejettera officiellement les motifs d'appel de Vincent Lacroix sur sa culpabilité et s'il voudra entendre le motif portant sur les témoins.

Plus tard, la cour doit se pencher sur un avis d'appel sur la sentence, un document déposé par M. Lacroix à la fin de février.