L'adoption cette semaine de la Déclaration de Lisbonne engage pays européens et gouvernements régionaux Nord-américains sur la voie d'une collaboration en matière d'échange de crédits de carbone.

L'adoption cette semaine de la Déclaration de Lisbonne engage pays européens et gouvernements régionaux Nord-américains sur la voie d'une collaboration en matière d'échange de crédits de carbone.

L'adhésion de la Nouvelle-Angleterre, de la Californie et de la Colombie-Britannique confirme l'échelle internationale du marché qui émerge.

À la mi-octobre, la Bourse de Montréal a déposé officiellement le détail de son projet de marché climatique. Un lancement est prévu dès 2008.

Ces événements élèvent le carbone au rang de commodité: au même titre que l'or ou le pétrole. Le petit investisseur peut-il profiter de ce nouveau marché?

Oui. C'est possible en Europe. Et cela le sera aux États-Unis et au Canada prochainement. C'est du moins ce que laisse supposer des projets de premiers appels public à l'épargne circulant ces jours-ci à l'Autorité des marchés financiers et à la Security and Exchange Commission.

L'approche Nord-Américaine

Au Canada, GHG Emission Participation Unit Corp (GHG Corp.), un fonds qui sera négocié à la Bourse de Toronto, permettra d'investir dans les crédits de carbone. Ses promoteurs prévoient récolter 100 M$ dans public.

GHG Corp. «cherchera à acquérir des crédits d'émission et des actifs donnant une exposition directe ou indirecte» au carbone, lit-on dans le prospectus provisoire. Les investissements dans le carbone se feront «par l'intermédiaire de produits transigés en bourse et par des transactions privées».

Les possibilités offertes par tous les types de marchés seront examinées (marchés réglementaires, régionaux ou volontaires). GHG Corp. prévoit investir autant en Europe que sur les marchés naissants de la Californie et de la Nouvelle-Angleterre.

Les américains innovent également dans ce domaine. Le fonds AirShares EU Carbon Allowances Fund (AirShares) se négociera au parquet électronique du New York Stock Exchange. On prévoit rassembler 250 M$ dans ce cas.

Une distinction importante: les AirShares n'investiront pas directement dans des crédits de carbone. On mise exclusivement sur la performance du marché européen.

La stratégie d'investissement est basée sur l'acquisition de contrat à terme du European Climate Exchange. Le marché dérivé du carbone le plus développé du monde.

Que vous optiez pour AirShares ou GHG Corp.: le prix du carbone s'envole, vous vous envolez. Le prix plonge...vous plongez. Une mise en garde: ayez l'estomac solide.

L'approche européenne

Le marché du carbone opère depuis plusieurs années en Europe et les banques y sont inventives. Une série d'indices liés aux polluants atmosphériques furent lancés ces dernières années dans la zone.

C'est le cas de la banque d'affaires UBS qui a lancé, en novembre 2006, le premier indice mondial des émissions: le UBS World Emission Index.

Ainsi, UBS peut désormais lier la performance de l'indice à celle de billets structurés qu'elle distribue. Fabian Schlederer, responsable des transactions sur dérivés indiciels - actions et commodités chez UBS à Zurich confirme l'intérêt des investisseurs européens.

Le carbone «s'ajoute à un portefeuille de placements existant. Cependant, les investisseurs doivent être informés de la mécanique du marché et des risques qui y sont associés», dit-il.

L'attrait de la commodité réside dans le fait que «le carbone est hautement non corrélé avec les classes d'actifs traditionnelles, comme les actions et les obligations», explique Fabian Schlederer.

Pour l'instant ce type de placement n'est pas disponible au Canada. La Presse Affaires à pu confirmer qu'au moins une grande banque canadienne jongle avec l'idée.

Et les risques?

Peter Fusaro, auteur newyorkais et consultant en marchés environnementaux, met en garde le petit investisseur. Les gens souhaitent investir dans le carbone mais «le risque est très grand», rappelle-t-il.

«Le carbone interpelle surtout les fonds de couverture, les grands détenteurs et les investisseurs institutionnels».

Ces joueurs sont habitués à de la volatilité importante. Ce n'est pas le cas de l'investisseur moyen, souligne Peter Fusaro.

L'investisseur averti doit considérer inclure le carbone dans son portefeuille en ayant en tête la consigne d'être «prudent et ne pas surpondéré» la commodité, prévient-il. Cet expert estime que les changements requis pour que l'économie mondiale passe véritablement au vert prendront jusqu'à 15 ans.

«L'intérêt des investisseurs est actuellement plus grand que la capacité du marché», confirme Peter Fusaro. Tout indique que convertir drastiquement son portefeuille de placement au carbone est à proscrire.

«Il faut continuer d'être surpondéré dans le vieux complexe du combustible fossile», dit-il.

Les titres de grandes capitalisations de ce complexe sont stables, autant sur le plan des profits que des dividendes. Un investisseur avisé n'y échappe pas.

«Il ne faut pas oublier que nous sommes au milieu du plus grand boom de l'énergie que le monde est connu», conclu Peter Fusaro.