Ceux qui attendent une crise du marché de l'habitation à l'américaine pour s'acheter une première maison devront déchanter.

Ceux qui attendent une crise du marché de l'habitation à l'américaine pour s'acheter une première maison devront déchanter.

Le prix moyen des maisons neuves ou sur le marché de la revente va monter moins vite cette année et l'an prochain, mais il ne devrait pas baisser.

«Les conditions favorables aux vendeurs vont s'estomper et laisser place à un meilleur équilibre entre l'offre et la demande», prévoient Craig Alexander et Pascal Gauthier, économistes chez Banque TD groupe financier, dans une récente étude spéciale.

Ils reconnaissent que la situation présente s'apparente au sommet de 1989. Cette fois-ci, cependant, bien des conditions permettent de croire que le pic actuel ne sera pas suivi par une longue léthargie comme celle qui s'était prolongée durant la plupart des années 90.

Voilà pourquoi ils prédisent cette année encore plus de 220 000 mises en chantier d'un océan à l'autre, dont 47 000 au Québec. Il s'agit néanmoins d'un léger recul respectif de 2,9% et 3,2% sur l'an dernier.

Le ralentissement de l'activité sur le marché de la revente sera un peu plus prononcé avec un repli moyen du nombre de transactions de 5,7% au Canada, mais de 3,9% seulement pour sa société distincte.

Ce recul ne sera pas suffisant pour empêcher les prix de monter. Le prix moyen sur le marché de la revente atteindra cette année 325 700$, soit 6,0% de plus que celui de 2007.

En 2005, 2006 et 2007, le prix moyen avait bondi de plus de 10% par année.

Au Québec, il devrait s'établir à 218 900$, en hausse de 5,1%. Au cours des trois années précédentes, les hausses de prix annuelles avaient fluctué de 5,1% à 7,9%.

Bien que moins élevées, ces hausses des prix demeurent plus rapides que la progression du revenu disponible des ménages. L'accès à la propriété diminue.

«Le revenu disponible moyen des ménages excède de seulement 1,1% le revenu exigé par les prêteurs hypothécaires pour financer l'achat d'une résidence au prix moyen», estime Hélène Bégin économiste chargée de l'indice d'abordabilité (sic) Desjardins.

La dernière mesure de l'indice portait sur le quatrième trimestre de 2007. Depuis, précise Mme Bégin en entrevue, les taux hypothécaires ont légèrement diminué ce qui détend un peu les conditions du marché.

Dans leur étude, MM. Alexander et Gauthier rappellent que la part du revenu disponible pour rembourser un prêt hypothécaire à taux fixe de cinq ans s'élevait à 28% en 2004. Elle atteint désormais 38%.

«Du point de vue d'un prêteur, une portion supérieure à 32% est jugée non désirable.»

Jusqu'ici, l'ingénierie financière est venue prêter main-forte au marché. On amortit des prêts sur 40 ans au lieu de 25 par exemple, ce qui diminue la part du revenu consacrée aux mensualités. Cela l'a ramenée tout juste à 32%, notent les auteurs.

Ils ne craignent pas cependant une répétition des années 90 pour plusieurs raisons. À l'époque, les taux d'intérêt grimpaient malgré la récession alors qu'aujourd'hui, ils devraient diminuer, à court terme du moins.

Le taux d'emploi atteint des sommets et le revenu disponible croît plus vite que l'inflation à cause des pressions salariales à la hausse, des baisses d'impôts (les impôts ont augmenté durant la majeure partie des années 90) et du pouvoir d'achat accru résultant d'une monnaie forte.

Cela dit, l'économie ralentit, des gens perdront leur emploi. Il y aura moins d'acheteurs sur les rangs ce qui contiendra la progression des prix.

«Les risques d'une correction des prix vont augmenter toutefois si leur rythme de progression ne ralentit pas ou, pire, s'il s'accélère, préviennent les auteurs. À terme, quand le taux d'intérêt directeur de la Banque du Canada reviendra à des niveaux plus neutres de 4,5% à 5,0%, sans doute d'ici 2010, de grands défis confronteront les grands centres urbains, si la forte spéculation continue de restreindre l'accès à la propriété.»