La survie de Shermag (T.SMG) apparaît de plus en plus incertaine après le départ du président, Jeffrey Casselman, vraisemblablement poussé vers la sortie par le nouvel actionnaire majoritaire du fabricant de meubles.

La survie de Shermag [[|ticker sym='T.SMG'|]] apparaît de plus en plus incertaine après le départ du président, Jeffrey Casselman, vraisemblablement poussé vers la sortie par le nouvel actionnaire majoritaire du fabricant de meubles.

Dans un bref communiqué publié mardi matin, l'entreprise sherbrookoise a annoncé la «démission» immédiate de M. Casselman, en poste depuis 2000.

Or, selon la majorité des sources consultées par La Presse Affaires, le départ du dirigeant n'a rien de volontaire. Il se serait fait montrer la porte par George Armoyan, dont la firme d'investissement Clarke contrôle environ 20% des actions de Shermag.

George Armoyan, actionnaire «activiste», en a marre de voir les résultats de Shermag piquer du nez. Le mois dernier, il a clairement indiqué que les dirigeants de Shermag devraient collaborer avec lui pour améliorer les choses... ou s'éclipser.

«Nous allons travailler avec Casselman et l'équipe de direction s'ils sont prêts à travailler avec nous, mais s'ils ne le sont pas, ce sera une histoire différente», avait-il dit à The Gazette.

George Armoyan s'est joint au conseil de Shermag il y a un peu plus d'un mois, ce qui avait forcé Jeffrey Casselman à céder son siège d'administrateur (les règlements ne permettent pas d'ajouter un membre entre les assemblées).

À ce moment, le président du conseil, Claude Pichette, avait déclaré que M. Casselman demeurait «un élément clé de la stratégie de la société pour l'avenir».

Quelques mois plus tôt, Melinda Lee, vice-présidente de Clarke, avait elle aussi obtenu un siège au conseil de Shermag, après que la firme eut augmenté sa participation dans l'actionnariat.

Liquidation?

Ni George Armoyan ni la direction de Shermag n'a voulu faire de commentaires mardi sur l'avenir de Shermag. Mais d'après des analystes, Clarke pourrait bien choisir de liquider l'entreprise.

«M. Armoyan pourrait utiliser la même stratégie employée par Warren Buffett, soit de vendre les actifs physiques d'une entreprise qui sous-performe et de réinvestir les produits dans la société mère», a avancé Jordan Benincasa, analyste de la firme Morningstar, pendant une entretien téléphonique.

«L'entreprise est vouée à se faire liquider, a dit un autre analyste qui a requis l'anonymat. Tous les jours, ils perdent de l'argent, alors le plus vite sera le mieux. Je ne leur donne pas plus de six mois...»

George Armoyan et son équipe pourraient à l'opposé tenter une ultime restructuration de Shermag, ajoutent les analystes. L'entreprise de Sherbrooke a déjà fermé plusieurs usines et licencié des centaines d'employés ces dernières années.

Les travaillent restent confiants. Ils croient encore que Shermag peut se sortir du pétrin, dit Isabelle Proulx, permanente syndicale chez les Métallos, qui représentent une centaine d'employés de trois usines.

«Jusqu'à ce que ça ne soit fermé, les gens gardent espoir, a dit Mme Proulx. Et avec Clarke, on est peut-être entre meilleures mains que ce qu'on pense. C'est une entreprise qui est réputée pour redresser des entreprises qui sont en difficulté.»

D'ici à ce qu'un remplaçant à Jeffrey Casselman soit trouvé, les affaires quotidiennes de Shermag seront gérées par un comité de direction relevant du conseil d'administration.

«Tout nous porte à croire que les efforts déployés au cours des prochains mois profiteront à la société à long terme», a affirmé Claude Pichette, président du conseil, dans un communiqué.

Shermag a vu ses revenus fondre de 40% au deuxième trimestre, à 27,2 millions de dollars, ce qui a occasionné une perte de 3,7 millions.

Son titre est brièvement tombé sous la barre du 1$, mardi à la Bourse de Toronto, pour clôturer à 1,02$, en hausse de 1 cent.

Tempête

Il n'y a pas que Shermag qui batte de l'aile. Toute l'industrie québécoise du meuble est en crise depuis quelques années, en proie à une concurrence féroce -et à bas prix- des fabricants asiatiques.

Une situation aggravée par la montée rapide du dollar canadien face au billet vert et par le ralentissement de l'économie américaine.

L'industrie n'est pas vouée à disparaître, selon Jean-François Michaud, président de l'Association des fabricants de meubles du Québec.

Mais les fabricants qui veulent sortir de la «tempête» actuelle devront innover et améliorer leur productivité pour se démarquer des Asiatiques, dit-il.

La «personnalisation de masse», qui permet aux clients de choisir eux-mêmes les caractéristiques de leurs meubles, représente un des bons débouchés pour les fabricants québécois, indique Denis Lagacé, titulaire de la chaire de recherche sur le meuble de l'Université du Québec à Trois-Rivières.