Au moins 538 millions de dollars, et l'on compte encore!

Au moins 538 millions de dollars, et l'on compte encore!

C'est le montant des fonds que des sociétés d'État et des organismes du gouvernement du Québec ont encore coincés dans la crise du papier commercial non bancaire (PCAA).

La ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, a divulgué mercredi un premier sommaire des dégâts infligés par le papier commercial dans les finances du gouvernement du Québec, huit mois après l'éclatement de cette crise sans précédent dans le milieu financier canadien.

La ministre répondait ainsi aux questions de députés de l'opposition mis au courant par la divulgation par les médias, il y a quelques jours, du fait que l'Agence métropolitaine de transport (AMT) de Montréal avait 44,5 millions en liquidités bloquées dans le PCAA non bancaire.

Cette mise au jour chez l'AMT pourrait n'être que l'un des mauvais constats comptables parmi tant d'autres liés au PCAA dans le secteur public québécois, au cours des prochaines semaines.

Ces constats sont attendus au fur et à mesure que les organismes publics publieront leurs états financiers annuels, pour leur exercice terminé le 31 mars dernier.

Dans le secteur privé, cette comptabilisation a déjà eu lieu, puisque leurs exercices financiers se terminent le 31 décembre.

Et chez le principal gendarme comptable du gouvernement au Québec, le vérificateur général, on confirme être aux aguets à l'égard des PCAA non bancaire.

«C'est un élément que nous examinons de près ces temps-ci lorsque nous révisons les états financiers que nous soumettent les sociétés d'État et les organismes publics», a indiqué Raymonde Côté-Tremblay, porte-parole du vérificateur général.

Dans la liste divulguée mercredi par la ministre des Finances, on retrouve des montants de PCAA vicié qui avaient déjà été ébruités, comme les 137 millions de la SGF et les 140 millions de la Financière agricole.

Mais aussi, on découvre des montants plus étonnants comme les 75 millions en liquidités bloquées au Conseil de gestion des taxes scolaires de l'île de Montréal, ainsi que les 50 millions de l'Université McGill et les 20 millions pour la «Bibliothèque et Archives nationales».

On indiquait hier au cabinet de la ministre des Finances que la liste divulguée pourrait encore s'alourdir.

«On l'estime pas mal complète à ce moment-ci, mais ça peut encore changer. Par ailleurs, on a confirmé que les plus grandes sociétés d'État comme Hydro-Québec, la SAQ et Loto-Québec, n'ont pas de mauvais papier commercial», a indiqué Catherine Poulin, porte-parole ministériel.

Surveillance resserrée

En décembre dernier, le gouvernement du Québec a resserré sa surveillance financière de ses sociétés d'État et organismes de services.

Ceux-ci doivent désormais faire approuver leurs placements et leurs emprunts par le ministère des Finances, au lieu de s'en tenir à l'approbation de leur ministère sectoriel respectif.

N'empêche, pour certains organismes publics présents sur la liste de la ministre, l'importante relative de leurs fonds figés dans le PCAA suggère qu'ils ont sans doute dû trouver des solutions de rechange d'urgence à leurs besoins de liquidités pour leur gestion immédiate, peu après l'éclatement de la crise en août dernier.

Car ces titres de placement de très court terme, faut-il rappeler, étaient vendus par des institutions financières -surtout la Banque Nationale au Québec- comme un moyen pour les entreprises de bonifier leurs liquidités, avant leur usage dans les semaines ou les mois suivants.

Lors de la crise d'août dernier, c'est la portion des papiers commerciaux émis au Canada par des sociétés non bancaires -alors à 35 milliards- qui a figé.

Depuis, un comité spécial de grands investisseurs en PCAA non bancaire, dont la Caisse de dépôt et placement, la Banque Nationale et le Mouvement Desjardins, a élaboré un plan de conversion du PCAA vicié en nouveaux titres négociables à long terme.

Ce plan est en instance d'approbation devant un juge torontois, en particulier sa clause controversée d'immunité de poursuites pour les banques et les courtiers qui ont vendu le PCAA non bancaire.

Des entreprises québécoises mènent cette opposition, dont la société papetière Domtar, le détaillant Jean Coutu, le voyagiste Transat AT, le constructeur Pomerleau et la société Aéroports de Montréal.

Est-ce que des sociétés d'État québécoises le plus touchées par le PCAA, comme la SGF et la Financière agricole, pourraient s'y joindre? On n'avait pas de réponse prête à ce sujet au cabinet de la ministre des Finances, en fin de journée mercredi.