Le lien positif entre le niveau d'éducation des travailleurs, la productivité de la main-d'oeuvre ainsi que le niveau de vie d'un pays a été maintes fois mis en évidence.

Le lien positif entre le niveau d'éducation des travailleurs, la productivité de la main-d'oeuvre ainsi que le niveau de vie d'un pays a été maintes fois mis en évidence.

Par contre, l'importance de la formation parrainée par l'employeur comme mécanisme de rehaussement des compétences des travailleurs est méconnue.

Présentement, cette importance est pourtant magnifiée par deux facteurs: le progrès technologique qui accélère la dépréciation des connaissances acquises, et le vieillissement de la main-d'oeuvre, qui fait en sorte qu'une politique publique d'amélioration des compétences qui cible les travailleurs atteint une part de plus en plus importante de la population.

Ainsi, la plupart des pays de l'OCDE subventionnent l'investissement en capital humain en soutenant la formation en entreprise. Au Canada par exemple, le gouvernement ontarien offre des crédits d'impôts aux entreprises qui investissent dans le perfectionnement des connaissances de leurs employés.

Le gouvernement du Québec, pour sa part, a adopté en 1995 la Loi 90, qui oblige les entreprises dont la masse salariale annuelle est supérieure à un million de dollars à investir 1% de cette masse salariale dans la formation de leurs employés.

Disparités dans l'offre de formation

Pourtant, il semble qu'il reste du travail à faire pour convaincre les entreprises de l'importance du développement des compétences de leur main-d'oeuvre. Des données récentes de Statistique Canada montrent en effet que seulement 54% des lieux de travail offrent de la formation, 22% offrent à la fois de la formation en classe et en cours d'emploi, 9% offrent seulement de la formation en classe et 23% seulement de la formation en cours d'emploi.

La formation en classe réfère à une formation formelle souvent donnée par une personne extérieure à l'entreprise ou au service où travaillent les employés en formation (le service des ressources humaines, par exemple). La formation en cours d'emploi, pour sa part, est toujours donnée pendant les heures de travail, et généralement par un collègue ou un superviseur.

Plus l'établissement est grand, plus la probabilité qu'il offre de la formation est élevée. En effet, certaines études montrent que près de la moitié (46%) des petites entreprises (moins de 20 employés) n'offre pas de formation alors que plus de 90% des moyennes et grandes entreprises offrent de la formation.

Ces résultats pourraient s'expliquer par l'existence de contraintes reliées au financement de la formation qui affecteraient évidemment de façon plus aiguë les petites entreprises.

Les rendements de la formation

Des recherches récentes montrent qu'un employé ayant reçu de la formation en classe dans le courant de la dernière année est 10% plus productif qu'un employé similaire n'en ayant pas reçue. Les résultats ne montrent aucun impact significatif de la formation en cours d'emploi.

Une raison pouvant expliquer une partie de ce différentiel est que seule la formation en classe contribue à augmenter de façon significative le niveau de compétence des employés alors que les dépenses pour la formation en cours d'emploi feraient partie des dépenses d'opération normales de l'entreprise et seraient entre autres reliées à son taux de roulement.

En termes de rendement sur l'investissement, on parle alors de rendements importants variant entre 50% et 100% des montants investis en formation en classe.

Bien entendu, les impacts de la formation en entreprise sur sa performance peuvent aller au-delà de sa productivité. Mais ces autres impacts sont souvent difficiles à quantifier. Des études trouvent des impacts importants sur la qualité des produits et sur la satisfaction de la clientèle.

Aussi, il est reconnu que le processus qui mène à l'innovation repose sur un niveau élevé de capital humain chez les travailleurs qui peut être maintenu et amélioré à travers la formation. Pour ces autres mesures, il semble que la formation en cours d'emploi joue un rôle aussi important que la formation en classe.

Une question moins étudiée est celle de possibles complémentarités entre les pratiques de formation de l'établissement et ses autres investissements. La présence de complémentarités indique que les rendements des investissements en capital physique comme la machinerie, les équipements et les technologies de l'information sur la productivité sont plus importants si l'établissement investit aussi dans la formation de ses employés de façon simultanée.

La réponse à cette question est importante pour les gestionnaires et les décideurs politiques. En effet, la présence de complémentarités signifie que des instruments politiques qui cibleraient de façon isolée ces deux pratiques auraient beaucoup moins d'impact sur la productivité qu'une politique ciblant les deux simultanément.

Benoit Dostie, Ph.D. est professeur agrégé à l'Institut d'économie appliquée, HEC Montréal, et Fellow au CIRANO Benoit.Dostie@hec.ca