Montréal-Québec en 1h 13. Montréal-Toronto en 2h 18. Au Canada, le train à grande vitesse est le rêve de tout voyageur. Un rêve, justement -et non une réalité comme en Europe et en Asie.

Montréal-Québec en 1h 13. Montréal-Toronto en 2h 18. Au Canada, le train à grande vitesse est le rêve de tout voyageur. Un rêve, justement -et non une réalité comme en Europe et en Asie.

Pourtant, les premières études sur le train à grande vitesse ont été réalisées en 1981. Malgré tout, ses partisans gardent espoir: le Québec, l'Ontario et le gouvernement fédéral viennent d'ordonner la mise à jour des études sur le projet de TGV entre Québec et Windsor.

Le Québec et l'Ontario devront toutefois faire vite s'ils veulent construire le premier TGV au Canada, car l'Alberta examine la possibilité de construire un train à grande vitesse entre Calgary et Edmonton. Aucun doute, la course au premier TGV canadien s'annonce serrée.

Ottawa, 1998. Le ministre fédéral des Transports, David Collenette, se voit proposer un projet audacieux par le secteur privé, qui veut construire un train à grande vitesse entre Québec et Toronto.

Échéancier: début 2008. Même s'il trouve l'idée intéressante, le ministre libéral décline la proposition. Sans fonds publics, le projet Lynx est abandonné par Bombardier, Alstom, SNC-Lavalin et leurs partenaires.

Dix ans plus tard, David Collenette est bien placé pour mesurer les conséquences de sa décision. L'ancien ministre ronge son frein plusieurs heures par semaine dans les aéroports, lui qui doit faire la navette entre son domicile familial à Ottawa et ses occupations professionnelles à Toronto.

«J'ai toujours cru que le train à grande vitesse était une bonne idée, dit-il en entrevue à La Presse Affaires. Il aurait toutefois été difficile de justifier de telles dépenses à l'époque. Le gouvernement venait de terminer sa lutte au déficit et il avait d'autres priorités, notamment en santé.»

Maintenant retraité de la politique, David Collenette ne perd pas espoir de faire éventuellement la navette entre Ottawa et Toronto à bord d'un train à grande vitesse.

En janvier dernier, les gouvernements du Québec, de l'Ontario et du Canada ont décidé de mettre à jour des études réalisées en 1995 sur un train à grande vitesse entre Québec et Windsor. Le recteur de l'Université Laval, Denis Brière, présidera le comité. Les autres membres seront connus au cours des prochaines semaines.

En 1995, le coût du projet avait été évalué à 18,3 milliards de dollars, mais le rapport du comité gouvernemental a été vite oublié.

«Les gens n'envisagent pas de projets pancanadiens une année de référendum», dit le premier ministre du Québec, Jean Charest.

Les premières études sur un train à grande vitesse Québec-Windsor datent de 1981. Elles ont été mises à jour à plusieurs reprises. Mais cette fois-ci, le premier ministre Charest est convaincu des chances de succès du projet.

«Il y a un alignement des astres, dit-il. Les transports en commun sont de plus en plus populaires. Tout le monde veut légiférer sur la question des gaz à effet de serre. En 1995, Kyoto était encore une ville japonaise. (...) Finalement, le gouvernement fédéral a davantage de marge de manoeuvre aujourd'hui qu'en 1995. À l'époque, on disait même que le gouvernement fédéral était en faillite!»

Maintenant prêts?

Ottawa attend la conclusion des dernières études sur le train à grande vitesse, qui seront dévoilées avant la fin de l'année, avant de prendre position.

«Nous sommes toujours prêts à examiner toutes les alternatives qui peuvent offrir aux Canadiens un moyen de transport fiable, confortable, rapide et permettant de diminuer les émissions de gaz à effet de serre», dit le ministre fédéral des Transports, Lawrence Cannon.

Le ministre Cannon croit que le Canada finira par se doter d'un train à grande vitesse à long terme. «Le temps n'est peut-être pas arrivé, mais on est beaucoup plus près de cette réalisation (qu'on pourrait le penser)», dit-il.

Les partisans des transports en commun croient aussi que le Canada est enfin prêt à accueillir son premier train à grande vitesse.

«Dans les années 90, les changements climatiques et la question des gaz à effet de serre ne faisaient pas partie du débat politique. Aujourd'hui, ce sont des questions importantes pour les gouvernements», dit David Jeanes, président de Transport 2000 Canada, un organisme voué à la promotion des transports en commun.

«Le timing doit être parfait afin de réaliser ce genre de projets, ajoute William Spurr, président de Bombardier Transport en Amérique du Nord. Présentement, tous les éléments sont en place pour la construction d'un premier train à grande vitesse au Canada. Après avoir éliminé son déficit, le gouvernement fédéral est en bonne santé financière.»

Si les gouvernements décident de construire un train à grande vitesse, ils devront ensuite s'entendre sur le type de train en question: un train rapide à la nord-américaine ne dépassant pas 240km/h ou un véritable TGV à l'européenne pouvant atteindre 300km/h.

«Je veux un train beaucoup plus rapide que ce que nous avons présentement, mais ça n'a pas besoin d'être un TGV», dit le premier ministre Charest.

Sourire en coin, David Collenette a sa petite idée sur le choix d'un train à grande vitesse.

«Le TGV est une solution idéale, mais c'est impensable dans les conditions actuelles. Nous devons d'abord améliorer la vitesse sur nos lignes existantes. C'est un peu comme la théorie de l'étapisme de René Lévesque», dit David Collenette, qui, même à la retraite, n'est jamais très loin de la politique...