Prendre l'avion est devenu un sale moment à passer pour bien des voyageurs. Les aéroports sont souvent bondés, les mesures de sécurité, poussées à l'extrême, et le degré de stress, élevé. À mille lieues de l'aura de glamour qui entourait le transport aérien dans les années 70.

Prendre l'avion est devenu un sale moment à passer pour bien des voyageurs. Les aéroports sont souvent bondés, les mesures de sécurité, poussées à l'extrême, et le degré de stress, élevé. À mille lieues de l'aura de glamour qui entourait le transport aérien dans les années 70.

Aux États-Unis, 2007 aura été la pire année de l'histoire pour les passagers. Le quart des avions ont décollé en retard entre janvier et novembre, ce qui représente 1,6 million de vols.

Et en moyenne, 415 vols ont été carrément annulés... chaque jour! Bien des Américains se sentent aujourd'hui pris en otages d'un système au bord du gouffre.

La situation est plus saine dans les aéroports canadiens. D'importantes sommes ont été investies depuis 15 ans et les travaux d'amélioration se poursuivent.

Mais vu le rôle central des États-Unis dans le système aérien mondial, des experts parlent d'un risque de «contamination».

Le stress avant le vol

Robert Lazarus et sa femme ont vécu l'angoisse à Buenos Aires. Ils devaient quitter la capitale argentine pour Montréal samedi soir dernier, mais leur avion a décollé sans eux. Comme 90 autres passagers d'Air Canada, ils sont restés coincés pendant des heures à l'aéroport sans recevoir aucune explication.

Le couple est finalement rentré à la maison... hier matin! «On a été laissés à nous-mêmes, raconte l'homme d'affaires de Vaudreuil. Jusqu'à maintenaant, ceux qui sont revenus, comme nous, c'est grâce à leurs propres moyens et à leur ténacité.»

Le cafouillage vécu par les Lazarus représente un cas extrême. Mais sans vivre pareille situation, de plus en plus de voyageurs ressentent une bonne dose de stress quand vient le temps de filer vers l'aéroport.

Depuis un certain 11 septembre, le passage aux contrôles de sécurité s'est transformé en exercice long et fastidieux. Les aéroports sont bondés et les files d'attente, souvent interminables aux heures de pointe. Les retards se multiplient.

«C'est une époque difficile pour les passagers, et ça empirera avec le temps», dit le professeur Andrew Robert Thomas, de l'Université d'Akron (Ohio), auteur de plusieurs livres sur l'industrie aérienne.

Pourquoi un tel pessimisme? Parce qu'à moins d'une nouvelle catastrophe, le transport aérien continuera de gagner en popularité au cours des prochaines années.

Ce qui placera une pression énorme sur les infrastructures aéroportuaires du monde entier, dont plusieurs sont déjà incapables de suivre le rythme de cette croissance accélérée.

Selon les prévisions de l'Association du transport aérien international (IATA), 2,75 milliards de personnes prendront l'avion dans le monde en 2011. C'est 23% de plus qu'en 2006 et 60% de plus qu'en 2000!

Le Canada ne sera pas exclu du boom. Le nombre de passagers, qui a atteint environ 104 millions au pays l'an dernier, devrait grimper à 126 millions en 2014 puis à 145 millions en 2019, selon les prévisions de Transports Canada.

Les plus grands aéroports du pays -Toronto, Vancouver, Montréal, Calgary- se préparent déjà à cette forte hausse du trafic.

En fait, les aéroports canadiens se sont offert une véritable cure de jouvence depuis 1992, quand le gouvernement fédéral a transféré leur gestion à des entités autonomes.

Quelque 9,5 milliards de dollars ont été investis en 15 ans dans leurs infrastructures.

«Ils sont prêts pour l'avenir», lance avec assurance Jim Facette, président du Conseil des aéroports du Canada.

Les investissements ont porté leurs fruits. Malgré certaines lacunes, le modèle canadien est en général salué par les experts internationaux.

Sa force, c'est qu'il permet aux différentes administrations, comme Aéroports de Montréal, de décider elles-mêmes combien elles souhaitent investir (dans la mesure de leurs moyens), et comment.

Aux États-Unis, le secteur aérien traverse la pire crise de son histoire. Plusieurs aéroports sont surutilisés et peinent à s'adapter à la croissance rapide du nombre de passagers.

Le système de gestion du trafic est désuet et inefficace, ce qui contribue à la hausse des retards. Les voyageurs sont à cran.

Plus de 1,6 million de vols sont partis en retard pendant les 11 premiers mois de 2007, soit le quart de tous les départs. Un record de tous les temps. Et 139 000 vols ont été annulés durant cette période, plus de 2% du total!

Le risque d'une "contamination" du système aérien mondial est bien réel, disent les experts.

Car les États-Unis demeurent une plaque tournante du transport aérien international, d'où décollent et atterrissent plus de 31 000 vols tous les jours.

Chaque délai risque de provoquer un effet «boule de neige», en plus d'accroître la frustration des voyageurs.

Même si le Congrès américain décide d'ouvrir ses goussets pour améliorer les aéroports et moderniser le système de gestion du trafic aérien, il faudra de nombreuses années aux États-Unis pour rattraper le temps perdu -et se préparer à l'avenir.

Au Canada, aucune agence gouvernementale ne compile de données sur les retards dans les aéroports, un travail effectué par la Federal Aviation Administration (FAA) au sud de la frontière.

WestJet et Air Canada, les deux plus importants transporteurs au pays, refusent de divulguer quel pourcentage de leurs vols décolle à l'heure.