Jean Coutu, LE Jean Coutu, a eu des trémolos dans la voix pendant quelques secondes mardi à la fin de l'assemblée des actionnaires.

Jean Coutu, LE Jean Coutu, a eu des trémolos dans la voix pendant quelques secondes mardi à la fin de l'assemblée des actionnaires.

L'homme au sarrau blanc a passé le flambeau à son fils François Jean, qui espère maintenant faire croître l'entreprise familiale au Canada anglais.

Le nouveau président et chef de la direction de 52 ans - qui préfère le costard classique au sarrau de son père - mise sur une percée graduelle hors de nos frontières.

«C'est un peu comme l'armée qui avance, on part du Québec et on va avancer dans l'Ontario et les Maritimes, a-t-il dit à La Presse Affaires. C'est lentement mais sûrement.»

La stratégie de croissance hors Québec n'est pas encore définie. Le Groupe Jean Coutu [[|ticker sym='T.PJC.A'|]] pourrait soit ouvrir de toutes nouvelles pharmacies, soit acheter de petites chaînes ou des indépendants.

François Jean Coutu dit avoir déjà déterminé des cibles, même si aucun pourparler formel n'a été entamé.

«Je ne pourrais pas vous dire qu'il y a des discussions sérieuses, mais je connais bien tous les intervenants du domaine de la santé et de la pharmacie au Canada, et je peux vous dire que je parle souvent à ces gens-là», a-t-il mentionné.

David Hartley, de BMO Marché des capitaux, est sceptique. Les prises intéressantes sont rares dans le reste du pays, dit-il.

«Tout est possible, mais je ne miserais pas trop là-dessus, car franchement, je ne sais pas trop ce qu'ils pourraient acheter, a dit l'analyste. Ils pourraient certes acquérir de petites chaînes et des indépendants, mais la dernière fois que j'ai vérifié, ils avaient de la compétition pour ça. Et s'ils veulent partir avec des installations nouvelles dans un nouveau marché, une féroce compétition les attendra là aussi.»

M. Hartley nomme les chaînes Pharma Plus, en Ontario, et London Drugs, dans l'Ouest canadien, comme cibles potentielles. «Mais je ne crois pas qu'elles soient à vendre.»

Le Québec dans la ligne de mire

En attendant de déterminer comment - et si - il pourra croître en Ontario et ailleurs au pays, le Groupe Jean Coutu mise à fond sur le Québec.

C'est de là que viendra le gros de la croissance pour les trois prochaines années, estime François Jean Coutu, qui a présenté hier aux actionnaires les grandes lignes du plan d'affaires 2008-2010.

Au cours de la prochaine année, le groupe construira 11 nouvelles pharmacies, en déménagera 11 autres et agrandira ou rénovera 44 magasins en plus d'ajouter 20 boutiques «Passion beauté».

Un investissement de 105 millions.

En tout, la chaîne compte ajouter 50 nouvelles pharmacies d'ici trois ans au Québec.

Les marques maison seront mises à l'honneur dans tous les magasins et totaliseront 12% des ventes du groupe en 2010 plutôt que 9% aujourd'hui, espèrent les dirigeants.

Jean Coutu embauchera aussi des infirmières pour conseiller la clientèle vieillissante de ses pharmacies. L'entreprise a déjà lancé un projet-pilote dans 10 succursales et aimerait répéter l'expérience dans l'ensemble du réseau.

Rite Aid

Jean Coutu père, qui quitte la présidence de l'entreprise mais demeure à la tête du conseil d'administration, a glissé quelques mots sur la participation de Jean Coutu dans l'actionnariat de Rite Aid.

En vertu de l'entente conclue entre les deux groupes le 4 juin dernier, Jean Coutu a reçu 2,3 milliards de dollars ainsi que 32% des actions de Rite Aid en échange des pharmacies Brooks et Eckerd qu'il possédait aux États-Unis.

Les résultats de la québécoise sont désormais liés - en partie du moins - à la performance de sa consoeur américaine. Laquelle a été négative au premier trimestre de 2008.

«Les trois premiers mois sont difficiles, c'est normal, a dit M. Coutu. Pour ceux qui pensent à court terme, c'est anormal. Ce n'est pas notre façon de penser.»

Pour rassurer les actionnaires, Jean Coutu a rappelé que Rite Aid avait récemment revu à la hausse les économies qui seront générées par l'intégration des pharmacies Eckerd et Brooks.

Ces «synergies» devraient atteindre 200 millions l'an prochain, puis 300 millions l'année suivante. Et influencer positivement le cours de l'action.

Jean Coutu a dévoilé mardi ses propres résultats pour le premier trimestre de 2008. Les profits ont atteint 8,3 millions de dollars (0,03$ par action), comparativement à une perte de 142,5 millions l'an dernier, quand le groupe avait dû rayer des actifs.

Les revenus se sont chiffrés à 540,3 millions, plus que les 487,8 enregistrés l'an dernier.

Dans les magasins comparables, les ventes ont grimpé de 7,4% par rapport au premier trimestre de l'an dernier, une performance qui a satisfait les dirigeants.

Le titre de Jean Coutu a terminé la journée en baisse de 2,33% (0,31$), à 13,01$, à la Bourse de Toronto.