Le moteur de la CSeries fait un retour inattendu au Québec.

Le moteur de la CSeries fait un retour inattendu au Québec.

Pratt&Whitney Canada (P&WC) a annoncé en grande pompe hier qu'elle assemblera ce moteur dans une nouvelle usine de 300 000 pieds carrés à Mirabel. Le motoriste y assemblera également le premier rejeton d'une toute nouvelle famille de moteur, le PW810C, qui propulsera le plus gros réacteur d'affaires de Cessna, le Citation Columbus.

La nouvelle usine, qui ouvrira en septembre prochain, est la pièce maîtresse d'un vaste programme d'investissement de 575,3 millions de dollars de P&WC qui s'étalera sur les cinq prochaines années. Ce programme entraînera la création de 565 emplois, dont la moitié à Mirabel.

P&WC pourra compter sur une aide financière de 141,9 millions provenant du gouvernement du Québec. Il s'agira notamment d'une subvention de 122 millions d'Investissement Québec, de diverses mesures fiscales et d'une aide à la formation de la main-d'oeuvre.

«L'appui du gouvernement a été critique, a déclaré le président et chef de la direction de P&WC, Alain Bellemare, dans le cadre d'une conférence de presse organisée dans un hangar de Mirabel, luxueusement orné de tentures et de tapis, aux pieds d'un Boeing 747 bien lustré qui servira de banc d'essai en vol. Cela nous permettra de demeurer un moteur important de l'économie du Québec.»

Bombardier avait choisi P&WC, entreprise située à Longueuil, pour motoriser la première version de la CSeries, une nouvelle famille d'appareils de 110 à 130 places. Puis, après avoir mis le projet sur la glace, l'avionneur a mis au point une nouvelle version qui nécessitait un moteur plus puissant. Or, cette puissance allait au-delà de la limite imposée à P&WC par sa société mère, Pratt&Whitney, basée à Hartford, au Connecticut. Bombardier s'est alors tournée vers Pratt&Whitney et vers un tout nouveau type de moteur, la turbosoufflante à réducteur, mis au point à Hartford.

M. Bellemare a indiqué hier que la société mère avait décidé de confier à P&WC l'assemblage final de ce fameux moteur pour la CSeries. Toutefois, P&WC n'assemblera pas les autres moteurs de la famille des turbosoufflantes à réducteurs de Pratt&Whitney, comme celui qui équipera le Mitsubishi Regional Jet.

Pratt&Whitney hésitait entre Mirabel et une autre usine aux États-Unis pour l'assemblage final du moteur de la CSeries, le PW1524G.

L'autre moteur qui sera assemblé à Mirabel, le PW810C, a été mis au point chez P&WC. Il s'agit du plus gros moteur développé par le motoriste de Longueuil. Pour son assemblage, P&WC hésitait entre Longueuil, Mississauga et Mirabel.

Mirabel partait avec une petite longueur d'avance: en avril dernier, P&WC a annoncé qu'elle transférait à l'aéroport de Mirabel toutes les activités de ses deux centres d'essais en vol, situés à Saint-Hubert et Plattsburgh.

M. Bellemare a expliqué hier que quatre facteurs avaient fait pencher la balance en faveur de Mirabel, à commencer par ses infrastructures aéroportuaires. Le fait que la région ne soit pas densément peuplée a notamment joué un rôle dans la décision d'y transférer les activités d'essais en vol.

«Nous ne voulons pas tester nos équipements près des gens, a-t-il déclaré. Nous sommes très sensibles à cet aspect.»

M. Bellemare a indiqué que la présence d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée et d'un solide réseau d'enseignement avait également joué dans la décision de choisir la région métropolitaine.

Mirabel disposait d'un autre attrait: c'est à cet endroit que Bombardier a décidé d'assembler sa fameuse CSeries.

«Ça a été un élément déterminant», a affirmé M. Bellemare.

Il a finalement mentionné le partenariat du gouvernement, qui a été «au coeur de la décision».

Le premier ministre Jean Charest a d'ailleurs participé à la conférence de presse hier.

«C'est une chance unique, a-t-il affirmé. Une telle implantation d'activités à Mirabel, qui s'ajoute à la décision de Bombardier d'y assembler la CSeries, aura un effet d'attraction pour les investisseurs étrangers et les équipementiers étrangers», a-t-il déclaré.

Les représentants de l'industrie aéronautique québécoise qui ont assisté à l'annonce de P&WC ont affirmé qu'il s'agissait d'une bonne nouvelle, susceptible d'inciter les jeunes à se diriger vers l'aéronautique.

«C'est le temps de cogner aux portes des écoles, de s'inscrire», a déclaré le porte-parole de Bombardier Aéronautique, Marc Duchesne.

Il a rappelé que les 565 nouveaux emplois de P&WC s'ajouteront aux 3500 emplois que devrait créer la CSeries.

«Ce sont de bons emplois, valorisants, pas seulement en termes de rémunération, mais d'expérience de vie», a-t-il soutenu.