Le ralentissement économique gagne le Saguenay. Tous les grands projets d'investissement de Rio Tinto Alcan au Québec seront ralentis jusqu'à ce que le géant minier renfloue ses coffres et que les prix des métaux reviennent à des niveaux plus favorables.

Le ralentissement économique gagne le Saguenay. Tous les grands projets d'investissement de Rio Tinto Alcan au Québec seront ralentis jusqu'à ce que le géant minier renfloue ses coffres et que les prix des métaux reviennent à des niveaux plus favorables.

Le groupe australo-britannique Rio Tinto, qui détient Alcan, a annoncé hier des coupes majeures visant à contrer la «rapidité et la sévérité sans précédent du ralentissement économique mondial». Au menu: 14 000 abolitions de postes dans le monde, un budget d'investissement qui fond de moitié et des actifs «significatifs» qui seront vendus.

Au Québec, l'agrandissement de l'aluminerie d'Alma, la mise au point de la technologie AP-50 et la modernisation de la centrale hydroélectrique Shipshaw demeurent dans les cartons de Rio Tinto, mais leur développement se fera au ralenti.

«Les deux projets majeurs que nous avons au Canada, celui de Kitimat (en Colombie-Britannique) et celui de la technologie AP50 (au Saguenay), seront ralentis», a confirmé hier à La Presse Affaires Dick Evans, chef de la direction de Rio Tinto Alcan, filiale aluminium de Rio Tinto.

La modernisation de la centrale de Shipshaw se fera aussi à un rythme moins rapide que prévu et l'étude de faisabilité pour l'expansion de l'aluminerie d'Alma est mise sur la glace jusqu'à nouvel ordre.

«(Ces projets) ne seront pas stoppés, a expliqué M. Evans. Nous allons continuer à y faire travailler une masse critique de personnes parce que nous ne savons pas quand les choses vont reprendre.»

M. Evans explique que deux conditions devront être remplies avant de réappuyer sur l'accélérateur: que les prix des métaux repartent à la hausse, et que Rio Tinto rembourse une partie de sa dette.

«C'est clair que je suis inquiet, a dit hier Alain Gagnon, président du Syndicat national des employés de l'aluminium d'Arvida. Mais je considère que, dans le contexte, on est quand même bien positionnés.»

Même son de cloche du côté du président de la Fédération de la métallurgie de la CSN, Alain Lampron, qui rappelle que l'échéancier pour l'installation de la technologie AP50 avait été accéléré. «Ce que j'en comprends, c'est qu'on revient au rythme initial», dit-il, jugeant que ses membres semblent «relativement épargnés par ces premières mesures».

Le Canada évite le pire

C'est que, malgré les ralentissements, le Québec semble éviter le pire de la pluie de mesures annoncées hier pour contrer le ralentissement économique. Ailleurs, certains projets d'investissement ne seront pas retardés, mais tout simplement abandonnés.

Lesquels? Il faudra attendre le premier trimestre 2009 pour le savoir. Mais Dick Evans, président de Rio Tinto Alcan, a affirmé que ce n'était le cas d'aucun projet majeur au Canada pour l'instant.

Quelque 14 000 postes seront abolis dans le monde -dont 8500 contractuels et 5500 employés permanents- soit environ 13% de la main-d'oeuvre. Les coupes se feront «dans l'ensemble du groupe», a répondu hier l'entreprise, sans préciser combien toucheront le Canada.

Rio Tinto annonce aussi que des actifs «significatifs» supplémentaires seront mis en vente. Plusieurs analystes consultés hier par La Presse Affaires croient que les actifs d'Alcan ne seront pas vendus, mais l'un d'eux a affirmé sous le couvert de l'anonymat que l'Ironore Company of Canada, détenue à 59% par Rio Tinto et active sur la Côte-Nord et au Nouveau-Québec, pourrait bien être du lot.

M. Evans n'a pas voulu commenter ce cas particulier, mais a avoué que les actifs détenus conjointement avec d'autres pourraient être plus faciles à vendre.

«Le groupe travaille aussi activement à générer des liquidités en formant des partenariats sur les projets existants», a aussi dit l'entreprise. Un analyste cité hier par l'agence Bloomberg a jugé que l'éternel rival de Rio Tinto, BHP, pourrait en profiter pour mettre la main sur des actifs de Rio Tinto.

L'objectif des mesures est de réduire la dette de Rio Tinto, qui atteignait 38,9 milliards US à la fin d'octobre, de 10 milliards US d'ici la fin de 2009. Rio Tinto compte réduire ses coûts d'exploitation d'au moins 2,5 milliards US par année en 2010 et compresse ses dépenses en investissement de 9 milliards US à 4 milliards US en 2009.

L'action de Rio Tinto a réagi fortement aux mesures, hier, gagnant plus de 20% à Londres et 12% en Australie.

LES PLANS DE RIO TINTO

> 14 000 POSTES ABOLIS

> BAISSE DES INVESTISSEMENTS DE 5 MILLIARDS US

> RÉDUCTION DE LA DETTE DE 10 MILLIARDS US