Une crise financière peut rapidement se transformer en casse-tête géopolitique. Le gouvernement islandais en sait quelque chose.

Une crise financière peut rapidement se transformer en casse-tête géopolitique. Le gouvernement islandais en sait quelque chose.

En plus de croiser le fer avec la Grandre-Bretagne, qui réclame le remboursement des épargnes perdues par les clients anglais de banques islandaises nationalisées, Reyjavik doit soupeser l'impact qu'aurait l'obtention d'un prêt important de Moscou.

Les autorités islandaises, qui peinent à trouver l'aide qu'elles souhaitent auprès des pays «amis» européens, ont annoncé lundi le départ d'une délégation chargée de discuter des modalités d'une éventuelle injection russe de 6 milliards de dollars.

«Ce sont des discussions exploratoires. Mais les choses pourraient bouger rapidement», a déclaré hier une porte-parole du ministère des Affaires étrangères islandais.

La perspective d'une aide russe envers le pays, membre de l'OTAN, ne fait pas sourire tout le monde. Un professeur de la London School of Economics demandait sur son blogue il y a quelques jours si l'Islande songeait à permettre à Moscou d'utiliser une base aérienne qui était utilisée jusqu'en 2006 par les Américains en contrepartie de ses largesses.

Une politicienne suédoise juge pour sa part qu'une aide financière russe à l'Islande «déstabiliserait sérieusement l'équilibre (du pouvoir) dans l'hémisphère nord».

Les alliances stratégiques

Le ministère des Affaires étrangères islandais assure que l'obtention d'un prêt ne signifie d'aucune manière que le gouvernement songe à réviser ses alliances stratégiques.

Quoi qu'il en soit, la possibilité d'un apport financier massif de la Russie alimente les blagues à Reykjavik.

Vodka et transaction

«Lors d'une émission satirique dimanche, un animateur a relevé qu'il faudrait désormais boire trois vodkas avant de faire la moindre transaction à la banque», rapporte un résidant de la ville.

Certains élus islandais souhaiteraient que le pays se tourne plutôt vers le Fonds monétaire international (FMI), qui agit généralement comme un prêteur de dernier recours.

«C'est prématuré», affirme le gouvernement, qui juge la perspective embarrassante pour son image.

La crise, enfin, pourrait avoir pour effet de relancer l'idée d'une intégration de l'Islande à l'Union européenne.

L'île, férocement indépendante, a toujours rejeté cette idée. Notamment en raison de l'opposition des pêcheurs, qui craignent d'avoir à réviser les quotas de pêche.

L'adoption de l'euro, souligne les partisans de l'adhésion, mettrait le pays à l'abri des contrecoups liés à une forte dévaluation de la monnaie comme celle que connaît actuellement la couronne islandaise.