André et Monique, tous deux dans la cinquantaine, se marient cet été. Et comme ce sont des conjoints d'expérience - ils sont ensemble depuis cinq ans et sont tous deux vétérans d'un premier mariage -, ils tiennent à planifier le juste partage de leur patrimoine respectif. La pierre d'achoppement est la maison que Monique a achetée en 2004.

André et Monique, tous deux dans la cinquantaine, se marient cet été. Et comme ce sont des conjoints d'expérience - ils sont ensemble depuis cinq ans et sont tous deux vétérans d'un premier mariage -, ils tiennent à planifier le juste partage de leur patrimoine respectif. La pierre d'achoppement est la maison que Monique a achetée en 2004.

Elle désire vendre la moitié de sa propriété à André. «Nous essayons de déterminer une façon de régler la transaction qui serait équitable pour les deux, expriment-ils. Comment devons-nous nous y prendre?»

La maison, payée 135 000$, vaut maintenant environ 210 000$. Monique avait retiré 20 000$ de son REER pour verser une mise de fonds de 33 000$. Il reste encore 18 667$ à rembourser dans ce RAP. Le solde de l'hypothèque initiale de 102 000$ s'établit maintenant à 98 000$.

Le couple a préparé une proposition d'achat dans laquelle André acquerrait la moitié de la maison, soit 90 000$ sur la valeur qu'ils ont convenu de fixer à 180 000$. André prendrait en charge la moitié des paiements hypothécaires. Il rembourserait ainsi 49 000$ de capital et devrait donc verser 41 000$ à Monique. «Problème: je n'ai pas l'argent pour payer ma moitié, confie André. Et je ne peux pas hypothéquer la moitié de la maison.» Dilemme et discussions

André songe également à prendre en charge les versements de l'hypothèque actuelle jusqu'à concurrence de sa part de 90 000$. Monique n'aurait alors qu'à rembourser les 8000$ restants.

Mais comme le fait valoir Pierre Renaud, planificateur financier principal au Groupe Scotia, André aurait alors à supporter une mensualité disproportionnée, qui l'empêcherait de supporter confortablement sa part des dépenses courantes du ménage.

Un peu de calcul

La notaire Me Rima Bou Merhi, de l'étude de Me Kevork Kevorkian - cabinet fréquemment appelé à collaborer avec l'équipe de M. Renaud -, rappelle que, depuis 1989, la loi impose le partage du patrimoine familial en parts égales en cas de séparation, d'annulation, de divorce ou de décès. Ce patrimoine inclut notamment la résidence familiale et les droits acquis durant le mariage dans un régime de retraite ou la Régie des rentes du Québec.

La portion de propriété libre de dette au moment du mariage, donc la part qui appartient déjà à Monique, sera soustraite du partage à la dissolution de l'union, indique Me Bou Merhi. Monique récupérerait ainsi la valeur convenue de la propriété au moment du mariage (180 000$), moins les dettes au même moment (solde hypothécaire de 98 000$), soit 82 000$.

Comme l'explique Me Michel Beauchamp, notaire et chargé de cours en droit matrimonial à l'Université de Montréal, le RAP de Monique n'est pas une dette puisqu'elle a en quelque sorte emprunté cette somme à elle-même.

Si l'union prend fin, Monique pourrait également soustraire du patrimoine familial 45% de la plus-value réalisée sur la propriété durant l'union, soit la même proportion que la valeur nette qu'elle détenait au moment du mariage.

Considérant qu'André paiera durant le mariage sa part de l'hypothèque restante, il lui faut, pour acquérir la moitié de la résidence, verser la moitié des 82 000$ que détient présentement Monique. Il devrait donc lui donner 41 000$, transaction qui sera enregistrée devant notaire.

Parce que les deux conjoints ont fait récemment des testaments les instituant chacun légataire universel de l'autre, il semble à peu près équivalent de ne rien faire et de laisser la Loi sur le patrimoine s'appliquer. Si un conjoint décède, l'autre récupère la propriété. Si une séparation survient, les 82 000$ initiaux de Monique sont soustraits du partage.

Mais il y a une nuance importante: «La chose la plus sûre est la propriété réelle», insiste Me Beauchamp. En effet, un testament se modifie La décision du couple de partager la propriété dès le départ est donc parfaitement justifiée. L'ennui, c'est qu'André n'a pas ces 41 000$ en main. La solution suggérée à la fois par Me Beauchamp et le planificateur Pierre Renaud consiste à signer un billet à ordre, c'est-à-dire une reconnaissance de dette. Il serait établi pour la part d'André sur la valeur nette de la propriété (82 000$), soit 41 000$. Si un conjoint décède, tout revient à l'autre, ce qui élimine la dette. Si une séparation survient, Monique rappelle la dette, qui sera alors payée en numéraire ou en nature.

C'est l'équivalent d'un prêt sans intérêt accordé par Monique. «Madame perd l'intérêt sur son placement mais c'est la moins mauvaise des solutions», observe néanmoins Me Beauchamp.

Puisque des rénovations sont prévues sous peu, Pierre Renaud recommande au couple de demander en même temps une marge de crédit hypothécaire à leur institution financière. Au besoin, ils pourront ainsi soutenir des dépenses extraordinaires sans refinancer leur hypothèque. «La limite accordée à ce type de crédit flexible est généralement de 75% de la valeur marchande de la propriété, en comptant le solde hypothécaire courant, explique notre conseiller. Ils auraient immédiatement accès à 59 500$, soit 210 000$ X 75% - 98 000$.» Ils seront blindés.

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LA SITUATION

André et Monique veulent se marier, vivre dans la maison de Monique et partager équitablement sa valeur. Comment André peut-il acquérir la moitié de cette propriété, encore grevée d'une hypothèque de 98 000$?

LES DONNÉES

André, 57 ans

- Revenu annuel: 58 000$

- REER: 60 000$

Monique, 51 ans

- Revenu annuel: 42 000$

- REER: 20 000$

- Régime de retraite: estimé à 100 000$

- Résidence principale: valeur convenue de 180 000$

- Solde hypothécaire: 98 000$

- Solde du RAP: 18 667$

LA SUGGESTION

Puisqu'il contribuera au paiement du solde de l'hypothèque, le plus simple consiste, pour André, à signer une reconnaissance de dette pour sa part de la propriété, c'est-à-dire sur la moitié de la valeur nette au moment du mariage.

PIERRE RENAUD

planificateur financier principal, Groupe Scotia