Dans le domaine des finances personnelles, peu de campagnes publicitaires ont exercé une influence aussi profonde et durable que celle de Liberté 55.

Dans le domaine des finances personnelles, peu de campagnes publicitaires ont exercé une influence aussi profonde et durable que celle de Liberté 55.

Elle a réussi à créer un standard, un idéal de retraite qui exerce encore un attrait considérable.

Cependant, cet objectif d'une retraite à 55 ans est-il accessible et souhaitable? Quoi qu'il en soit, c'est celui que se sont fixé Marc et Isabelle.

Tous deux âgés de 35 ans, ils sont parents de deux enfants et sont représentants pour de grandes sociétés canadiennes.

Marc touche un salaire annuel de 62 000$, auquel s'ajoute une prime variant entre 10 000$ et 20 000$. Avec ses bonis, Isabelle gagne un revenu à peu près équivalent.

Elle compte sur un régime de retraite à prestations déterminées, mais le régime de Marc, à cotisations déterminées, s'apparente à un REER auquel contribuerait son employeur.

Ils espèrent pouvoir maintenir alors un revenu égal à 75% de celui qu'ils touchent présentement. «Nous aimons beaucoup les voyages», confient-ils. Leurs comptes REER totalisent 23 000$ pour Isabelle et 140 000$ pour Marc.

«Nous croyons notre épargne suffisante, mais l'est-elle vraiment?»

Un idéal mythique

Le planificateur indépendant Éric F. Gosselin souligne d'abord la discipline du couple, qui peut fournir un bilan et un budget détaillés.

«Ils contribuent à leurs REER, au REEE des enfants, ont accéléré le remboursement hypothécaire, souscrivent une police d'assurance vie», observe-t-il.

Leur maison, d'une valeur de 350 000$, est encore grevée d'un solde hypothécaire de 172 000$. Par contre, le chalet familial, hérité d'un parent, est libre d'hypothèque.

De son vivant, ce généreux parent a également cédé un portefeuille de placements à Isabelle, dont la valeur actuelle excède 380 000$. «Une situation financière dont bien des lecteurs aimeraient disposer», commente notre planificateur.

Comme c'est souvent le cas, une situation financière avantageuse suscite des projets ambitieux... et des doutes proportionnels: Marc et Isabelle s'inquiètent de réussir à prendre cette mythique retraite à 55 ans.

«Dans la réalité, cependant, beaucoup de gens se trouvent un peu jeunes pour totalement arrêter de travailler à un si jeune âge, indique Éric Gosselin. Alors qu'on a l'expérience, qu'on conserve l'énergie au travail, qu'on a souvent atteint le sommet salarial et que les enfants viennent de quitter le nid familial, on peut être tenté de continuer à travailler, ne serait-ce que partiellement.»

Mais ces réflexions ne surviendront sans doute qu'à proximité de l'échéance. Pour l'instant, alors que Marc et Isabelle n'ont encore que 35 ans, la retraite à 55 ans conserve tout son attrait.

Dans cet objectif, Isabelle se demande s'il serait opportun de vendre son chalet. «Est-ce une bonne option, interroge-t-elle, compte tenu de la ruée vers ce type résidence?»

Tout dépend de l'utilisation qu'ils en font, répond Éric Gosselin. S'ils le fréquentent peu, ils peuvent en effet le vendre ou le louer.

Dans ce dernier cas, suggère le planificateur, il pourrait être judicieux de transférer vers le chalet une partie du solde hypothécaire de la résidence principale, de façon à déduire les intérêts des revenus de location.

L'hypothèque pourrait alors être remboursée plus rapidement.

«La clé est là, indique-t-il. Ils finiront de rembourser l'hypothèque dans une dizaine d'années. S'ils poursuivent cette discipline en mettant de côté l'équivalent de la mensualité dans un compte de placements tel que le nouveau CELI (compte d'épargne libre d'impôt) introduit par le dernier budget fédéral, la retraite à 55 ans est possible.»

L'argent pourrait manquer

Ses calculs montrent qu'avec un train de vie équivalent à 75% des revenus du couple, l'argent commencerait à manquer vers l'âge de 82 ans.

Toutefois, ils posséderont toujours leur maison et leur chalet. À ce propos, le planificateur propose une avenue originale.

«Dès que les hypothèques auront été remboursées, le couple devrait équiper ses résidences d'une bonne marge de crédit hypothécaire, ce qui leur permettra d'avoir la retraite dorée qu'ils souhaitent», suggère-t-il.

«En effet, au lieu d'encaisser des revenus de REER, ils pourraient vivre avec ce capital, économisé au fil des ans et qu'ils habitent. Les retraits provenant d'une marge de crédit hypothécaire ne sont pas imposables et on a donc besoin d'utiliser moitié moins de capital qu'un retrait du REER.»

Bien entendu, lorsqu'une propriété se trouvera hypothéquée à hauteur de 75%, le couple devra la vendre pour acquitter sa dette. Mais Marc et Isabelle seront alors suffisamment âgés pour que la vente s'impose d'elle-même, estime le planificateur.

«La différence, c'est qu'au lieu de se retrouver avec un magot lors de la vente de la maison, au moment où l'âge nous sédentarise davantage qu'au début de la retraite, on en a profité pleinement lors des années plus actives.»

Dans ces conditions, la liberté à 55 ans est envisageable. Reste à savoir si, une fois parvenus là, Marc et Isabelle y tiendront encore.

LA SITUATION

Marc et Isabelle pourront-ils prendre cette retraite mythique à 55 ans, avec 75% de leurs revenus?

Marc

Revenu: 62 000$, plus bonis de 10 000$ à 20 000$

REER: 140 000$

Régime de retraite avec employeur: 21 000$

Aucune épargne additionnelle.

Isabelle

Revenu: 78 000$, plus bonis entre 10 000$ et 15 000$

REER: 23 000$

Épargne: 386 000$ (héritage)

Actifs

Maison évaluée à 350 000$

Solde hypothécaire: 172 000$

Chalet (héritage), valeur indéterminée, libre d'hypothèque

L'OPINION

Dès qu'ils auront terminé le remboursement de leur hypothèque, un montant équivalent à la mensualité devra être versé dans un compte d'épargne libre d'impôt (CELI).

À cette condition, la retraite à 55 ans pourrait être possible... s'ils la souhaitent toujours alors.