L'accalmie souhaitée des marchés financiers tardera encore des mois, peut-être jusqu'en fin d'année, selon les principaux banquiers canadiens réunis en conférence à Montréal, mercredi.

L'accalmie souhaitée des marchés financiers tardera encore des mois, peut-être jusqu'en fin d'année, selon les principaux banquiers canadiens réunis en conférence à Montréal, mercredi.

Entre-temps, ils estiment que les «mesures adéquates» sont prises par les principaux intervenants afin de limiter les dégâts dans le secteur financier et dans l'économie en général.

«Ça prendra du temps pour stabiliser le secteur financier, mais les bonnes décisions ont été prises jusqu'à maintenant», selon Gordon Nixon, président et chef de la direction de la Banque Royale.

«Il s'agit surtout d'une crise de liquidités, plutôt que d'une seule crise du crédit. Et comme elle vient surtout de l'immobilier résidentiel aux États-Unis, il faudra une stabilisation de ce côté avant que les marchés financiers récupèrent. Ça devrait durer jusqu'au prochain trimestre.»

Selon Bill Downe, président de la Banque de Montréal, entachée par des pertes sur les marchés depuis un an, la correction pourrait même s'avérer saine, à moyen terme.

«Après des années fortes, un rajustement de la valeur des actifs financiers était nécessaire afin de mieux refléter leur niveau de risque, dit M. Downe. Néanmoins, certains problèmes s'avèrent pires que prévu. Il faudra quelques trimestres pour qu'ils se résorbent.»

Ed Clark, président de la Banque TD, largement absente du marché des titres de crédit et moins touchée par leur dépréciation, voit même dans les tumultes financiers un certain motif d'ironie envers son secteur.

«L'histoire des banques montre qu'elles sont des machines à profits phénoménales. Sauf que tous les cinq à sept ans, elles trouvent le moyen de se faire éclater et d'être forcées à battre en retraite», a commenté M. Clark.

Le président de la TD s'est toutefois dit surpris par «le nombre élevé d'intervenants très amochés» ces temps-ci, dans le milieu financier et bancaire.

«Je suis un peu moins sûr que l'accalmie viendra rapidement. Ça peut encore survenir au second trimestre, mais ça prendra sans doute tout le reste de l'année.»

Papier commercial

La priorité des financiers canadiens demeure la restructuration des 32 milliards de dollars en papiers commerciaux adossés à des actifs (PCAA), figés depuis le mois d'août.

Et à ce titre, la Banque Nationale demeure la plus à risque parmi les principales banques canadiennes, toutes proportions gardées.

Par conséquent, le coprésident de sa filiale boursière Financière Banque Nationale, Ricardo Pascoe, a dû s'empresser de faire le point devant les financiers et investisseurs à la conférence de mercredi, à Montréal.

«Et maintenant, mon sujet préféré: le papier commercial...», a lancé M. Pascoe, qui est aussi membre du «comité Crawford» de restructuration du PCAA.

Des analystes soupçonnent la Nationale de préparer une autre perte spéciale d'environ 300 millions liée à la dépréciation de ses placements en PCAA non bancaire, qui totalisait 2,3 milliards.

Cette perte additionnelle est attendue dans ses prochains résultats trimestriels, ce qui gonflerait à près de 875 millions ses pertes liées au PCAA en quelques mois.

Mais mercredi, M. Pascoe s'est gardé de commenter ces rumeurs boursières, se déclarant plutôt «très optimiste» envers la restructuration du PCAA.

Néanmoins, il a précisé que l'inventaire de PCAA de la Nationale comprenait 55% de titres de catégorie «Leveraged Super Senior» ou LSS dans le jargon financier.

Or, selon une récente analyse de la firme américaine JP Morgan, effectuée spécialement pour le «Comité Crawford», ces papiers commerciaux de type LSS étaient dépréciés d'environ 70% au début de mars.

Pour la Nationale, selon les analystes, une telle dépréciation justifierait une autre radiation de 300 millions dans son portefeuille de PCAA.

Mais pour le patron de la Financière Banque Nationale, la qualité générale du PCAA détenu par la banque serait encore très bonne.

«Le risque de pertes additionnelles s'est amenuisé. En fait, il faudrait une importante récession aux États-Unis et en Europe, presque une dépression, pour affecter sérieusement les actifs derrière la majeure partie du PCAA détenu par la Nationale», selon M. Pascoe.

Dans l'immédiat, ses propos n'ont guère rassuré les investisseurs boursiers.

Pour la deuxième journée consécutive, mercredi, ils ont laissé choir les actions de la Nationale de plus de 2%, à 47,40$.

C'était une baisse presque deux fois pire que celle de l'indice sectoriel des services financiers à la Bourse de Toronto.