Les courtiers se sont activés jusqu'à la toute dernière seconde hier sur le parquet de la Bourse de New York, lançant des ordres au téléphone et pianotant frénétiquement sur leurs claviers. Puis la cloche a sonné, à 16 heures tapantes, sans effusion de joie ni d'émotion particulière.

Les courtiers se sont activés jusqu'à la toute dernière seconde hier sur le parquet de la Bourse de New York, lançant des ordres au téléphone et pianotant frénétiquement sur leurs claviers. Puis la cloche a sonné, à 16 heures tapantes, sans effusion de joie ni d'émotion particulière.

Dans les minutes qui ont suivi, ils ont terminé de vérifier leurs transactions, rangé leurs vestons colorés et commencé à quitter l'imposante salle des échanges. Comme si de rien n'était.

L'acceptation du plan d'aide gouvernemental de 700 milliards $ par la Chambre des représentants a visiblement surpris peu de gens hier à Wall Street. Les financiers new-yorkais interrogés par La Presse Affaires s'attendaient tous à ce que le projet soit accepté, après les conséquences catastrophiques entraînées par le rejet d'une première version lundi.

«J'étais pratiquement certain que ça allait passer ce coup-ci, a confié le vice-président d'une grosse banque qui a préféré garder l'anonymat. Ce qu'on a vu aujourd'hui, c'est un aveu qu'ils avaient pris une mauvaise décision la première fois.»

La bouée de sauvetage de 700 milliards $ ne constitue pas une «solution miracle», a tenu à préciser le financier. Loin de là. «Ça va arrêter l'hémorragie, mais ça va prendre plus que ça pour que la situation revienne à la normale. Ça va surtout prendre du temps, six, 12, 18 mois peut-être. Mais au moins, ça va ramener des liquidités dans le marché à court terme.»

Brett Hickey, président de la firme d'investissement Aegis Capital Group, croit lui aussi que le plan permettra de calmer la frénésie sans précédent observée toute la semaine sur les Bourses de la planète.

«Ça va apporter un peu de réconfort au public, a-t-il dit. Et aussi de la stabilité aux marchés financiers qui, espérons le, vont arrêter leur spirale descendante qui fait que les gens ne veulent plus consommer et réduit l'accès au crédit.»

Charles Laplante, directeur des marchés financiers chez le réassureur Swiss Re à New York, s'attendait également à un vote positif. «J'étais en faveur de ce plan depuis le début, mais je persiste à croire que ça a été mal expliqué aux Américains.»

Nervosité

Aux environs de la Bourse de New York, à l'angle de Wall Street et Broad Street, la cohue s'est poursuivie pendant toute la journée, hier, comme depuis le début de la semaine. Les touristes et journalistes étaient nombreux, tout comme les policiers aux aguets, certains armés de mitraillettes.

En matinée, pendant les heures précédant l'adoption du plan de sauvetage, la nervosité était palpable partout. Dans la rue, dans la blogosphère, sur les chaînes d'information continue, citoyens et analystes spéculaient sur les chances d'approbation du projet. Les avis étaient partagés entre les ardents défenseurs et les farouches opposants.

De nombreux Américains ont continué à marteler jusqu'à la toute dernière minute leur indignation. «Il nous reste seulement la journée d'aujourd'hui pour faire entendre notre voix au Congrès, pour leur faire savoir que d'ajouter du gras à ce plan de 700 milliards $ n'en fait pas un meilleur plan», écrivait hier matin l'auteur du blog stopthehousingbailout.com.

Les opposants en veulent à l'État d'utiliser «l'argent des contribuables» pour sauver Wall Street, selon leurs termes. Et ils semblent encore plus enragés par les nombreux ajouts le «gras» faits cette semaine au plan, comme ces crédits d'impôts offerts aux fabricants de flèches en bois pour enfants. Autant d'additions considérées comme un moyen de soudoyer certains politiciens afin d'obtenir leur appui.