Depuis un peu plus d'un mois, les prix de l'énergie, des métaux précieux et de base et de la plupart des denrées baissent à vue d'oeil, à l'exception peut-être de celui du jus d'orange.

Depuis un peu plus d'un mois, les prix de l'énergie, des métaux précieux et de base et de la plupart des denrées baissent à vue d'oeil, à l'exception peut-être de celui du jus d'orange.

L'approche de la tempête tropicale Fay des côtes de la Floride menace la récolte d'agrumes du deuxième producteur mondial après le Brésil.

Mais ne mêlons pas davantage pommes et oranges. La tendance lourde rappelle la pomme de Newton, depuis la mi-juillet.

Depuis son sommet du 11 juillet à 147,27 $ US, le prix du baril d'or noir s'est replié de 23%.

Ceux du gaz naturel, du charbon, de l'aluminium, du cuivre, et de l'argent ont aussi connu leur sommet en juillet.

Soudain, le marché est devenu baissier.

Le dollar américain remonte

La désescalade s'est amorcée au carrefour de plusieurs changements dans l'économie mondialisée.

C'est durant l'été que les investisseurs ont pleinement réalisé que l'économie américaine n'était pas la seule à traverser un grand passage à vide. Le Japon, le Royaume-Uni et la zone euro sont aussi au bord de la récession.

«Les investisseurs ont déduit que la Banque centrale européenne devra se résoudre à abaisser ses taux, explique Earl Sweet, économiste chez BMO Marché des capitaux. L'écart entre son taux directeur et celui de la Réserve fédérale va se rétrécir. Cela favorise la remontée du dollar américain, qui retrouve son statut de valeur refuge.»

Les spéculateurs qui achetaient des contrats à terme sur le pétrole ont délaissé cette pratique pour s'intéresser à nouveau au billet vert.

Mais la spéculation n'explique qu'en partie la flambée des prix de l'énergie et des métaux.

De même, elle ne peut porter la responsabilité de la rapidité du présent rajustement.

«Il existe un volet structurel qui se joint au ralentissement cyclique actuel», analyse Clément Gignac, économiste en chef et stratège à la Financière Banque Nationale. L'Agence internationale de l'énergie prévoit une légère hausse de la demande mondiale l'an prochain. Moi, je prévois une baisse.»

M. Gignac clame déjà depuis quelques semaines que le prix du brut baissera jusqu'à 80 $ US le baril d'ici un an, voire plus tôt au rythme où va sa correction. D'après lui, le prix exorbitant de l'essence le printemps dernier a amené les Américains à moins rouler cet été. Du jamais vu depuis le précédent choc pétrolier.

L'Asie écope aussi

Le ralentissement de l'économie occidentale affecte de surcroît un peu l'Asie, dont la croissance repose beaucoup sur les exportations. «Ça va prendre des années avant de revoir le prix du baril près des 150 $ US», prédit M. Gignac.

M. Sweet n'est pas vraiment d'accord. Il fait remarquer qu'un tel sommet n'aura été qu'un pic de quelques jours, un peu comme la poussée du huard à 110 cents US durant quelques minutes en Asie, le 7 novembre dernier. En fait, l'or noir s'est maintenu sur un plateau de 130 $ US durant quelques semaines. C'est de là qu'il est plus à-propos de calculer sa présente décrue.

À ses yeux, l'or noir devrait se maintenir en moyenne aux environs de 110 à 120 $ US l'an prochain, ce qui n'exclut pas quelques flirts à des niveaux beaucoup plus faibles.

Sa prévision se fonde sur le fait que la récession américaine est peu profonde, mais que la reprise sera lente. Il juge aussi que le ralentissement des pays émergents sera faible. En fait foi sa prévision d'une croissance supérieure à 9% pour la Chine.

Si elle devait plutôt ne pas atteindre 8%, comme M. Gignac tend à le croire, «alors l'économie mondiale serait dans un sale pétrin», concède M. Sweet.

Après l'orange de Floride, la pomme de Newton, voici la poire que Mathieu D'Anjou, économiste au Mouvement Desjardins, choisit de trancher en deux. «Les prix du pétrole et des métaux de base resteront à la baisse d'ici l'été prochain à cause du ralentissement économique. Après, ça devrait remonter. Mais la hausse sera peut-être plus progressive, moins spectaculaire.»

Cette remontée se ferait dans un contexte où le dollar américain ne faiblirait pas, ce qui nourrira moins la spéculation. Elle sera poussée par l'incapacité jusqu'ici des producteurs hors OPEP à augmenter leur production.