Bernard Landry estime que le projet de regroupement des Bourses de Montréal et de Toronto sera «acceptable et profitable» pourvu qu'il soit assorti de conditions et de «garanties solides».

Bernard Landry estime que le projet de regroupement des Bourses de Montréal et de Toronto sera «acceptable et profitable» pourvu qu'il soit assorti de conditions et de «garanties solides».

«Je ne crois pas qu'il faille rejeter à l'avance le projet», écrit-il en effet dans une lettre ouverte à La Presse, publiée aujourd'hui en page 8 du cahier Plus.

Selon les termes connus de l'entente, la Bourse de Montréal, qui se spécialise dans les produits dérivés depuis 1998, en conserverait l'exclusivité dans le nouvel ensemble à être créé -le Groupe TMX.

«Ce que j'ai en tête: je veux des garanties solides. Pas pour quatre ans, ou pour dix ans. En 1998, l'entente a été pour dix ans», précisait vendredi l'ex-premier ministre dans un entretien avec La Presse Affaires.

Il ajoute: «Mon inquiétude, c'est qu'on ait la chose de façon formelle, mais pas la possibilité de la gérer et de la développer.»

L'accord conclu avec Toronto en 1999, mais qui arrive à échéance en 2009, donc très bientôt, a été très bénéfique pour la Bourse de Montréal, écrit-il d'abord en substance. Et plus que l'aurait été «le commerce partagé des actions traditionnelles».

Car, note-t-il, les Bourses de produits dérivés créent elles-mêmes ces produits, leur valeur ajoutée est grande et ils sont aussi «plus lucratifs».

Pour que tout cela reste vrai dans le cadre de la transaction projetée, il faut y mettre selon lui au moins quatre grandes conditions et garanties.

À l'Autorité des marchés financiers (elle a succédé à l'ex-Commission des valeurs mobilières du Québec), il demande d'abord de scruter «soigneusement le projet» et de tenir «des audiences publiques» à ce propos, comme le veut également, d'ailleurs, le gouvernement Charest.

L'AMF jouerait ainsi «le rôle d'encadrement qui est le sien».

Puis, «il faut une assurance contractuelle solide que Montréal conservera l'exclusivité des produits dérivés (...) sous le contrôle de l'AMF», avec tous les pouvoirs requis pour en assurer le développement.

En troisième lieu, Bernard Landry, qui était ministre des Finances en 1998, sous le gouvernement Bouchard, juge qu'il est crucial que Montréal obtienne la même exclusivité «pour les nouvelles transactions à portée écologique», notamment la Bourse du carbone - le marché climatique, dit-on à la Bourse même.

«Un bel avenir se dessine dans ce secteur vital pour le sort de la planète», écrit-il.

Enfin, l'intérêt collectif étant en jeu, et non seulement celui des actionnaires, tout cela doit se faire dans «une transparence et un niveau d'éthique impeccables», poursuit-il.

«Je pense aux soi-disant apparences de délits d'initiés (...) L'honnêteté se présume, personne n'est accusé, mais c'est le rôle de l'AMF de regarder ça de près», disait-il vendredi à La Presse Affaires.

Peut-on croire que l'AMF a la volonté et l'expertise nécessaires pour encadrer efficacement le projet, à toutes ses étapes? «Je les crois prêts et capables», répond à cela Bernard Landry.

Mais, continue-t-il, si jamais l'AMF ne se montrait pas à la hauteur, l'«autorité souveraine» qu'est l'Assemblée nationale pourrait prendre le relais.

À la suite d'une entrevue accordée à Radio-Canada, mais dont ne furent utilisés que des extraits, on crut, dit-il, qu'il endossait le projet sans réserve aucune.

«La télé fait des clips, c'était comme si je disais "oui, oui, il n'y a pas de problèmes.»

Cela amena même Pauline Marois à le désavouer publiquement.

D'où, pour vraiment nuancer, sa lettre ouverte qui paraît aujourd'hui.

Enfin, conclut-il dans sa missive, toutes les garanties nécessaires obtenues, Montréal et Toronto, «toutes les deux possiblement en péril», pourraient «s'épauler dans leur intérêt mutuel».

Car péril il risque d'y avoir, juge-t-il, à cause de «la concurrence internationale», et alors que les grandes banques canadiennes entendent créer leur propre plate-forme parallèle de négociation de valeurs mobilières (Alpha).

Bernard Landry fut premier ministre du Québec de mars 2001 à avril 2003.

Enfin, la transaction doit prendre la forme d'un rachat de la Bourse de Montréal par celle de Toronto, toutes deux étant elles-mêmes cotées en Bourse.

«C'est un regroupement d'entreprises, on peut jouer sur les mots, dit le porte-parole de la Bourse de Montréal, Jean-Charles Robillard. Nous, on appelle ça un regroupement. La Bourse de Montréal reste là, le président reste là.»