Le Québec est une société distincte: plus de couples en union de fait. Plus fréquente séparation des dépenses. La façon dont un couple gère son argent a une influence marquée sur la qualité de sa relation. Et vous, êtes vous du type fusion des coeurs et des comptes ou chacun pour soi?

Le Québec est une société distincte: plus de couples en union de fait. Plus fréquente séparation des dépenses. La façon dont un couple gère son argent a une influence marquée sur la qualité de sa relation. Et vous, êtes vous du type fusion des coeurs et des comptes ou chacun pour soi?

Quatre couples au restaurant.

Le garçon apporte les additions.

Chez le premier couple, marié depuis 30 ans, l'homme saisit la note et tend sa carte de crédit.

Dans le second, la femme paie l'addition, mais ajoute: «Cette fois-ci, c'est mon tour, la prochaine fois, ce sera le tien.»

La troisième addition est séparée en deux, et chaque conjoint paie - rigoureusement - sa juste part.

Au sein du quatrième couple, l'homme dit à sa conjointe: «Je te l'offre.»

Autant de façons de payer l'addition, autant de modes de gestion au sein du couple. C'est la chercheuse Hélène Belleau, professeure à INRS-Urbanisation, Culture et Société, qui donne cet exemple. Elle vient de publier la première partie d'une large étude sur la façon dont les couples québécois gèrent leur argent. Elle a interviewé un ou deux conjoints de 38 couples. «J'ai été frappée par la grande variété des modes de gestion au Québec, observe-t-elle. Ce qui m'a mis la puce à l'oreille, c'est la façon dont les gens paient la note à la fin d'un repas.»

Le soin pointilleux avec lequel l'addition est partagée entre les convives est une autre marque de notre société distincte. «Les étrangers sont souvent un peu choqués de voir la façon dont on sépare la facture au Québec, et ils ont l'impression que nous sommes très individualistes», indique la chercheuse. En France, l'addition sera divisée en parts égales sans égard à la commande de chacun, ou encore sera payée par un seul convive, à charge de revanche.

Hélène Belleau a répertorié deux grands modes de gestion au sein d'un couple. Les dépenses sont partagées également ou au prorata des revenus. Ou alors les revenus sont mis en commun, et on divise - ou non - les surplus budgétaires.

«La gestion séparée des revenus et le partage des dépenses est le mode de gestion qui semble de plus en plus fréquent au sein des couples», observe-t-elle. «Le message égalitaire est très fort», ajoute-t-elle en riant.

Les modes de gestion, choisis consciemment ou non, «ont un impact très direct sur la vie des gens», signale-t-elle. Dans le contexte actuel de débandade boursière par exemple, un conjoint sans régime de retraite peut voir ses épargnes fortement réduites. Si le couple fonctionne avec un partage strict des dépenses, les conjoints aborderont la retraite avec des moyens très différents, «ce qui peut affecter le couple», soulève la chercheuse.

En effet, confirme le psychologue René Charue, «les gens peuvent se trouver dans une situation de désarroi, d'anxiété pénible. Les couples qui sont pris face à cette situation peuvent se rejeter la balle».

À la fois médiatrice familiale et conseillère budgétaire à l'ACEF de l'Est de Montréal, Lise Morin a souvent vu les résultats d'une mauvaise entente financière. Les dettes, notamment, viennent brouiller les cartes budgétaires: quelle part de la dette est commune ou personnelle? «Souvent, les deux auront leurs instruments de crédit, où une petite part est commune, constate-t-elle. Celui qui achète est celui qui a encore de la place sur ses cartes ou qui a encore accès au crédit. Le terrain est toujours miné quand il y a des dettes.»

En fait, il n'y a plus de mode de gestion.