Les employeurs québécois qui parrainent un régime de retraite à prestations déterminées (PD) pour leur personnel vont tenter d'obtenir des mesures exceptionnelles d'assouplissement pour faire face à la crise actuelle.

Les employeurs québécois qui parrainent un régime de retraite à prestations déterminées (PD) pour leur personnel vont tenter d'obtenir des mesures exceptionnelles d'assouplissement pour faire face à la crise actuelle.

Devant les doléances de ses membres, le Conseil du patronat du Québec (CPQ) a mandaté deux actuaires, Michel St-Germain de Mercer et Pierre Girardin d'Aon, pour explorer des avenues susceptibles d'alléger le fardeau qui menace les employeurs.

«Nous avons tenu une réunion de réflexion, fin septembre», confie Norma Kozhaya, économiste en chef du CPQ.

Hier en après-midi, le CPQ a réclamé une rencontre au cabinet du ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, Sam Hamad, avec son président, Michel Kelly-Gagnon. «La rencontre devrait avoir lieu dans la semaine du 27 octobre», assure Alexandre Boucher, attaché de presse du ministre.

Avec l'effondrement des marchés boursiers, les régimes PD font face à des déficits de solvabilité sans précédent. Ainsi, Aon estime que les 200 plus grands régimes privés PD du Royaume-Uni ont perdu 80 milliards depuis le mois d'août.

Une fois tous les trois ans au minimum, les régimes québécois doivent déposer une évaluation actuarielle à la Régie des rentes (RRQ).

Près de 200 régimes devront s'exécuter en date du 31 décembre prochain. L'évaluation montrera un déficit de solvabilité à coup sûr, déficit que l'employeur devra combler par des cotisations supplémentaires pendant une période maximale de cinq ans.

Ces cotisations d'équilibre ont pour effet de gonfler la masse salariale au moment où l'économie amorce un net ralentissement.

Depuis juin toutefois, une modification à la loi allège le fardeau des employeurs. En lieu et place de cotisations, ils peuvent déposer une lettre de crédit achetée auprès de leur prêteur. Ce titre de dette est déposé dans le régime et peut se transformer en espèces sonnantes et trébuchantes, en cas de terminaison. Il y a terminaison quand l'entreprise ferme ou si l'employeur décide de mettre fin au régime.

La lettre de crédit n'est pas pour autant une panacée, car elle ampute la marge de crédit de l'employeur. Autrement dit, la lettre lui évite d'emprunter, mais diminue sa capacité d'emprunt à d'autres fins que de combler un déficit de la caisse de retraite.

Les employeurs souhaitent certains assouplissements comme la Régie en avait consenti à titre exceptionnel en 2005. Après les mauvais résultats boursiers de 2001 et 2002 qui faisaient suite au techno-krach et la baisse fulgurante des taux d'intérêt à long terme qui avait suivi, les régimes de retraite se sont retrouvés en grande majorité en déficit de solvabilité, lors du dépôt de leur évaluation en date du 31 décembre 2004. Québec avait alors consenti que la solvabilité puisse être rétablie sur une période de 10 ans au lieu de cinq.

Les employeurs souhaitent sans doute la répétition de cet assouplissement. Ils zieutent aussi les normes ontariennes qui permettent à un régime de lisser la valeur de l'actif en prenant la moyenne des cinq dernières années plutôt que la valeur marchande en date de l'évaluation.

Cette solution dénature cependant l'objectif du test de solvabilité. Il consiste à s'assurer que la caisse du régime soit suffisamment pourvue pour faire face à tous ses engagements, présents et futurs.

Les employeurs lorgnent aussi ce qui se passe du côté des États-Unis. Pour évaluer la valeur du passif d'un régime, on prend comme étalon, le taux des obligations corporatives notées AA chez l'Oncle Sam. Au Canada, la norme, c'est grosso modo le taux des obligations à long terme du Canada, majoré de 50 centièmes.

Avec la crise du crédit, l'écart entre les obligations gouvernementales et corporatives est sans précédent. Cela a pour effet de réduire le passif des régimes de retraite américains, calculé sur une base de solvabilité. L'adoption de pareille norme requiert cependant la recommandation de l'Institut des actuaires canadien.

«On suit la situation de près, assure Mario Marchand, actuaire principal à la RRQ. En 2005, rappelez-vous que le Québec avait été le premier au Canada à mettre en place des mesures d'allégement.»