Les vagues qui secouent les marchés partout sur la planète font peur aux consommateurs canadiens, qui risquent d'être de plus en plus nombreux à cocher la case «taux fixe» lorsqu'il s'agit de négocier leur hypothèque.

Les vagues qui secouent les marchés partout sur la planète font peur aux consommateurs canadiens, qui risquent d'être de plus en plus nombreux à cocher la case «taux fixe» lorsqu'il s'agit de négocier leur hypothèque.

«Le variable a été très populaire dans la dernière année, mais là, les consommateurs vont aller vers le fixe. Ça bouge trop, les gens sont inquiets», dit Lorraine Trudeau, directrice des Centres de prêts chez Multi-prêts, une firme de courtiers hypothécaires.

Lundi, la Banque TD a annoncé qu'elle haussait de 1% les taux de ses prêts hypothécaires à taux variables, un signal a déjà été suivi par quelques institutions financières et devrait se généraliser, de l'avis des courtiers et des économistes.

Valérie Sauvé, courtière hypothécaire pour Intelligence Hypothécaire, qualifie la hausse «d'étonnante». «On s'attendait à 0,25% ou 0,50%. Mais 1%, c'est important.»

Selon elle, les taux variables, populaires jusqu'à hier, risquent d'en prendre pour leur grade auprès de ceux qui négocient une nouvelle hypothèque.

«Ça devient soudain un produit beaucoup moins intéressant. Je ne peux pas dire que le produit variable est complètement mort, mais c'est sûr que c'est très insécurisant pour les clients.»

Du jamais vu

Pour les économistes, la hausse des taux hypothécaires est une anomalie dans le contexte où le dernier mouvement du taux directeur au Canada, au printemps dernier, était vers le bas.

«C'est la première fois qu'on voit ça, dit Clément Gignac, économiste en chef et stratège à la Banque Nationale. Des baisses de taux directeurs qui se traduisent par une hausse de l'hypothèque de monsieur et madame Tout-le-Monde, moi je n'ai jamais vu ça. Jamais, jamais, jamais.»

Pour M. Gignac, la récente hausse des taux hypothécaires est un signe. «Ça veut dire que ça va mal à la shop au niveau de la transmission de la politique monétaire.»

Le responsable est évidemment la crise de liquidités. Les banques, qui font face à des coûts de financement sans cesse croissants, finissent par refiler les coûts à leurs clients via les taux hypothécaires.

«Une banque, ça fait du profit en empruntant à court terme et en prêtant à long terme», résume Martin Lefebvre, économiste principal au Mouvement Desjardins. Si emprunter à court terme coûte plus cher mais que la banque prête aux mêmes taux, l'équation ne tient plus... d'où les augmentations de taux.

Dans la boule de cristal

Mais pour ceux qui se magasinent une hypothèque, la question à cent mille dollars est bien simple: les taux vont-ils monter ou descendre?

«Difficile à dire, répond Yvan Fontaine, premier vice-président et cochef de l'investissement chez Addenda Capital. On est dans le pire de la crise du crédit, et les lendemains sont difficiles à prévoir.»

Les taux hypothécaires devraient continuer d'être tiraillés entre deux forces contraires au cours des prochains mois: la politique d'assouplissement monétaire qui devrait normalement les faire descendre, et la crise de liquidité qui prend les institutions financières à la gorge et les pousse à hausser les taux.

Qui gagnera la lutte? Dans sa boule de cristal, Mathieu d'Anjou, économiste senior au Mouvement Desjardins, voit une baisse graduelle des taux jusqu'au milieu de l'année 2009, suivi d'une remontée par la suite.

M. Fontaine, d'Addenda Capital, tient à peu près le même discours. À son avis, quelqu'un qui peut se permettre de continuer ses paiements hypothécaires même si les taux grimpent peut prendre le risque de parier sur une baisse des taux et renouveler son hypothèque à court terme... et assumer la facture si jamais la crise du crédit vient jouer les troubles fêtes.