Une autre embûche juridique s'est dressée contre la solution prochaine de la crise des 32 milliards de dollars en papier commercial non bancaire (PCAA), qui dure depuis huit mois.

Une autre embûche juridique s'est dressée contre la solution prochaine de la crise des 32 milliards de dollars en papier commercial non bancaire (PCAA), qui dure depuis huit mois.

Cette fois, le juge torontois qui supervise la phase finale de cette restructuration a décidé d'en retarder l'homologation qui était prévue dès vendredi, une semaine après un appui très majoritaire parmi tous les détenteurs de PCAA non bancaire.

La raison? Le juge a décidé d'examiner davantage les réclamations des entreprises détentrices de centaines de millions en PCAA qui s'opposent à des éléments du plan proposé par le «comité Crawford» de grands investisseurs en PCAA non bancaire.

Parmi ces entreprises, on note des québécoises très connues, comme le détaillant Jean Coutu, le voyagiste Transat AT, le constructeur Pomerleau et la société papetière Domtar.

Le groupe comprend aussi plusieurs entreprises dirigées de Toronto et de Calgary, telles que la géant aurifère Barrick Gold, le transporteur Canadien Pacifique et diverses grandes sociétés parapubliques, comme l'Agence des aéroports de Toronto.

Ces entreprises contestent surtout l'exemption de poursuites en faveur des banques et des courtiers qui leur ont vendu le PCAA non bancaire, et qui est contenue dans le plan Crawford.

Leurs récriminations ont fait l'objet d'une audience spéciale en cour à Toronto la semaine dernière, à deux jours seulement du vote déterminant des détenteurs de PCAA sur le plan de sauvetage.

Mais à ce moment, le juge Colin Campbell, de la Cour supérieure de l'Ontario, avait préféré maintenir le vote. Il s'était réservé la possibilité de réexaminer les doléances des entreprises mécontentes lors de son audience d'homologation finale du plan Crawford.

Mais mardi, lors d'une audience intérimaire, le juge a décidé de surseoir à cette autorisation finale au moins jusqu'à la semaine prochaine.

Entre-temps, il a accordé aux entreprises récalcitrantes un délai jusqu'à demain soir pour qu'elles déposent un résumé de leurs prétentions de poursuites auprès du contrôleur comptable de la restructuration du PCAA, la firme Ernst&Young.

Le juge Campbell examinera ces réclamations en cour vendredi, en plus d'un compte rendu plus détaillé du vote de la semaine dernière sur le plan Crawford, selon les catégories de détenteurs de PCAA qui se sont prononcés.

Parmi les avocats des entreprises récalcitrantes, cet autre détour juridique est considéré de bon augure pour les doléances de leurs clients contre l'immunité de poursuites prévue dans le plan Crawford.

«Le juge semble douter davantage de la validité juridique même de cette quittance judiciaire, dont la portée est telle qu'elle pourrait devenir un précédent majeur dans le droit canadien de l'insolvabilité», a indiqué Sébastien Richemont, avocat du cabinet Woods, de Montréal.

Cette firme d'avocats représente quatre sociétés québécoises (Coutu, Transat, Aéroports de Montréal et Pomerleau) et des sympathisantes, comme Domtar, qui sont aux prises avec 750 millions en PCAA vicié.

En cour à Toronto, la semaine dernière, ces entreprises avaient réclamé la préservation de leur droit de poursuivre la Banque Nationale et sa filiale boursière, la Financière Banque Nationale, qui leur ont vendu ce PCAA.

D'autres entreprises, comme Barrick Gold, avaient pour leur part manifesté la possibilité de poursuite contre les banques CIBC et HSBC, parmi les principaux «détaillants» de PCAA non bancaire dans le milieu d'affaires canadien.

Mais à la Banque Nationale, hier, on réaffirmait la bonne conduite dans la «situation du PCAA» grâce à «l'adoption de mesures spécifiques et très pertinentes pour soutenir nos clients corporatifs».

Entre-temps, «nous laissons le juge Campbell poursuivre son travail. La Banque demeure convaincue que le plan Crawford est la meilleure solution pour le PCAA», a indiqué Denis Dubé, porte-parole de la Nationale.

En tout, les récriminations d'une trentaine d'entreprises qui ont été décrites en cour la semaine dernière approchent les 3 milliards de dollars.

Selon leurs avocats, une telle somme donne un aperçu de l'ampleur des réclamations judiciaires envisagées, en cas d'amendement de la clause d'immunité de poursuites du plan Crawford.

Mais pareille décision du juge Campbell est désormais reportée à la semaine prochaine, peut-être dans deux semaines s'il l'estime nécessaire.