Marre de la politique interne? Vous n'avez pas fini. Dans les organisations matricielles d'aujourd'hui, les habiletés interpersonnelles sont plus importantes que jamais.

Marre de la politique interne? Vous n'avez pas fini. Dans les organisations matricielles d'aujourd'hui, les habiletés interpersonnelles sont plus importantes que jamais.

Selon un sondage mené en novembre 2007 par RBC, 36% des employés ont déclaré que les interactions politiques au bureau nuisaient à leur productivité. C'est presque le double d'il y a 10 ans. En 1998, 19% avaient formulé la même plainte.

Le problème n'est pas circonscrit au Canada, bien sûr. Une recherche menée en 2007 par la firme Roffey Park au Royaume-Uni a montré que la politique interne était devenue l'une des principales causes de stress des gestionnaires. Dix ans auparavant, c'était le cadet de leurs soucis.

Que s'est-il passé? Au cours de la dernière décennie, les entreprises ont aplati leur organigramme. Les filières hiérarchiques verticales ont laissé la place à des environnements matriciels valorisant l'interdépendance.

En clair, pour accomplir leurs tâches, les employés comme les cadres doivent devenir des as de l'influence, de la négociation et du réseautage. Des pros de la politique, quoi.

Fatima El-Naser (nom fictif) en sait quelque chose. Cette ingénieure de formation, qui a aussi fait des études en finances, occupe un poste de gestionnaire de personnel dans une multinationale.

«Si tu as besoin de données pour mener à bien un projet, il y a de fortes chances que tu doives t'adresser à quelqu'un dans un autre service, voire dans une autre filiale. Si tu envoies un simple courriel, bonne chance», note Mme El-Naser.

«À l'école, on te dit: sois compétente et tu grimperas les échelons. Mais en réalité, dans les grandes organisations, tu n'arriveras nulle part si tu fais juste ton job», souligne-t-elle.

Il faut connaître les bonnes personnes, savoir qui peut nous aider, être habile à convaincre et à présenter ses idées. En entreprise, les compétences sont importantes, souligne Charles Larocque, psychologue industriel. «Mais on est aussi embauchés pour notre capacité de travailler avec d'autres.»

«Personne ne se lève le matin en se disant: aujourd'hui, je vais faire des jeux politiques. Mais qu'on le veuille ou non, on utilise des stratégies d'influence», ajoute M. Larocque.

Tout le monde a un pouvoir formel et informel, explique pour sa part Michèle Poirier, CRHA. Le pouvoir formel est le capital politique que l'entreprise vous fournit et qui est associé à votre poste.

Le pouvoir informel correspond à votre propre capacité d'influence, laquelle dépend de votre personnalité et de vos habiletés politiques.

Le plus important des deux est le pouvoir informel, note Mme Poirier. «Car c'est lui qui vous permettra de décrocher des postes de plus grande responsabilité.»

Mais pourquoi la plupart des gens voient-ils la politique interne comme un obstacle à leur productivité? En un mot, parce que les relations interpersonnelles sont rarement simples.

«Faire preuve d'un bon sens politique demande un effort lorsqu'on baigne dans un milieu où il manque de liens de confiance», dit Mme Poirier, qui donne régulièrement des formations sur les stratégies d'influence.

La confiance

Quand on se sent en confiance, on ne réalise même pas qu'on s'influence les uns les autres, explique-t-elle. Mais dans le cas contraire, on est obligé d'adopter des comportements de réserve, de peser nos mots. Une situation évidemment inconfortable.

Or, il faut faire avec. Mieux vaut concentrer ses efforts à devenir habile politiquement, car nul ne peut échapper à cette facette de la vie au travail.

«À partir du moment où on occupe un poste, on est déjà en train de vivre dans la politique de l'organisation», précise Mme Poirier.

Selon la formatrice, les professionnels en début de carrière consacrent environ 80% de leur temps aux tâches techniques et 20% aux relations interpersonnelles. Ce rapport s'inverse graduellement à mesure qu'on monte dans l'entreprise.

«Au sommet, l'essentiel du boulot est de nature relationnelle», dit-elle.

Est-ce à dire que les personnes réservées, peu enclines à interagir avec les autres, sont vouées à la voie de garage en milieu professionnel? Pas du tout, estime le psychologue industriel Charles Larocque.

D'abord, les habiletés interpersonnelles ou politiques peuvent s'acquérir. Moult universités, firmes de consultants et associations professionnelles offrent des formations en relations humaines.

Mais aussi, ceux qui réussissent et qui influencent les autres ne sont pas nécessairement les plus colorés, note M. Larocque. Les habiletés politiques prennent différentes formes. La diplomatie et un bon sens de l'écoute vous feront parcourir bien du chemin.

Le mot politique vous fait toujours peur? Dites plutôt qu'il vous faut accumuler un capital «sympathique».