C'était lendemain de veille, à la reprise des activités financières hier. Le sauvetage de la banque allemande Hypo Real Estate Holdings durant le week-end a vite fait comprendre aux acteurs des marchés que le plan américain de rachat des actifs toxiques des banques n'est pas la panacée qui rétablira parmi les banques la confiance à se prêter entre elles à court terme.

C'était lendemain de veille, à la reprise des activités financières hier. Le sauvetage de la banque allemande Hypo Real Estate Holdings durant le week-end a vite fait comprendre aux acteurs des marchés que le plan américain de rachat des actifs toxiques des banques n'est pas la panacée qui rétablira parmi les banques la confiance à se prêter entre elles à court terme.

Voilà pourquoi les banquiers centraux se sont à nouveau activés comme prêteur de dernier ressort.

Avant l'ouverture des Bourses nord-américaines, la Réserve fédérale a annoncé qu'elle portait de 600 à 900 milliards US les liquidités qu'elle était disposée à prêter aux banques d'ici la fin de l'année. Elle les assure aussi que les dépôts qu'elles font à la Fed seront désormais rémunérés. C'est déjà le cas pour les banques européennes qui confient leurs réserves obligatoires ou excédentaires à la Banque centrale européenne. La BCE offre un taux de 3,25% mais prête pour un jour à 5,25%, soit un point de pourcentage de plus que son taux directeur.

Les institutions financières empilent de l'argent par crainte d'en manquer puisque personne ne prête plus qu'à des taux exorbitants. Le Libor (London Interbank Offered Rate), échéance trois mois, a atteint 4,29% hier. Il s'agit d'un sommet pour cette mesure de l'écart entre ce que la Réserve fédérale et les banques payent pour emprunter.

Écard TED élevé

L'écart TED, qui mesure la différence entre ce qu'il en coûte au Trésor américain et aux banques pour lever des capitaux, est quant à lui monté jusqu'à 394 points centésimaux durant la journée. Il s'agit de l'écart le plus élevé depuis que l'agence Bloomberg à commencé à compiler cette mesure en 1984.

Il a un peu fléchi par suite de l'annonce de la Fed.

Les banques canadiennes subissent aussi les contre-coups des difficultés des banques américaines et européennes à se capitaliser ou à se financer.

La semaine dernière, la Banque de Nouvelle-Écosse est parvenue à financer sur le marché 950 millions de dette subordonnée. L'émission venant à échéance dans 10 ans lui coûte 6% par année. Les obligations du Canada pour la même échéance offrent un rendement sous les 4%.

Chez Desjardins, on se voulait rassurant hier. «Notre stratégie d'allonger les échéances porte fruit», disait hier en entrevue, Jacques Descôteaux, premier vice-président Trésorerie. Notre position demeure excellente en termes de liquidités.

L'institution lévisienne a emprunté 750 millions en euros, plus tôt cette année, avant que les marchés figent.

4 milliards aux enchères

La Banque du Canada mettra aujourd'hui 4 milliards aux enchères. Il s'agit de prises en pension spéciales venant à échéance le 9 janvier.

La Banque avait aussi procédé la semaine dernière à des enchères de 4 milliards, initialement prévues à 2 milliards.

Signe que les banques canadiennes se regardent elles aussi en chiens de faïence, la Banque a dû augmenter ses prises en pension d'un jour depuis la semaine dernière: 610 millions jeudi, 1,35 milliard vendredi, 2,8 milliards, hier.

Pour tenter de rouvrir le robinet des liquidités, elle accepte à titre exceptionnel en nantissement du papier commercial émis par les banques. Elle se prend par contre une marge de sécurité de 22,5%. Autrement dit, si un grand courtier en nantissement du papier commercial émis par une banque dont la valeur nominale est de un million, la banque centrale l'évaluera à seulement 775 000$.

Pour donner une idée de l'ampleur de la marge, la Banque prend 7,5% seulement lors du dépôt d'une obligation bancaire.

Au coeur du problème, croit Michel Doucet, vice-président groupe conseil en portefeuilles chez Valeurs mobilières Desjardins, «ce sont les banques américaines qui manquent d'argent. Les produits structurés, c'est 200 billions (200 000 milliards), le plan Paulson, c'est 700 milliards pour les actifs toxiques et 150 milliards de saupoudrage».

Les investisseurs s'inquiètent aussi du temps qu'il faudra avant que le plan soit vraiment sur les rails. On parle de quelques semaines, un mois peut-être.

Entre-temps, ce sont non seulement les banques qui étouffent, mais aussi les municipalités qui ne peuvent emprunter pour financer leurs affaires courantes.

Les entreprises aussi éprouvent des difficultés à se procurer des liquidités alors que rien dans la gamme de mesures lancées par la Fed ou par le Trésor ne peut leur être utile à court terme.

«Il est probable que nous soyons dans l'oeil de l'ouragan, juge François Barrière, vice-président développement des affaires, marchés internationaux à la Banque Laurentienne. On vient de passer la moitié du problème.»

1100 milliards $USValeur des dépôts assurés aux États-Unis par le Federal Deposit Insurance Corp (FDIC).

140 à 200 milliards $US

Indemnités versées par le FDIC d'ici la fin de la crise financière, selon une étude de l'Université d'État de la Louisiane.

1%

Proportion des 8500 banques américaines figurant sur la liste noire de la FDIC.

426

Nombre de banques et de caisses d'épargne aux prises avec des «problèmes majeurs» aux États-Unis, selon Bauer Financial.

Hausse de taux hypothécairesLa difficulté pour les banques à obtenir du crédit justifie, selon TD Canada Trust, une hausse de ses prêts hypothécaires à taux variable. L'augmentation, annoncée en fin de journée hier, s'applique dès aujourd'hui. Elle est de 1%. «Bien que TD Canada Trust s'efforce de ne pas transmettre les hausses de taux à ses clients, écrit l'institution dans un communiqué, ce changement reflète les coûts sans cesse croissants du financement dans l'environnement économique actuel.»

Outre les prêts hypothécaires, les lignes de crédit à taux variables sur la valeur d'une maison sont aussi en hausse de 1%. Au moment de mettre sous presse, TD Canada Trust était la seule institution à avoir fait une telle annonce. - S.P.

Avec Associated Press