Malgré des données qui témoignent de la vitalité de l'économie canadienne, le huard a été malmené mardi sur le marché des changes.

Malgré des données qui témoignent de la vitalité de l'économie canadienne, le huard a été malmené mardi sur le marché des changes.

Notre monnaie a perdu 85 centièmes d'équivalence face au billet vert américain au cours d'une séance plutôt calme. Il cotait 94,02 cents US à la clôture.

«Ça ne va pas créer de tendance, insiste François Barrière, vice-président développement marchés internationaux à la Banque Laurentienne. C'est du bruit sur les lignes de côté. Ça peut changer demain.»

La présente crise de liquidités incite les cambistes à la prudence d'ici à ce qu'on y voit mieux.

«Le dollar canadien restera sous pression tant que la situation du papier commercial adossé sur des actifs (PCAA) ne sera pas résorbée», croit pour sa part Hughes Lajeunesse, vice-président principal change étranger à BNP Paribas.

Ce qui a pu jouer hier contre la devise, c'est à la fois les paris de certains spéculateurs américains sur une baisse du taux directeur de la Banque du Canada d'ici la fin de l'année et l'annonce que l'ouragan Dean devrait épargner les États américains du golfe du Mexique où est pompé 25% de l'or noir des États-Unis et raffiné la moitié de son essence.

À New York le prix du baril est passé sous la barre des 70$ américains tandis que celui du gaz naturel faiblissait. De quoi plomber le huard en somme.

En revanche, rien ne permet d'affirmer que la Banque du Canada soit sur le point de renoncer à son désir de mater l'inflation qui, à 2,2% pour un quatrième mois d'affilée en juillet, dépasse sa cible de 2%.

«Elle n'a encore aucune donnée sur les conséquences de la crise actuelle du crédit, fait remarquer Benoit P. Durocher, économiste chez Desjardins. Il serait plus sage de patienter d'autant plus qu'elle avait annoncé que peut-être une seule hausse de plus serait nécessaire» pour ramener l'inflation à sa cible.

Le 10 juillet, la Banque avait porté à 4,5% son taux directeur après être restée en touche durant 14 mois.

Les chiffres d'inflation publiés hier sont conformes aux prévisions tant pour la progression générale des prix à la consommation que pour l'indice de référence (IPCX) qui en exclut les huit composantes les plus volatiles.

Même s'il a reculé de 2,5% à 2,3% en juillet, l'IPCX demeure ancré au-dessus de la cible depuis plusieurs mois.

C'est encore une fois le coût de remplacement des maisons qui stimule surtout les pressions inflationnistes. Mince consolation, la progression des prix ralentit en Alberta, principal foyer de l'érosion du pouvoir d'achat au pays.

Curieux paradoxe, Statistique Canada fait remarquer que c'est le coût d'intérêt hypothécaire qui nourrissait le plus la hausse du prix des logement en juillet plutôt que l'augmentation de la taille des hypothèques.

Il est passé de 5,7% à 6% en juillet, ce qui reflète le tour de vis de la banque centrale qui entraîne la hausse automatique des hypothèques à taux variable.

«Les prix des aliments à la hausse et les salaires qui augmentent, l'inflation n'est pas près de reculer sans l'action de la Banque du Canada», prévient Jacqui Douglas, stratège économique chez TD Valeurs mobilières.

Comme ses pairs, elle croit que la présente crise de liquidités obligera la Banque à reporter sa hausse de taux initialement prévue le 5 septembre.

«Les indicateurs d'inflation sont à l'arrière-plan des préoccupations des banques centrales», résume Marc Pinsonnault, économiste à la Financière Banque Nationale.

N'empêche. Les chiffres de ventes au détail publiées mardi suggèrent que l'économie canadienne a sans doute progressé au-delà de son rythme optimal non inflationniste de 2,8% au deuxième trimestre.

Statistique Canada révélait qu'elles ont reculé de 0,9% en juin soit un peu plus que prévu. Mais pour l'ensemble du trimestre, elles ont crû en dollars constants au rythme annuel de 10,8%.

C'était du jamais-vu depuis le quatrième trimestre 2001 qui marquait la relance après la tragédie américaine du 11 septembre.