Vous voulez que votre équipe soit heureuse et productive au travail? Visez le ventre.

Vous voulez que votre équipe soit heureuse et productive au travail? Visez le ventre.

En entrant à l'agence de publicité Sid Lee, on se retrouve dans un bistro. C'est la «cafétéria» des quelque 175 employés. Matin et midi, ils s'y donnent rendez-vous pour casser la croûte.

Vaste choix de pains Première Moisson, céréales chaudes et cafés spécialisés au petit déjeuner. Magret de canard, fusilli au saumon fumé et curry rouge au requin pour le lunch.

«Le bistro, c'est le coeur de notre firme», n'hésite pas à dire la vice-présidente de Sid Lee, Pétula Bouchard. «C'est aussi notre image de partage, notre lieu de regroupement privilégié.»

Lauréate de nombreux prix, l'agence s'est dotée de ce bistro dès ses modestes débuts, en 1993. Faut-il faire un lien avec son succès?

«On se préoccupe du mieux-être de nos gens de bien des façons. Tout cela a un impact sur la qualité de leur présence, leur créativité», estime l'associée.

Investir dans la saine alimentation de ses troupes, un concept rentable? L'idée n'est pas neuve: une armée marche à son estomac, disait Napoléon. Malheureusement, peu d'entreprises le voient ainsi, déplore Michel Asselin, président de Prima Selec, une PME de services alimentaires qui refuse de faire dans le bas de gamme.

Une «oasis»

«Il faut convaincre les gestionnaires qu'une aire de restauration est une oasis», dit-il. Selon lui, certains ne regardent que la facture.

«Je vois encore des cafétérias qui servent des pogos et de la poutine. Comment le personnel peut-il être productif l'après-midi? C'est impossible.»

L'entrepreneur avance d'autres arguments économiques en faveur de la qualité. «Les employés qui apprécient leur cafétéria sortent moins. Il y a aussi des coûts quand votre personnel étend continuellement son heure de lunch en allant prendre ses repas à l'extérieur», souligne M. Asselin.

Au Cirque du Soleil, la cafétéria des 1700 employés fait l'envie des visiteurs. Lors du passage de La Presse Affaires, on y servait un carré d'agneau, un plat de tofu et de l'émincé de veau forestière. Bien sûr, on y proposait aussi une variété de sandwichs et de potages. Sans oublier le buffet à fromages et à salades. Alouette.

«La cuisine fait partie de l'essor de l'entreprise», avance François Martin, le dynamique chef qui officie depuis 12 ans au siège social du Cirque.

«Avec la nourriture, c'est le coeur et le ventre qu'on nourrit.»

Pour allécher sa clientèle, le chef multiplie les astuces. D'abord, il donne des noms singuliers à ses plats. L'employé qui lit sur l'intranet qu'il y a des burritos du jardin de l'Arctique au menu doit venir sur place pour satisfaire sa curiosité.

À moins qu'il ne soit d'abord attiré par les arômes. Car François Martin ferme parfois à dessein les ventilateurs de ses cuisines.

Le chef insiste aussi sur la variété. Après tout, sa clientèle est toujours la même, dit-il. Il touche un point.

Les Laboratoires Druide se sont déjà offert les services d'un cuisinier qui concoctait des repas sains pour l'équipe d'une quinzaine de personnes. Une expérience qui a laissé de bonnes traces, au dire du président, Alain Renaud.

Le projet a cependant pris fin après un an et demi. Pour un ensemble de raisons, se rappelle M. Renaud. Entre autres, le renouvellement du menu n'était pas à la hauteur des attentes des gens. Autrement, les avantages étaient nombreux, à commencer par les économies de temps qui amélioraient la qualité de vie du personnel.

La beauté, c'est que l'entreprise et ses employés n'ont pas à y laisser leur chemise. Par exemple, au Cirque du Soleil, la compagnie fournit uniquement les infrastructures majeures de la cafétéria. Les recettes du tiroir-caisse suffisent à payer les salaires, les denrées et tous les petits équipements tels que la vaisselle.

Comment le chef fait-il, avec des menus gastronomiques à 6,75$?

«On ne jette rien. Par exemple, les muffins non vendus peuvent être intégrés à un dessert, ni vu ni connu.» Bref, François Martin doit jongler.

«Mais c'est l'fun, dit-il. Du moins, jusqu'à ce qu'un client nous demande la recette!»

Vous réaménagez votre cafétéria?Les consommateurs recherchent avant tout une impression de fraîcheur, souligne Catherine Crowe, coordonnatrice, études, de Bernard & Associés, consultants en aménagement de services alimentaires.

Les gens apprécient les mets dont la cuisson ou la préparation est achevée sous leurs yeux. La popularité des comptoirs de sandwicherie en témoigne.

«Loin de perdre du terrain, les paninis deviennent de plus en plus tendance, avec du pesto et du chèvre, par exemple», note Mme Crowe. Les menus à thème plaisent aussi énormément.

«Plus on a de variété, plus on fidélise notre clientèle. Et c'est bon pour le moral des troupes.»