Coup de théâtre chez Neurochem (T.NRM): après avoir visé sans succès les tablettes des pharmacies, la biotech de Laval reluque maintenant celles... des boutiques d'aliments naturels. Un chamboulement du modèle d'affaires censé renflouer les coffres, mais qui laisse pour l'instant le marché sceptique.

Coup de théâtre chez Neurochem [[|ticker sym='T.NRM'|]]: après avoir visé sans succès les tablettes des pharmacies, la biotech de Laval reluque maintenant celles... des boutiques d'aliments naturels. Un chamboulement du modèle d'affaires censé renflouer les coffres, mais qui laisse pour l'instant le marché sceptique.

Plusieurs considèrent l'avenir de Neurochem comme incertain depuis l'échec en août dernier de l'Alzhemed, son produit contre l'alzheimer. Neurochem a annoncé jeudi qu'elle mettait la hache dans ce programme, interrompant l'étude clinique actuellement en cours en Europe pour éviter qu'elle ne se termine en queue de poisson comme celle qui vient de prendre fin en Amérique du Nord.

La mort de l'Alzhemed? Pourtant non. Neurochem a annoncé hier qu'elle s'apprêter à créer une nouvelle compagnie affiliée chargée de commercialiser le produit... sous forme de supplément alimentaire. «Nous cherchons actuellement un président et chef de la direction, qui recrutera ensuite une équipe», a dit hier le grand patron de Neurochem, Francesco Bellini.

«Notre modèle d'affaires s'éloigne de la stratégie traditionnelle des entreprises biopharmaceutiques», a-t-il aussi annoncé à la communauté financière.

Le raisonnement est basé sur le fait que l'ingrédient actif de l'Alzhemed, le tramiprosate, existe à l'état naturel dans certaines algues. Et si l'Alzhemed n'est pas parvenu à convaincre les autorités qu'il peut traiter l'alzheimer, les résultats ont démontré qu'il diminuait l'atrophie de l'hippocampe, une partie du cerveau liée à la mémoire.

«Nous ne pourrons pas spécifiquement dire que le produit est pour l'alzheimer, admet le président. Mais on pourra écrire quelque chose comme: il aide la mémoire».

Il explique que son modèle d'affaires est inspiré de celui d'Æterna Zentaris, une biotech de Québec qui a longtemps compté sur une division cosmétique et nutraceutique pour générer les fonds nécessaire à la recherche, et qui est devenue depuis la compagnie Atrium.

«Vous connaissez le ginkgo biloba? Le marché mondial atteint presqu'un milliard de dollars», a lancé jeudi à La Presse Affaires le docteur Bellini, affirmant qu'il est encore trop tôt pour estimer le marché de l'Alzhemed comme supplément nutritif.

Le marché a réagi sans enthousiasme, hier, le titre de Neurochem perdant 3 cents à 3,28$. Philippa Flint, analyste chez RBC Marchés des capitaux, s'est montrée cinglante envers la nouvelle tactique de Neurochem. «Nous considérons cela comme une stratégie de dernière chance visant à générer de la valeur à partir d'un composé qui a échoué», écrit-elle dans une note aux investisseurs.

«La stratégie nutraceutique renforce notre point de vue selon lequel l'Alzhemed ne parvient pas à rencontrer les exigences d'une recherche scientifique de bonne qualité, continue l'analyste. Nous recommandons aux investisseurs de vendre leurs actions.»

Une solution «un peu tirée par les cheveux», a aussi commenté une autre source qui suit de près l'entreprise.

Luc Vaugeois, consultant en biotechnologie, se réjouit au contraire de voir Neurochem chercher à financer ses activités de recherche par des activités connexes, lui qui reproche aux biotechs de ne penser qu'à frapper le grand coup avec un médicament vedette.

Neurochem a par ailleurs annoncé qu'elle ne désespérait pas de mettre un médicament contre l'Alzheimer sur le marché. Un nouveau poulain, le NRM-8499, débutera ses premiers tests sur les animaux l'an prochain à ce sujet.

Avec La Presse Canadienne