Depuis le début du procès pénal de Vincent Lacroix au palais de justice de Montréal, une avalanche de chiffres s'est abattue sur le tribunal, mais cette réalité n'a jamais été aussi vraie que lundi matin.

Depuis le début du procès pénal de Vincent Lacroix au palais de justice de Montréal, une avalanche de chiffres s'est abattue sur le tribunal, mais cette réalité n'a jamais été aussi vraie que lundi matin.

Devant le juge Claude Leblond, de la Cour du Québec, on assiste au dernier témoignage de la poursuite avec Guylaine Leclerc, patronne de la firme Leclerc Juricomptables.

Son mandat: étayer les chefs d'accusation 28 à 36 (sur 51) afin de démontrer que Vincent Lacroix et Norbourg ont déposé des faux états financiers à l'Autorité des marchés financiers de 2000 à 2005.

Une fois déclarée témoin-expert en juricomptabilité, Mme Leclerc s'est mise à table avec une foule de documents mais aussi une présentation PowerPoint afin d'alléger la manipulation de documents.

En matinée, l'experte s'est attaquée aux bilans financiers de 2000 et 2001 déposés par Norbourg Services Financiers, la compagnie de Vincent Lacroix subséquemment rebaptisée Norbourg Gestion d'actifs.

Guylaine Leclerc a estimé essentielle la falsification des données pour justifier les sommes qui entraient dans les comptes bancaires de Norbourg. Vincent Lacroix et ses collaborateurs devaient prouver la provenance de l'argent, prétendant avoir fait des apports de capital afin d'investir dans Norbourg. En vérité, l'argent venait des retraits irréguliers faits dans les fonds auprès du gardien de valeurs Northern Trust.

Ainsi, la compagnie déclarait qu'au 30 juin 2000, il existait un capital-actions de 800 100 $, avec une injection d'argent de 706 846 $ pendant l'exercice. L'enquête a toutefois révélé que seulement 310 100 $ étaient légitimes, alors que 490 000 $ provenaient de retraits irréguliers faits chez Northern Trust.

Cette dernière somme s'avérait une correction comptable par Mme Leclerc, qui considère que c'est une «somme due aux investisseurs».

Un an plus tard, le bilan de Norbourg Services Financiers gonflait. L'enquête porte à croire que seulement 717 740 $ ont été investis de façon légitime alors que 3,84 M$ sont dus aux investisseurs en date du 30 juin 2001.

En 2003, ce montant grimpait à un peu plus de 10 M$, incluant de simulation de revenus de 1,26 M$ de gestion privée. Plus tôt dans le procès, l'AMF a affirmé avec sa preuve que Vincent Lacroix a divulgué de faux documents afin de prétendre qu'il gérait des fortunes privées pour des clients plus riches que la moyenne.

Rappelons que plusieurs anciens collaborateurs comme Mario Lavallée, entre autres, ont dit auparavant que la rumeur voulait que Vincent Lacroix et sa famille investissaient massivement eux-mêmes pour financer la croissance rapide et les acquisitions de Norbourg.

Le témoignage de Mme Leclerc risque d'être fort crédible aux yeux du juge Leblond. La juricomptable a travaillé à titre de consultante et ensuite d'employée pour la Sûreté du Québec dans les années 1990, avant de fonder Leclerc Juricomptables en 1997.

Son premier client après avoir donné naissance à sa firme ? La Gendarmerie royale du Canada, qui lui a demandé de mettre sur pied sa juricomptabilité au niveau national.

Guylaine Leclerc est aussi habituée à témoigner à titre d'experte, l'ayant fait à de multiples reprises en Cour du Québec, en Cour supérieure et même lors des travaux de commissions comme celle sur la Gaspésia.

Mme Leclerc a enquêté sur Norbourg lors de l'enquête administrative de 2004. En août 2005, elle prenait la direction de l'enquête qui a mené aux perquisitions ayant fait éclater le scandale Norbourg sur la place publique.

Vincent Lacroix fait face à 51 chefs d'accusation pour avoir fait 115 M$ de retraits irréguliers et falsifié 111 documents. L'AMF demande une peine de 5 ans moins un jour de prison et une amende de 5 M$ pour chaque chef.