Elle hésite. Elle tergiverse. Elle s'inquiète.

Elle hésite. Elle tergiverse. Elle s'inquiète.

Séparée depuis septembre dernier, Carole a tiré 93 000 $ de la vente de la maison familiale, dont il a fallu soustraire les frais pour le déménagement et un nouveau mobilier. «Il me reste 70 000 $ que j'aimerais investir, mais j'ai un peu peur», confie-t-elle.

Mère de deux adolescentes, la femme de 47 ans paie 850 $ pour son logement, une somme qu'elle estimerait plus judicieusement employée dans le remboursement d'une hypothèque. Elle songe à l'achat d'un triplex ou d'un quadruplex relativement récent, dans la région de Sherbrooke, où elle habite.

«Bien sûr, je préférerais un bâtiment plus vieux pour le cachet, mais les réparations me font un peu peur, poursuit-elle. Je pensais y investir 50 000 $ et conserver 20 000 $ pour les imprévus.»

Carole prévoit acquérir un immeuble de 350 000 $ à 400 000 $ et ne payer qu'environ 500 $ par mois pour le logement qu'elle y occuperait. «J'aimerais beaucoup qu'un planificateur financier examine ma situation, car je crains de prendre la mauvaise décision», exprime-t-elle. Quelques calculs...

Le planificateur financier Dany Boilard, de BMO Groupe financier, a d'abord confirmé la justesse de l'objectif : une cible de 350 000 $ à 400 000 $ est raisonnable et conforme au marché immobilier sherbrookois.

Pour les fins de ses calculs, il retient le prix de 350 000 $ pour l'achat d'un quadruplex en bon état, dans un quartier intéressant. Il suppose une mise de fonds de 52 000 $. Cette somme permet d'atteindre le seuil de 15 % du prix d'achat et d'épargner ainsi 750 $ sur la prime d'assurance prêt hypothécaire de la SCHL.

Il faudra encore soustraire les frais de notaire d'environ 1000 $, des droits de mutation de 3000 $, et des frais de dossier à la SCHL de 600 $. De ses 70 000 $ de liquidités, Carole conserverait donc 12 900 $ en fonds d'urgence.

Avec la prime de la SCHL, elle devrait donc contracter une hypothèque de 303 170 $.

«Avec les taux d'intérêt actuels, le paiement mensuel serait de 1800 $ et les dépenses normales d'opération — taxes foncières, assurance et entretien — atteindraient environ 10 500 $ par année», estime notre conseiller. Les frais généraux avoisineraient ainsi 32 100 $ par année.

Bien sûr, Carole en tirerait des revenus de location. Dany Boilard pose l'hypothèse de trois loyers de 700 $ par mois, pour des revenus de location de 25 200 $ par année. La différence avec les dépenses s'établit à 6900 $, ce qui représente pour Carole un loyer de 575 $ par mois.

Carole devra payer de l'impôt sur ses revenus de location. Elle pourra toutefois déduire 75 % (trois logements sur quatre) des dépenses d'opération et des intérêts versés. En supposant un taux marginal d'imposition de 38 %, Carole devrait verser 2250 $ au fisc.

Cette somme représente 187 $ par mois à ajouter à son paiement mensuel de 575 $, pour un total de 762 $ — un montant inférieur au loyer actuel de Carole, souligne Dany Boilard, mais supérieur à ses attentes.

Autres solutions

Pour réduire cette mensualité, Carole pourrait appliquer une mise de fonds supérieure, mais elle ne disposerait alors plus de son fonds de sécurité, fort utile en cas d'imprévus avec l'immeuble.

Elle pourrait également décider d'utiliser la déduction pour amortissement sur l'immeuble afin de réduire l'impôt exigible. Parce que l'immeuble se détériore au fil du temps, son coût en capital peut en effet être déduit des revenus, en le répartissant sur une période de plusieurs années.

«Le problème, c'est que la valeur de son immeuble va fort probablement augmenter, signale M. Boilard. L'amortissement qui aura été déduit sera pleinement imposable dans l'année de la vente de l'immeuble. La combinaison du gain en capital réalisé et de la récupération de l'amortissement pourrait obliger Carole à rembourser sa pension de vieillesse.»

Carole a avancé l'hypothèse d'un achat commun avec une ou deux autres personnes. Si le copropriétaire habite lui aussi l'immeuble, cette avenue présente l'inconvénient de réduire les revenus de location et les dépenses admissibles. Il faut en outre prévoir un contrat en béton, qui considère les éventualités de faillite, de décès ou de mésentente.

Comme le fait valoir Dany Boilard, la possession d'un immeuble de rapport permet de diversifier les sources de revenus à la retraite. «Si jamais les revenus de Carole sont insuffisants une fois la retraite venue, elle pourrait réhypothéquer son immeuble de façon à étaler le solde de l'hypothèque sur une nouvelle période de 25 ans», mentionne le conseiller.

Un autre problème se profile. Après une rencontre destinée à mieux cerner les paramètres de la situation, «Carole a réalisé qu'elle n'avait ni le temps, ni les compétences, et encore moins la patience de régler les conflits entre voisins», raconte le conseiller.

Elle pourrait bien sûr prendre ses distances avec les problèmes en achetant un immeuble plus modeste dans lequel elle ne résiderait pas. Mais Dany Boilard avance une dernière suggestion, plus simple et peut-être plus en harmonie avec les inquiétudes exprimées par Carole.

Son capital pourrait plutôt être investi dans des fonds de revenu mensuel. «Je compare souvent ce type de placement à un immeuble, explique-t-il. J'ai des revenus fixes et réguliers mais peu imposables et mon capital à long terme garde sa valeur.»

Les 70 000 $ de Carole lui assureraient un revenu mensuel après impôt d'au moins 300 $.

«L'avantage, fait valoir M. Boilard, c'est que je n'ai pas de locataires, ni de problèmes de plomberie et en plus, mon placement est beaucoup plus liquide.»