Les chiffres ne mentent pas. D'année en année, les entreprises canadiennes perdent de leur compétitivité face à leurs rivales étrangères.

Les chiffres ne mentent pas. D'année en année, les entreprises canadiennes perdent de leur compétitivité face à leurs rivales étrangères.

Et leurs investissements dans de nouvelles technologies susceptibles de renverser la vapeur sont également en baisse. De quoi faire craindre le pire, affirme David Ticoll, directeur général de l'Association canadienne de la technologie de l'information (ACTI).

«Je ne connais pas beaucoup de gens qui travaillent présentement dans les TI (technologies de l'information) au Canada qui souhaitent que leurs enfants étudient à leur tour dans ce domaine, dit-il. Pas seulement parce qu'ils craignent que tous les emplois finissent par être transférés en Asie. Mais parce que les entrepreneurs canadiens ne valorisent pas assez les postes de haute direction relatifs au département des TI de leur entreprise.»

Pourtant, la demande pour des services informatiques est en nette croissance, au pays. Depuis le creux connu en 2002, ce secteur a crû à une vitesse qui lui a permis de rattraper le retard subi à ce moment, et de le surpasser.

C'est l'investissement dans la recherche et développement (R&D) qui est en chute libre. S'il se situait à environ 65 % de l'investissement fait par les entreprises américaines il y a cinq ans, cet investissement a chuté, l'an dernier, à moins de 50 %.

Un filon méconnu

«Les technologies auxquelles toutes les entreprises ont accès ne sont pas un avantage concurrentiel, explique M. Ticoll. Ce sont celles qui sont exclusives à une seule entreprise, dans un marché donné, qui lui permet d'être plus performante que les autres. Et au Canada, on investit très peu à ce niveau.»

Le directeur de l'ACTI cite en exemple Belair Direct, une société d'assurances passée aux mains d'intérêts étrangers il y a quelques années et qui vient de mettre en place un site web où ses clients potentiels peuvent comparer des soumissions faites par Belair et par ses concurrents.

«C'est un service qui est exclusif. Belair Direct l'a empruntée à Progressive.com, la société d'assurances américaine qui a développé cette technologie, et qui connaît un succès fou aux États-Unis.»

En investissant dans une technologie jusque-là inédite, Progressive a donc été en mesure d'accroître sa clientèle. Et elle peut désormais exploiter un nouveau filon: louer cet outil à d'autres entreprises dans son domaine.

Or, c'est là le problème. On voit souvent des entreprises canadiennes qui utilisent de la sorte des nouvelles technologies empruntées à des sociétés étrangères pour se démarquer sur le marché local, mais on voit beaucoup plus rarement l'inverse.

«Dans un marché de plus en plus mondialisé, ça n'a aucun sens. Le Canada ne possède aucune entreprise technologique d'influence mondiale, à part peut-être RIM, dit M. Ticoll. Il n'existe pas encore de Google canadien.»

L'avantage canadien

L'un des plus proches collaborateurs de David Ticoll à l'ACTI est Robert Courteau, président de la filiale canadienne de SAP, l'un des plus importants fournisseurs de solutions informatiques pour entreprises dans le monde.

Sans être aussi alarmiste, M. Courteau trouve lui aussi que les entreprises canadiennes ne profitent pas assez des avantages naturels qu'ils possèdent sur le reste du monde.

«Notre situation à proximité du marché américain est un atout indéniable, et notre culture fait l'envie d'à peu près tous les autres pays. C'est simple, le monde entier aime travailler avec les entrepreneurs canadiens!», a-t-il déclaré à l'occasion du Sapphire, sorte de congrès annuel nord-américain de SAP.

«Il faut élargir nos horizons au-delà de nos frontières, ajoute-t-il. L'habileté à innover, à s'adapter rapidement à une réalité changeante est ce qui permet à une entreprise de devenir un acteur dominant de son industrie dans le monde. En fait, c'est plus une question de culture que de technologie.»